Au début du XIVème siècle, les trois premiers officiers de la couronne étaient : le connétable de France, chef suprême des armées ; le chancelier de France qui administrait la justice, les affaires ecclésiastiques et les affaires étrangères ; le souverain maître de l’hôtel de la maison du roi.
Le connétable siégeait de droit au Conseil étroit ; il avait sa chambre à la Cour et devait suivre le roi dans tous ses déplacements. Il recevait en temps de paix, en dehors des prestations en nature, 25 sous parisis par jour et 10 livres à chaque fête. En période d’hostilités ou simplement pendant les déplacements du roi, ce traitement était doublé. En outre, pour chaque jour de combat où le roi chevauchait avec l’armée, le connétable recevait 100 livres supplémentaires.
Tout ce qui se trouvait dans les forteresses ou châteaux pris à l’ennemi appartenait au connétable, à l’exception de l’or et des prisonniers qui étaient au roi. Parmi les chevaux enlevés à l’adversaire, il choisissait aussitôt après le roi. Si ce dernier n’était pas présent lors de la prise d’une forteresse, c’était la bannière du connétable que l’on hissait. Sur le champ de bataille, le roi lui-même ne pouvait décider de charger ni d’attaquer sans avoir pris conseil et ordres du connétable. Celui-ci encore assistait obligatoirement au sacre où il portait l’épée devant le roi.
Sous les règnes de Philippe le Bel et de ses trois fils, ainsi que pendant la première année du règne de Philippe VI de Valois, le connétable de France fut Gaucher de Châtillon, comte de Porcien, qui devait mourir octogénaire en 1329.
Le chancelier de France, assisté d’un vice-chancelier et de notaires qui étaient des clercs de la chapelle royale, avait charge de préparer la rédaction des actes et d’y apposer le sceau royal dont il était gardien, d’où son titre également de garde des Sceaux. Il siégeait au Conseil étroit et à l’Assemblée des pairs. Il était le chef de la magistrature, présidait toutes les commissions judiciaires et portait la parole au nom du roi dans les lits de justice.
Le chancelier, par tradition, était un ecclésiastique. Lorsque, en 1307, Philippe le Bel destitua son chancelier, l’évêque de Narbonne, et remit les sceaux à Guillaume de Nogaret, celui-ci, n’étant pas homme d’Église, ne reçut pas le titre de chancelier mais celui créé à son intention de « secrétaire général du royaume », tandis que Marigny était fait « coadjuteur et recteur général du royaume ».
Le chancelier de Louis X fut, dès le commencement de l’année 1315, Étienne de Mornay, chanoine d’Auxerre et de Soissons, précédemment chancelier du comte de Valois.
Le souverain maître de l’hôtel, appelé plus tard grand maître de France, commandait à tout le personnel noble et roturier au service du souverain ; il avait sous ses ordres l’argentier, qui tenait les comptes de la maison royale et l’inventaire du mobilier, des étoffes et de la garde-robe. Il siégeait au Conseil.
Venaient ensuite, parmi les grands officiers de la couronne : le grand maître des arbalétriers, qui dépendait du connétable, et le grand chambellan.
Le grand chambellan avait soin des armes et vêtements du roi ; il devait se tenir auprès de lui tant de jour que de nuit « quand la reine n’y était pas ». Il avait la garde du sceau secret, pouvait recevoir les hommages au nom du roi et faire prêter serment de fidélité. Il organisait les cérémonies où le roi armait de nouveaux chevaliers, administrait la cassette privée, assistait à l’assemblée des pairs. Parce qu’il était chargé de la garde-robe royale, il avait juridiction sur les merciers et tous les métiers du vêtement, et commandait au fonctionnaire nommé « roi des merciers » qui vérifiait les poids et mesures, balances et aunages.
D’autres charges enfin, survivance de fonctions tombées en désuétude, n’étaient plus qu’honorifiques mais donnaient toutefois accès au Conseil du roi ; telles étaient les charges de grand chambrier, grand bouteiller et grand panetier, tenues respectivement à l’époque qui nous occupe par Louis Ier de Bourbon, le comte de Châtillon Saint-Paul, et Bouchard de Montmorency.
Philippe le Bel avait légué son cœur, ainsi que la grande croix d’or des Templiers, au monastère des dominicains de Poissy, Cœur et croix disparurent, la nuit du 21 juillet 1695, dans un incendie provoqué par la foudre.
Il était habituel au Moyen Âge de garder une lampe allumée la nuit au-dessus du lit. Cette pratique était destinée à écarter les mauvais esprits.
Les lettres patentes conférant l’apanage de la Marche à Charles de France et la pairie à Philippe de Poitiers furent respectivement délivrées en mars et août 1315.
La maison d’Anjou-Sicile est si liée à l’histoire de la monarchie française au XIVème siècle, et interviendra si souvent au cours de ce récit, qu’il nous semble nécessaire de rappeler au lecteur certaines précisions concernant cette famille.
