[1] Ces deux termes désignaient sous la monarchie de Juillet le centre droit et le centre gauche, le premier favorable au principe d'autorité (Casimir Périer), le second voulant poursuivre la révolution de Juillet, ou la laisser «ouverte» (Lafitte). Mais Hugo élargit le sens daté de ces noms pour faire apparaître l'époque tout entière sous le signe de la contradiction.

[2] Refrain d'une chanson de Béranger, Le Roi d'Yvetot (1813), composée contre Napoléon.

[3] Titre historique de Cromwell. Le parallèle entre la Révolution anglaise et la française, entre Cromwell et Napoléon, était déjà banal au moment où Hugo l'emploie dans Cromwell, en 1827.

[4] Discours de Guillaume du Vair (1555-1621) prononcé devant le Parlement après les barricades de mai 1588, au moment où la Ligue se révolte contre Henri III.

[5] Empereur fantoche du Mexique en 1821, détrôné en 1823, fusillé en 1824. Comme dans Châtiments, son nom remplace ici celui de Louis-Napoléon Bonaparte.

[6] En fait, c'est la maison d'Orange qui monta sur le trône en 1688; la maison de Brunswick-Hanovre n'y parvint qu'en 1714.

[7] L'exilé désavoue ici le Pair de France: dans la première version du texte, avant 1848, plusieurs de ces réflexions étaient prises en charge par le narrateur lui-même. Voir M. R. Journet et G. Robert, Le Manuscrit des Misérables, ouv. cit., p. 155. Ce n'est qu'un cas limite des nombreuses modifications qui réorientent les perspectives du livre, surtout en matière politique et religieuse.

[8] En l'occurrence: quoique Bourbon, parce que Bourbon.

[9] Il s'agit des 221 députés libéraux qui, en mars 1830, exprimèrent leur opposition à la politique de Charles X par une «adresse» à laquelle le roi répondit par la dissolution de la Chambre. A la nouvelle assemblée, 202 furent réélus. De là les ordonnances de juillet et les Trois Glorieuses. Le 31 juillet 1830, La Fayette reçut Louis-Philippe à l'Hôtel de Ville et le présenta au peuple parisien.

[10] Le duc d'Aumale, chef de la maison d'Orléans en 1862, remercie Hugo de ce portrait dans une lettre du 8 juillet au général Le Flô qui la transmit à l'auteur. Hugo ne fait pas ici que témoigner sa reconnaissance au Prince qui l'avait fait académicien (1841) et Pair de France (1845); Louis-Philippe était à ses yeux, et demeurait, le moyen du «progrès en pente douce».

[11] En avril 1834 éclatèrent des tentatives insurrectionnelles à Lyon et à Paris. Le dimanche 13 avril, les barricades élevées au centre de Paris furent enlevées avec brutalité; l'armée, pénétrant dans la maison du 12, rue Transnonain, massacra sauvagement tous les habitants. Cet épisode sanglant rappelle que les dix premières années de la monarchie de Juillet furent marquées par une série de manifestations politiques républicaines et de soulèvements ouvriers mêlés, à Paris et à Lyon (1831, 1834 surtout et, en mai 1839, émeute parisienne dite des Saisons, menée par Barbès et Blanqui).

[12] Le témoin est, bien sûr, l'auteur lui-même, familier du «château» surtout à partir de 1844.

[13] Lois répressives promulguées en septembre 1836 à la suite de l'attentat de Fieschi contre Louis-Philippe.

[14] Il s'agissait de Barbès, condamné à mort pour son action aux émeutes de 1839 et dont Hugo avait demandé la grâce au Roi par un quatrain ensuite publié dans Les Rayons et les Ombres (III). Un an après la publication des Misérables, le Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie (chap. 52) donna explicitement sa valeur autobiographique à ces lignes énigmatiques en retraçant toute l'histoire et en reproduisant la touchante lettre de remerciements tardifs adressé à Hugo par Barbès, qui s'était reconnu à la lecture des Misérables.

[15] Hugo datera toujours son «socialisme» de 1828, c'est-à-dire du Dernier Jour d'un condamné. Non sans raison: la question pénale est une des premières «questions sociales» à une époque où les «classes dangereuses» recoupent effectivement en partie les «classes laborieuses».

[16] Cet ouvrier du faubourg Saint-Antoine tenta, en 1841, d'assassiner deux princes de la famille royale.

[17] Préfet de police à Paris entre 1831 et 1836.

[18] Ce Q.C.D.E. se lit aussi C.Q.D.E.: c'est quod erat demonstrandum, en français, C.Q.F.D. (ce qu'il fallait démontrer).

L U og a1 Fe = u go L1 a fe = Hugo l'a fait. Hugo s'inscrit dans les conspirateurs comme il a déjà pris rang parmi les bandits (voir Homère Hogu).

