Je n'oublierai jamais

Paroles: Charles Aznavour. Musique: Georges Garvarentz 1969

Quand on a dix-huit ans

Des amis merveilleux

Fainéants

Pique-assiette et que l'on est comme eux

Pas bégueules

On va dans les salons

Snobinards et dorés

Jouer

Les anarchistes aigris, les révoltés

Forts en gueules

Je n'oublierai jamais

Le troupeau de crevards

Hirsutes et mal lavés

Arrivant quelque part

Assaillant le buffet

Et jetant au hasard

Les pattes dans les mets

Sous de tristes regards

De détresse

Je n'oublierai jamais

Nos hurlement d'horreur

En voyant des objets

Des tableaux de valeur

On se montrait exprès

Goujats et monstrueux

Et puis l'on décampait

Sans merci, ni adieu

A l'hôtesse

On se voulait cyniques

Exécrables, et pourtant

Nous étions romantiques

faits de chair et de sang

De faiblesse

Je n'oublierai jamais

Je n'ai pas de remords

Et je recommencerai

Si je tenais encore

Ma jeunesse

A l'époque on était

De joyeux rigolos

Plus ou moins

Attachés

A de vagues journaux très obscurs

Philosophes, écrivains

Poètes d'occasion

Illustres inconnus

Néanmoins

Nous avions la dent dure

Je n'oublierai jamais

Nos merveilleux festins

Près des tonneaux percés

D'où pissait le bon vin

Quand nous étions vautrés

Dessus ou bien dessous

Que le jus nous coulait

Dans le nez, dans le cou

Les entrailles

Je n'oublierai jamais

Nos cris et nos serments

Nos discours enflammés

Sur le désarmement

Nos folles équipées

Nos courses éperdues

A travers un quartier

Qui nous crachait dessus

Nos batailles

Les filles à la page

Qui partageaient nos jours

Et faisaient le ménage

La cuisine, et l'amour

Tendres cailles

Je n'oublierai jamais

Ce que j'ai vu s'enfuir

Je n'ai pas de regrets

Car j'ai des souvenirs

En pagaille

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