En 1246, Charles, comte apanagiste de Valois et du Maine, fils de Louis VIII et septième frère de Saint Louis, avait épousé la comtesse Béatrix qui lui apportait, selon l’expression de Dante : « la grande dot de Provence ». Choisi par le Saint-Siège comme champion de l’Église en Italie, il fut couronné roi de Sicile à Saint-Jean-de-Latran, en 1265.
Telle fut l’origine de cette branche de la famille capétienne connue sous le nom d’Anjou-Sicile, et dont les possessions et les alliances s’étendirent rapidement sur l’Europe.
Le fils de Charles Ier d’Anjou, Charles II dit le Boiteux (1250-1309), roi de Naples, de Sicile et de Jérusalem, duc des Fouilles, prince de Salerne, de Capoue et de Tarente, épousa Marie, sœur et héritière du roi Ladislas IV de Hongrie. De cette union naquirent :
- Marguerite, première épouse de Charles de Valois, frère de Philippe le Bel ;
- Charles-Martel, roi titulaire de Hongrie ;
- Louis d’Anjou, évêque de Toulouse ;
- Robert, roi de Naples ;
- Philippe, prince de Tarente ;
- Raymond Bérenger, comte d’Andria ;
- Jean Tristan, entré dans les ordres ;
- Jean, duc de Durazzo ;
- Pierre, comte d’Éboli et de Gravina ;
- Marie, épouse de Sanche d’Aragon, roi de Majorque ;
- Blanche, épouse de Jacques II d’Aragon ;
- Béatrice, mariée d’abord au marquis d’Este, puis au comte Bertrand des Baux ;
- Éléonore, épouse de Frédéric d’Aragon.
L’aîné des fils de Charles le Boiteux, Charles-Martel, marié à Clémence de Habsbourg, et pour lequel la reine Marie réclamait l’héritage de Hongrie, mourut en 1296. Il laissait un fils, Charles-Robert dit Charobert, qui après quinze ans de lutte ceignit la couronne de Hongrie, et deux filles dont l’une, Béatrice, épousa le dauphin Viennois, Jean II, et l’autre, Clémence, devait devenir la seconde épouse de Louis X Hutin.
Le second fils de Charles le Boiteux, Louis d’Anjou, renonça à tous ses droits successoraux pour entrer en religion. Évêque de Toulouse, il mourut au château de Brignoles en Provence, à l’âge de vingt-trois ans. Il devait être canonisé en 1317 sous le pontificat de Jean XXII.
À la mort de Charles le Boiteux, en 1309, la couronne de Naples revint au troisième fils, Robert.
Le quatrième fils, Philippe, prince de Tarente, devint empereur titulaire de Constantinople par son mariage avec Catherine de Valois-Courtenay, fille du second mariage de Charles de Valois.
Dynastie fabuleusement féconde et active, la famille d’Anjou-Sicile totaliserait, dans sa durée, 299 couronnes souveraines et 12 béatifications.
Le mariage de Philippe de Valois avec Jeanne de Bourgogne, sœur de Marguerite et dite Jeanne la Boiteuse, avait été célébré en 1313.
Rien n’est plus malaisé à établir ni n’offre plus matière à débat que les comparaisons de valeur de la monnaie à travers les siècles. Tant de variations, dévaluations et mesures gouvernementales diverses ont affecté les cours que les spécialistes ne parviennent jamais à se mettre d’accord.
On ne peut guère fonder les équivalences sur les prix des denrées, même essentielles, car ces prix variaient considérablement et parfois d’une année à l’autre selon le degré d’abondance ou de rareté des produits, et aussi selon les taxes que l’État leur faisait supporter. Les périodes de disette étaient fréquentes et les prix cités par les chroniqueurs sont souvent des prix de « marché noir », ce qui fausse toute appréciation du pouvoir d’achat. En outre, certaines denrées d’usage courant aujourd’hui étaient peu répandues au Moyen Âge et donc de prix élevé. En revanche, et en raison du faible coût de la main-d’œuvre artisanale, les produits manufacturés étaient relativement à bas prix.
La valeur comparative de l’or au poids pourrait paraître la meilleure base d’estimation ; encore nous assure-t-on que l’or est, de nos jours, maintenu artificiellement à un taux très supérieur à sa valeur réelle. Nous avons déjà quelque difficulté à faire des calculs d’équivalence avec le franc de 1914. Comment pourrions-nous prétendre à des évaluations exactes pour la livre de 1314 ?
Après comparaison de divers travaux spécialisés, nous proposons au lecteur pour commodité, et sans lui laisser ignorer que la marge d’erreur peut être comprise entre la moitié et le double, une équivalence de 100 francs d’aujourd’hui pour une livre au début du XIVème siècle. Les dépenses du royaume, au temps de Philippe le Bel, sauf dans les années de guerre, s’élevaient en moyenne à 500 000 livres, ce qui grosso modo représenterait un budget de 50 millions, ou 5 milliards d’anciens francs. Nos anciens et nos nouveaux francs préparent d’ailleurs de sérieux pièges aux historiens futurs. (Cette note a été établie en 1965.)