[19] Journal de Cabet, postérieur aux événements de 1832 puisqu'il parut de 1833 à 1835.

[20] En III, 4, 1.

[21] «Monstre horrible, informe, colossal, aveugle» (Virgile, Enéide, III, 658).

[22] Victor Hugo y vécut avec sa mère et son frère Eugène en 1814, à proximité du Conseil de guerre où demeuraient les Foucher.

[23] Louis-Marie Prudhomme (1752-1830) dirigea de 1789 à 1794 l 'hebdomadaire Les Révolutions de Paris. Il n'y a jamais eu de constitution de l'an II. La Constitution républicaine date de 1793, c'est-à-dire de l'an I. Ce sont les soldats qui sont de l'an II! Mais c'est Grantaire qui se trompe, sans doute pas Hugo.

[24] C'est le deuxième gilet rouge du roman, le premier, «téméraire», était porté par Bahorel. Notons que V. Hugo, comme Adèle dans son récit de la bataille d'Hernani (Victor Hugo raconté…, ouv. cit., p. 456) attribuent à Gautier un «gilet à la Robespierre» quoique l'intéressé ait toujours prétendu avoir revêtu non un gilet rouge – et surtout pas «à la Robespierre» -, mais un «pourpoint rosé cerise». Le troisième gilet rouge sera à nouveau porté par Bahorel, à l'enterrement du général Lamarque en IV, 10, 4. Cette circonstance s'éclaire par la lecture de Histoire d'un crime (III, 6; volume Histoire): «Gaston Dussoubs […] portait comme autrefois Théophile Gautier, un gilet rouge.» Ce Dussoubs était député de la gauche en 1851. Malade au moment du coup d'État, il fut remplacé sur les barricades de décembre par son frère, Denis, qui y mourut en arborant l'écharpe de député que son frère lui avait confiée.

Toute la conversation qui suit – la partie de domino – reproduit à peu près un fragment dramatique daté du 30 mars 1855 (voir éd. J. Massin, t. IX, p. 990).

[25] Escousse et Lebras se suicidèrent après l'échec de leur drame Raymond, joué à Paris en février 1832, répétant ainsi le geste du Chatterton de Vigny.

[26] Sauf Balzac qui, note M. M.-F. Guyard (Les Misérables, Garnier, «Classiques Garnier»), décrit ce lieu au début de la quatrième partie de La Femme de trente ans.

[27] Voir déjà II, 4, 1 et note 3. Hugo avait vu, en septembre 1827, le bourreau «répéter» l'exécution de Louis Ulbach qui devait avoir lieu le lendemain. Ce spectacle et cette mort firent sur lui une impression profonde qui ne fut pas étrangère à la rédaction du Dernier Jour d'un condamné.

[28] Némorin: amant d'Estelle dans le roman de Florian. Schinderhannes (Jean l'Écorcheur): chef d'une bande de voleurs, guillotiné en 1803 – figure importante de l'imaginaire sadique hugolien, dans Châtiments en particulier.

[29] Déjà Panchaud – en III, 8, 10 (p. 603) – avait de cette façon signé son nom. Le condamné du Dernier Jour… observe avec la même fascination les noms gravés sur les murs de sa cellule et Hugo, visitant la Conciergerie en septembre 1846, note soigneusement les noms et inscriptions charbonnés sur les murs avant d'écrire lui-même, au crayon, quelques vers sur un pilier – voir Choses vues, ouv. cit., 1830-1846, p. 397-433.

[30] Le lecteur, lui, en est sûr: voir la liste des affiliés de Patron-minette en III, 7, 4.

[31] C'était en III, 2, 6.

[32] Le château de Vauvert était hanté par les diables, croyait-on à Paris depuis le Moyen Age. La manufacture installée sur la Bièvre tire, elle, son nom de son fondateur au XVe siècle, Jehan Gobelin.

[33] Célèbres historiens et philosophes du droit, allemands, de la fin du XVIIIe-début du XIXe siècle. Hugo savait peut-être que cette querelle opposait à Gans non seulement Savigny, mais aussi Gustave Hugo.

[34] C'est rue Plumet que le général Hugo passa les derniers mois de sa vie et mourut – voir III, 3, note 51. Par ailleurs on lit dans le dossier Faits contemporains (d'où beaucoup de matériaux ont été extraits pour Les Misérables) la description et l'histoire d'une maison environnée d'un jardin, construite en 1787 par le comte d'Artois pour la Guimard, habitée ensuite par Joséphine de Beauharnais et enfin, en 1822, par le vieux général Bertrand. Son architecture aussi a beaucoup de points communs avec cette maison de Jean Valjean (texte daté 1845-1846, éd. J. Massin, t. VII, p. 959-960).

[35] Il y eut, pendant la Révolution, une section parisienne portant ce nom. Le beau-père de Hugo, P. Foucher en relevait (voir Souvenirs, Pion, 1929, p. 77). Ce nom n'a pas été choisi au hasard par Hugo qui avait d'abord écrit rue Planche-Mibray.

[36] La multiplication des domiciles, utile à l'action, est parallèle à celle des noms, forme de l'anonymat. D'autre part on ne peut pas ne pas voir ici une ironique allusion autobiographique: au moment où il commence Les Misérables, Hugo aussi a trois domiciles: le sien, celui de Juliette et celui de Léonie Biard, séparée de son mari. Enfin les trois adresses ont valeur symbolique autant que biographique. Le père de Hugo mourut rue Plumet; la rue de l'Ouest, actuelle rue d'Assas, parallèle à la rue Notre-Dame-des-Champs était voisine de la demeure des Hugo et de la maison d'Adèle au temps de leur jeunesse; la rue de l'Homme-Armé – au nom éloquent – passait pour la plus misérable de Paris.

[37] L'ameublement typiquement hugolien de Cosette (baldaquin, damas rouge ornèrent toutes les demeures de Hugo du palais Masserano à l'avenue d'Eylau) est complété par le lit de sangle de Jean Valjean qui reprend la baraque du couvent – voir II, 8, note 16 – elle-même écho de la chapelle habitée par Lahorie au fond du jardin des Feuillantines. Hauteville-House répète cette disposition, mais en hauteur, avec le «look-out» et la minuscule chambre à petit lit du poète.

[38] C'est l'église la plus proche des Feuillantines et elle avait, pour Hugo, une valeur toute particulière. «Cette église […] a de grosses colonnes et des entrecolonnements assez élevés. Un des plaisirs des petits Hugo était de sauter de ces entrecolonnements à terre.

[39] Ce détail se révélera important en V, 1, 4.

[40] Hugo n'aimait guère le maréchal Mouton, comte Lobau, qui commandait la garde nationale sous Louis-Philippe. Voir déjà, dans Claude Gueux: «Il est très important de faire des lois pour que j'aille, déguisé en soldat, monter patriotiquement la garde à la porte de M. le Comte de Lobau que je ne connais pas et que je ne veux pas connaître.»

[41] D'un vers de Lucrèce (De natura rerum, V, 971): «[…] s'enveloppant de feuilles et de branches». Du parc des Feuillantines que les enfants découvrirent «inculte, sauvage, […] forêt vierge», Hugo garda le goût des jardins livrés au désordre et aux forces de la nature. Préférence contraire à la passion de sa mère pour le jardinage et qui s'exprime dans l'ambiguïté du thème: «Un jardinier est un fossoyeur», a dit Fauchelevent en II, 8, 1.

[42] En fait, soit moins, 34 ans, s'il s'agit du moment (1827-1828) où Hugo allait quotidiennement voir son père rue Plumet; soit plus, 50 ans, s'il s'agit de l'époque (1812) où il habitait Les Feuillantines dont le jardin de la rue Plumet ressuscite les splendeurs. Mais il est vrai que Hugo retourna aux Feuillantines en 1822 pour y rencontrer Lamennais (voir I, 3, note 23).

[43] Sur ce principe de l'unité du monde dont Hugo a la première intuition à Montreuil-sur-Mer, en 1837, et qu'il formule dans la lettre à sa femme (éd. J. Massin, t. V, p. 1307-1308), voir déjà I, 5, note 1.

[44] Le mot «compression» est souvent employé, au XIXe siècle, dans le sens technique de notre actuel «répression».

[45] La même course, le même essoufflement, et un autre baiser, sont le premier et l'unique souvenir d'amour du condamné dans Le Dernier Jour… (chap. XXXIII). Ce chapitre et les suivants sont imprégnés du souvenir de Léopoldine, mêlé à celui d'Adèle petite.

[46] Marchands de nouveautés à la mode.

[47] Ne pouvant faire venir à lui une montagne, Mahomet alla, sagement, vers elle.

[48] Voir tout le livre 6 de la troisième partie, La conjonction de deux étoiles.

[49] Hugo avait assisté au ferrement puis au départ des forçats pour Toulon lors d'une visite à Bicêtre, le 24 octobre 1827, avec David d'Angers et décrit déjà ce spectacle dans Le Dernier Jour d'un condamné.

[50] Cette Vestale est là par dérision; sa première représentation date de 1807.

[51] Les traces s'en voient chez Hugo jusque dans le projet de discours sur les prisons, préparé pour la Chambre des Pairs en mai 1847 (éd. J. Massin, t VII, p. 119).

[52] Cette leçon a déjà trouvé son application dans Le guet-apens, III, 8, 20 et 21.