Le jugement de 1309 qui prétendait régler la succession d’Artois (voir notre note p.223 du Roi de fer) n’avait accordé à Robert, sur l’héritage de ses grands-parents, que la châtellenie de Conches, écart normand apporté aux d’Artois par Amicie de Courtenay, femme de Robert II.
En compensation, Mahaut était tenue de verser à Robert, dans un délai de deux ans, une indemnité de 24 000 livres ; d’autre part, un revenu de 5 000 livres était assuré à Robert sur diverses terres du domaine royal qui, réunies à la châtellenie de Conches, constitueraient le comté de Beaumont-le-Roger.
La formation du comté fut retardée pendant plusieurs années durant lesquelles Robert ne toucha qu’une infime partie de ses revenus. Il ne devait devenir réellement comte de Beaumont qu’à partir de 1319. Le reliquat des sommes qui lui étaient dues ne lui fut versé que sous Philippe V, en 1321, et, sous Philippe VI, en 1329, le comté fut érigé en pairie.
Le culte des reliques fut un des aspects les plus marquants et les plus étonnants de la vie religieuse au Moyen Âge. La croyance en la vertu des vestiges sacrés dégénéra en une superstition universellement répandue, chacun voulant posséder de grandes reliques pour les garder chez soi, et de petites pour les porter au cou. On avait des reliques à la mesure de sa fortune. La vente des reliques devint un véritable commerce, et l’un des plus prospères à travers les XIème, XIIème, XIIIème siècles, et même encore pendant le XIVème. Tout le monde en trafiquait. Les abbés, pour augmenter les revenus de leurs couvents ou s’attirer les faveurs de grands personnages, cédaient des fragments des saints ossements dont ils avaient la garde. Les croisés souvent s’enrichirent de la vente de pieux débris rapportés de leurs expéditions. Les marchands juifs avaient une sorte de réseau international de vente de reliques. Et les orfèvres encourageaient fort ce négoce car on leur commandait châsses et reliquaires qui étaient les plus beaux objets du temps et qui témoignaient autant de la fortune que de la piété de leurs possesseurs.
Les reliques les plus prisées étaient les morceaux de la Sainte Croix, les fragments du bois de la Crèche, les épines de la Sainte Couronne (encore que Saint Louis eût acheté pour la Sainte-Chapelle une Sainte Couronne prétendument intacte), les flèches de saint Sébastien, et beaucoup de pierres aussi, pierres du Calvaire, du Saint Sépulcre, du mont des Oliviers. On alla même jusqu’à vendre des gouttes du lait de la Vierge.
Lorsqu’un personnage contemporain venait à être canonisé, on s’empressait de débiter sa dépouille. Plusieurs membres de la famille royale possédaient, ou étaient convaincus de posséder des fragments de Saint Louis. En 1319, le roi Robert de Naples, assistant à Marseille au transfert des restes de son frère Louis d’Anjou, récemment canonisé, demanda la tête du saint pour l’emporter à Naples.
Comme tu es étrange, mon garçon.
Ce n’était pas encore le fameux « Palais des papes » que l’on connaît et visite, et qui ne fut bâti qu’au siècle suivant. La première résidence des papes avignonnais était le palais épiscopal un peu agrandi.
Guccio Baglioni ! Par Bacchus, c’est toi ? Quel plaisir de te voir !
Très cher Boccace, quelle chance ! Que fais-tu ici ?
La chasse aux cardinaux, la chasse aux cardinaux ! Ils vous ont bien roulés, les Monseigneurs !
Pas pour nous, Seigneur, pas pour nous, mais en ton nom…
Le gibet de Montfaucon se trouvait sur une butte isolée, à gauche de l’ancienne route de Meaux, environ l’actuelle rue de la Grange-aux-Belles.
Enguerrand de Marigny fut le second d’une longue liste de ministres, et particulièrement de ministres des Finances, qui terminèrent leur carrière à Montfaucon. Avant lui, Pierre de la Brosse, trésorier de Philippe III le Hardi, y avait été pendu ; après lui, Pierre Rémy et Macci dei Macci, respectivement trésorier et changeur de Charles IV le Bel, René de Siran, maître de la monnaie de Philippe VI, Olivier le Daim, favori de Louis XI, Beaune de Samblançay, surintendant des Finances de Charles VIII, Louis XII et François Ier, y subirent le même sort. Le gibet cessa d’être utilisé à partir de 1627.
Cette Eudeline, fille naturelle de Louis X, et religieuse au couvent des clarisses du faubourg Saint-Marcel de Paris, devait être autorisée, par une bulle du pape Jean XXII du 10 août 1330, à devenir, en dépit de sa naissance illégitime, abbesse de Saint-Marcel ou de tout autre monastère de clarisses.