[53] La mère Plutarque a autant de crédulité que l'historien grec dont elle porte le nom.

[54] Il lui a été présenté en III, 3,7 et Gillenormand a exécuté «le remplaçant» en III, 5, 6.

[55] Opéra de Weber créé à Paris en 1831. Adèle, la fille de V. Hugo, avait noté en septembre 1854 ce propos de son père: «Lorsque je vis Paganini pour la première fois, c'était en 1835 ou en 1836, à une répétition d'un opéra de Weber, Euryanthe. C'est là que j'ai entendu le choeur d'Euryanthe que je considère comme une des plus belles choses de la musique.» (Journal d'Adèle Hugo. Minard, 1984, t. III, p. 350.)

[56] Ce titre, et les mouvements de l'âme que ce chapitre renonce à cerner, s'inscrivent entre Post corda lapides et L'herbe cache et la pluie efface.

[57] Fréquentée jadis par des femmes galantes, cette rue se serait appelée à l'origine «Pute y musse» ou «y muse»: s'y cache ou s'y promène. Étymologie peut-être calomnieuse.

[58] Voir en III, 4, 3, note 79.

[59] Un chapitre du Victor Hugo raconté… (ouv. cit., p. 497-500) est consacré à cette grande épidémie, la dernière de l'histoire de Paris, qui emporta le Premier ministre Casimir Périer, mais fit beaucoup plus de victimes dans les quartiers et les îlots misérables – voir L. Chevalier, Classes laborieuses et Classes dangereuses à Paris pendant la première moitié du XIXe siècle, Plon, 1958, rééd. Hachette, Le Livre de Poche, «Pluriel», 1978.

[60] Un grand orme planté au Moyen Age devant l'église avait donné son nom au carrefour. Mais il n'existait plus depuis la Révolution.

[61] «Pour tous.»

[62] Du pain noir.

[63] À l’échafaud.

[64] Mouchards, gens de police.

[65] Travailler.

[66] Cette périphrase désigne Bonaparte.

[67] Ce débris d'éléphant providentiel, grandiose et misérable était la maquette en plâtre d'un monument de bronze projeté par Napoléon. Elle subsiste place de la Bastille de 1814 à 1846; Hugo en avait emporté un morceau lors de sa démolition en juillet 1846.

Gavroche et ses frères sont dans l'éléphant comme les Grecs dans le ventre du cheval de Troie – voir William Shakespeare: «Il [Eschyle] raccourcit aux proportions naines les Grecs vainqueurs de Troie par trahison, il les montre mis bas par une machine de guerre, il les appelle "ces petits d'un cheval".» Et, plus loin: «Dans l'Inde, on donne volontiers les enfants à garder aux éléphants. Ces bontés énormes veillent sur les petits […].» (I, 4, 7)

[68] Bouteille contenant de l'acide sulfurique dans laquelle on plongeait «l'allumette chimique».

[69] Souvenir de Boileau: «Passer du grave au doux, du plaisant au sévère.»

[70] Tout un passage des Mômes développe cette image sous le titre: «Conversation des flots. – Sous l'eau» (éd. J. Massin, Fragments dramatiques, t. IX, p. 978).

[71] Chose vue et racontée par Hugo, de façon moins décente, à l'automne 1846 – ouv. cit., 1830-1846, p. 480-481.

[72] Lors de sa visite à la Conciergerie, Hugo s'était fait décrire par un ancien «valet de bourreau» la maison de M. Sanson en 1846 – Choses vues, ouv. cit., 1830-1846, p. 418-419.

[73] Moustiquaire.

[74] Quelle bonne nuit pour une évasion!

[75] Fèves.

[76] Allons-nous-en. Qu’est-ce que nous faisons ici?

[77] Il pleut à éteindre le feu du diable. Et puis les gens de police vont passer, il y a là un soldat qui fait sentinelle, nous allons nous faire arrêter ici.

[78] Qu’est-ce que tu dis là? L’aubergiste n’a pas pu s’évader. Il ne sait pas le métier, quoi! Déchirer sa chemise et couper ses draps de lit faire une corde, faire des trous aux portes, fabriquer des faux papiers, faire des fausses clefs, couper des fers, suspendre sa corde dehors, se cacher, se déguiser, il faut être malin. Le vieux n’aura pas pu, il ne sait pas travailler.

[79] Ton aubergiste aura été pris sur le fait. Il faut être malin. C’est un apprenti. Il se sera laissé duper par un mouchard, peut-être même par un mouton, qui aura fait le compère. Écoute, Montparnasse, entends-tu ces cris dans la prison? Tu as vu toutes ces chandelles. Il est repris, va! Il en sera pour faire ses vingt ans. Je n’ai pas peur, je ne suis pas un poltron, c’est connu, mais il n’y a plus qu’à fuir, ou autrement on nous la fera danser. Ne te fâche pas, viens avec nous, allons boire une bouteille de vieux vin ensemble.

[80] Je te dis qu’il est repris. À l’heure qu’il est, l’aubergiste ne vaut pas un liard. Nous n’y pouvons rien. Allons-nous-en. Je crois à tout moment qu’un sergent de ville me tient dans sa main.

[81] Une corde (argot du Temple).

[82] Ma corde (argot des barrières).

[83] Un homme.

[84] Un enfant (argot du Temple).

[85] Un enfant (argot des barrières).

[86] Un enfant comme moi est un homme, et des hommes comme vous sont des enfants.

[87] Comme l’enfant a la langue bien pendue!

[88] L’enfant de Paris n’est pas fait en paille mouillée.

[89] Cette corde.

[90] Attacher la corde.

[91] Au haut du mur.

[92] À la traverse de la fenêtre.

[93] Ta fille.

[94] Rien à faire là.

[95] Bête.

[96] Une bonne part de la documentation de Hugo vient des Mémoires d'un forban philosophe, roman anonyme de 1829, dont Léonie Biard a assuré pour lui une partie du dépouillement Mais, nous le verrons plus loin, Hugo était depuis longtemps très attentif à la langue de la misère, comme en témoignent ses carnets – voir, par exemple, Choses vues, ouv. cit., 1830-1846, p. 436-437.

[97] Paresse.

[98] Le dernier jour d’un condamné.

[99] On a sifflé la pièce.

[100] Vous trouverez dans ces commérages-là une multitude de raisons pour que prenne ma liberté.

[101] Dans la comédie Poenulus, «Le Carthaginois».

[102] Littré cite l'emploi de ce mot au XVe siècle chez Froissart, ce qui semble prouver qu'il n'était pas argotique à l'époque de Villon.

[103] Il semble que ce mot ne figure pas dans l'oeuvre de F. Villon.

[104] Il faut observer pourtant que mac en celte veut dire fils.

[105] On peut se demander si ce n'est pas pour cette signification argotique que Hugo a situé l'auberge Thénardier ruelle du Boulanger, à Montfermeil (I, 4, 1). «Enfourner», dans le récit déjà cité (note 103 plus haut) de la visite de la Conciergerie, signifie aussi dans l'argot du bourreau «attacher le condamné sur la planche de la guillotine».

[106] Pain.

[107] Cheval.

[108] Paille.

[109] Hardes.

[110] L’église.

[111] Le cou.

[112] Hugo avait commenté, transcrit et reproduit en fac similé une de ces chansons dans Le Dernier Jour d'un condamné, chapitre XVI et Note 2.

[113] Archer. Cupidon.

[114] Je ne comprends pas comment Dieu, père des hommes, peut torturer ses enfants et ses petits-enfants et les entendre crier sans être torturé lui-même.

[115] Restif de la Bretonne (1734-1806) surnommé «le Rousseau du ruisseau», était l'auteur, entre 250 volumes, du Paysan perverti.

[116] Voir en III, 3, 2 la note 39.

[117] Voir III, 6, 8 et la note 108.

[118] Cette voiture anglaise fut introduite en France en 1852. L 'insistance sur le mot conduit à noter qu'il est l'anagramme de A B C.

[119] Chien.

[120] Apporté. De l’espagnol llevar.

[121] Manger.

[122] Casser un carreau au moyen d’un emplâtre de mastic, qui, appuyé sur la vitre, retient les morceaux de verre et empêche le bruit.

[123] Criera.

[124] La scie.

[125] Couper.

[126] Travailler ici.

[127] Couteau.

[128] Des francs, des sous ou des liards.

[129] Tendus en travers de la Seine, ces filets retenaient les cadavres des noyés.

[130] Chanson de Béranger, Ma Grand-mère, dont le premier vers est:

«Combien je regrette»…

[131] Un juif.

[132] Pantin, Paris.

[133] Ce monument expiatoire, élevé par la Restauration sur les lieux de l'attentat où le duc de Berry fut tué en 1820 (square Louvois), ne fut remplacé par la fontaine de Visconti qu'en 1844.

[134] Pépin et Morey, complices de Fieschi lors de l'attentat de 1835 contre Louis-Philippe, furent exécutés le 15 janvier 1836. Selon Choses vues (ouv. cit., 1830-1846, p. 143 et suiv.), ils avaient été dénoncés par Fieschi.

[135] Ce Diogène Laërce-là est inconnu à la Bibliothèque nationale.

[136] Un des principaux chefs de l'insurrection de 1832, voir plus loin, chap. 4.

[137] Les guillemets, ici ajoutés en 1860-1862, mettent à distance ce que Hugo pensait en 1847-1848, quand il se contentait encore de cet «à peu près de sagesse».

[138] 10 août 1792: prise des Tuileries défendues par les gardes suisses; l'abolition de la royauté et la mort de Louis XVI s'en suivront. C'est le 13, et non le 14 vendémiaire an IV (5 octobre 1795) que Bonaparte arrêta les insurgés royalistes qui marchaient sur la Convention.

[139] Turgot, ministre des Lumières, remplaça aux Finances, en 1774, Terray, conservateur attaché au maintien des privilèges.

[140] Ramus (1515-1572) humaniste protestant, fut assassiné dans son école lors du massacre de la Saint-Barthélémy. C'est, comme Jean Huss, une des figures du Panthéon hugolien.

[141] Lapidation de Môtiers (1765) d'où Rousseau, restant en Suisse cependant, gagna l'île Saint-Pierre.

[142] Tels, plus tard, les parents de la Flécharde, dans Quatrevingt-treize.

[143] Miquelets: maquisards espagnols. Verdets: royalistes arborant la cocarde verte, responsables de la Terreur blanche dans le Midi après le 9 thermidor et au début de la seconde Restauration. Cadenettes: tresses de cheveux à la mode chez les muscadins de la réaction thermidorienne (1794). Les compagnons de Jéhu, héroïques dans le roman de Dumas (1861), furent les militants de la contre-révolution dans le Midi de la France à partir de 1794. Chevaliers du brassard: Hugo désigne ainsi ironiquement les partisans du duc d'AngouIême, dont les gardes, en 1814, portaient un brassard vert.

[144] Ce n'est pas Lafayette mais la Constitution de 1793 qui dit: «Quand le pouvoir viole les droits du peuple, l'insurrection est pour le peuple […] le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.»

[145] Juvénal (Satires, I, 79) dit: «Si natura negat, facit indignatio versum»: «En l'absence de talent, l'indignation fait le vers.» Juvénal aurait été exilé à Syène, en Egypte. L'homme des Annales est Tacite. «L'immense exilé» est saint Jean qui composa à Pathmos l'Apocalypse.

[146] En janvier 1847, à Buzançais dans l'Indre, des paysans tuèrent un propriétaire qui refusait de baisser le prix du blé. Trois d'entre eux furent exécutés. Voir Choses vues, ouv. cit., 1847-1849, p. 53.

[147] Voir IV, 1, 3 et la note 11.

[148] Sur ces événements, Hugo emploie ses souvenirs personnels (voir Choses vues, 1830-1846, p. 133-134 ainsi que Victor Hugo raconté…, p. 501) mais, bien d'avantage, le récit de Louis Blanc, Histoire de dix ans (1843).

[149] Sont in petto les cardinaux dont le pape a décidé la nomination, mais ne l'a pas publiée.

[150] Comme une occasion que saisiraient – et que saisirent effectivement – les divers partis de l'opposition, y compris le centre gauche modéré, pour achever la révolution arrêtée à mi-chemin en 1830.

[151] Il mourut le 22 juillet 1832.

[152] Le coq gaulois avait remplacé, en 1830, la fleur de lys comme emblème national.

[153] C'est aussi sur ce motif que le Lucien Leuwen de Stendhal est renvoyé de l'École polytechnique.

[154] Voir IV, 1, 5 et note 16.

[155] Détail authentique: ce drapeau rouge était surmonté d'un bonnet de la liberté; l'homme qui le portait – les présents l'interprétèrent ainsi – appartenait probablement à la police. C'est en 1848 que, dans une intervention célèbre au balcon de l'Hôtel de Ville, Lamartine fit adopter le drapeau tricolore contre le drapeau rouge des ouvriers et de la Révolution de 93. Depuis…

[156] Chose vue par Hugo, mais lors de l'insurrection de mai 1839 dont les événements, observés de près, sont souvent transposés ici. «Dans une maison en construction, rue des Cultures-Saint-Gervais, les maçons ont repris leurs travaux. On vient de tuer un homme rue de la Perle.» (Choses vues, ouv. cit., 1830-1846, p. 172.)

[157] Jeanne, déjà nommé (voir chap. I, note 1), fut blessé, fait prisonnier et condamné à la déportation. La résistance héroïque de sa barricade est racontée par Louis Blanc dans Histoire de dix ans. Hugo s'en inspire étroitement et en transpose les événements comme il l'avait fait pour le couvent de la rue Neuve-Sainte-Geneviève.

[158] Hugo écrivait alors Le roi s'amuse. Voir Victor Hugo raconté… (ouv. cit., p. 501): «Il ne put que s'abriter entre deux minces colonnes du passage. Les balles durèrent un quart d'heure.»

[159] Cette image concrétise souvent chez Hugo la parole évangélique «Spiritus flat ubi vult»: «L'Esprit de Dieu souffle où il veut» (Jean, III, 8).

[160] Observation faite par Hugo, mais, à nouveau, en 1839: «Sur le boulevard du Temple, les cafés se ferment. Le Cirque olympique se ferme aussi. La Gaieté tient bon et jouera.» (Choses vues, ouv. cit., 1830-1846, p. 165-166.)

[161] Chose vue, toujours en 1839: «Au milieu de ce tumulte, on voit passer trois ou quatre drapeaux tricolores. Commentaires. On reconnaît que ces drapeaux sont tout simplement l'ornement d'une petite charrette à bras où l'on colporte je ne sais quelle drogue à vendre.» (Ibid., p. 165.)

[162] Le maréchal Clauzel, qui tenait avec Lafayette et les députés Lafitte et Mauguin, l'un des quatre coins du drap mortuaire aux funérailles de Lamarque, avait prononcé, à la suite de Lafayette, un discours d'adieu à Lamarque.

Le mot qui lui est prêté, «Ayez d'abord un régiment», aurait été dit non à Carrel, opposé à l'émeute, mais à un artilleur de la garde nationale qui le pressait d'entrer dans l'insurrection.

[163] Cest lors de sa visite à la Conciergerie, en 1846, que Hugo apprit ce détail du directeur, M. Lebel: «Monsieur, on m'en a envoyé six cents! Je les ai mis ici. Ils couchaient sur des bottes de paille. Ils étaient fort exaltés. L'un d'eux, Lagrange, le républicain de Lyon, me dit: – Monsieur Lebel, si vous voulez me laisser voir ma sœur, je vous promets de faire faire silence dans la chambre. Je lui laissai voir sa sœur, il tint parole, et ma chambrée de six cents diables devint comme un petit paradis.» (Ibid., p. 402-403.) Mais Hugo ne précise pas à l'occasion de quelle émeute Lagrange avait été ainsi incarcéré à la Conciergerie.

[164] Ce vénérable académicien (1770-1854) avait été, du temps du Conservateur littéraire, une des cibles préférées du jeune Hugo et vota toujours contre lui à l'Académie. Il avait été surnommé «Balourd dormant».

[165] «Si vis pacem para bellum»: «Si tu veux la paix, prépare la guerre», dit le proverbe latin.

[166] Ceci est une dénégation, c'est-à-dire un aveu, du principe de transposition signalé à la note 157 du livre précédent.

Pourquoi ce nom de Corinthe? Hugo s'est peut-être souvenu de la destruction de cette ville d'art et de luxe par Sparte en 244 avant J.-C, puis par Rome. Elle était le sujet de l'opéra de Rossini, Le Siège de Corinthe, représenté en 1826, et qu'Ymbert Gallois, dans la lettre reproduite par Littérature et Philosophie mêlées (volume Critique), décrit comme l'un des rares moments d'«extase» de sa vie.

[167] Ces deux vers sont de Saint-Amant (La Solitude, 85-88) et non de Théophile et leur décor n'est pas le cabaret Corinthe, mais un château en ruine.

[168] «Cueille les heures.» Horace (Odes, I, 11) avait dit: «Carpe diem»: «Cueille le jour.» Le trajet suivi par l'inscription, du français au latin, est exactement inverse à celui suivi par l'inscription gravée dans Notre-Dame de Paris, «Tu ora» («Toi, prie») devenu «Trou aux rats».

[169] Corneille avait écrit, dans Héraclius: «Devine si tu peux et choisis si tu l'oses.»

[170] Frère chapeau: religieux laïque, portant donc chapeau et non capuchon, attaché au service d'un père de son ordre. C'est pourquoi ils vont par deux: bini.

[171] Comme on lui faisait remarquer qu'on ne mange pas d'huîtres en juin, Hugo répondit: «C'est une bourriche qui restait du mois précédent», et maintint son texte.

[172] Du Breul et Sauvai sont les principales sources documentaires de Notre-Dame de Paris, avec l'abbé Lebeuf, auteur d'une Histoire du diocèse de Paris (1754-1758).

[173] La Bibliothèque royale, aujourd'hui Bibliothèque nationale.

[174] «Malheur aux vaincus!» (Tite-Live, Histoire romaine, V, 48.)

[175] L'apparition d'une comète avait précédé l'assassinat de César par Brutus.

[176] Souvenir d'enfance de V. Hugo, alors en Espagne – voir Victor Hugo raconté…, ouv. cit., p. 221, et Les Chants du crépuscule, V, Napoléon II. Victor Hugo revit cette comète à Waterloo: «3 juillet (1861). Mont-Saint-Jean. A dix heures du soir, vu la comète. Un paysan disait en la regardant terrifié: "Elle est vivante!"» (Carnet, éd. J. Massin, t. XII, p. 1536.)

[177] «Apollon Timbré.» Thymbrée, en Troade, avait un temple d'Apollon, dieu de la poésie, si l'on en croit Virgile (Géorgiques, IV, 323).

[178] Comme le fait remarquer Y. Gohin (Les Misérables, éd. «Folio»), l'étymologie populaire faisait de barrique l'origine du mot barricade.

[179] Vers d'Horace (Épitres, I, 17) passé à l'état de proverbe: «Il n'est pas permis à tous d'aller à Corinthe.» Le texte en offre un démenti puisque tout le personnel du roman – Cosette et Thénardier exceptés – se retrouve sur la barricade.

[180] Léopold Hugo en mettant ses fils à la pension Cordier en février 1815 les destinait à l'Ecole polytechnique. Victor avait nourri pour les mathématiques toute l'opposition violente qu'il ne pouvait exprimer à son père: voir A propos d'Horace (Les Contemplations, I, 13):

J'étais alors en proie à la mathématique.

Le caractère autobiographique de ce passage est confirmé par la réplique de Grantaire: «Je suis capitoul et maître ès jeux floraux»: Victor Hugo avait reçu le Lys d'or en 1819 et, l'année suivante, avait été nommé «maître ès jeux floraux» par l'académie de Toulouse.

[181] Une farce représentée aux Variétés le 20 février 1832, Gibou et madame Pochet ou Le Thé chez la ravaudeuse avait eu un succès colossal. Le clou de la pièce était l'absorption d'un thé fait de vinaigre, huile, poivre, œuf, farine, etc. de sorte que «le thé de Madame Gibou» était vite devenu une expression proverbiale pour désigner tout salmigondis, culinaire ou non.

[182] Déjà cité en II, 1, 5, écrivain militaire auteur d'une Dissertation sur Polybe et d'un Traité de la défense des places.

[183] Histoire d*un crime rapporte deux événements semblables, l'un vécu par Hugo dans la journée du 4 décembre 1851. «Comme j'allais sortir de la barricade Pagevin, on m'a amené un prisonnier, "un mouchard", disait-on. Il s'attendait à être fusillé. Je l'ai fait mettre en liberté.» L'autre, voisin, rapporté dans les notes annexes à l'ouvrage: «On finit par trouver sa carte d'agent de police dans le fond de sa culotte. Un enfant indigné lui tire un coup de pistolet qui rate. […]» (éd. J. Massin, t. VIII, p. 171 et 291.)

[184] Paroles entendues par V. Hugo sur une barricade, dans la nuit du 4 décembre 1851: «Il y aurait des musiciens, mais il n'y a pas de clarinette.» (Histoire d'un crime, IV, 2,. volume Histoire.)

[185] Saint Michel est l'archange qui chasse Adam et Eve du Paradis.

[186] La place Louis XV devint successivement place de la Révolution en 1792, de la Concorde en 1795, Louis XV à nouveau en 1814, Louis XVI en 1823. En 1830, elle était redevenue place de la Concorde, mais son nom primitif était resté usuel.

[187] Hugo renvoie ici le lecteur au fameux chapitre de Notre-Dame de Paris: Paris à vol d'oiseau.

[188] Déjà cité avec Harmodius en III, 4, 1 dans le portrait d'Enjolras – voir note 65.

[189] Version dérisoire du coq gaulois – voir note 152 en IV, 10, 3. La «banlieue» désigne la garde nationale recrutée pour l'essentiel en banlieue, qui est alors plus bourgeoise et plus réactionnaire que Paris.

[190] Même nombre symbolique qu'en II, 1, 2, voir note 4.

[191] C'est-à-dire celui qui a voté la mort du Roi.

[192] Note du manuscrit: «14 février [1848]. Ici le pair de France s'est interrompu, et le proscrit a continué: 30 décembre 1860. Guernesey.»

[193] Gavroche confirme ici sa qualité de «gamin de lettres». En familier des théâtres, il emploie la langue des coulisses. Cette expression est en effet relevée comme telle par Du Mersan dans son Journal des dames et des modes (1823) avec le sens de bévue. Le même Du Mersan (ou Dumersan) était l'auteur d'un vaudeville joué en 1830, Les Brioches à la mode, parodiant les «perles» romantiques contemporaines.

[194] Annoncée, par antiphrase partielle, comme «incendiaire», cette chanson galante qui, brusquement, fait rimer «charmille» avec «Bastille», donne déjà le ton des Chansons des rues et des bois – dont beaucoup sont écrites à cette date. Le dernier nom féminin cité, Stella, renvoie à Châtiments (VI, 15).

Загрузка...