11 Sandra et Bose

Kyle, le frère de Sandra, vivait dans une institution appelée Live Oaks Polycare Residential Complex, Complexe Résidentiel Multisoins des Chênes Vivants, située sur le grand terrain d’un ancien ranch. Un ruisseau passait à côté et il y avait bel et bien un bosquet de chênes vivants sur la propriété.

Quand elle avait pris ses dispositions pour y faire placer Kyle, Sandra avait eu la curiosité d’effectuer une recherche sur l’expression « chênes vivants » : pourquoi « vivants » ? Par opposition à quoi ? Elle avait toutefois découvert qu’on les qualifiait tout simplement ainsi parce qu’ils restaient verts toute l’année. Au Texas, avait-elle lu, un bosquet de ces arbres était appelé « mott ».

Elle avait testé ce terme sur la réceptionniste, à l’époque où elle venait d’arriver au Texas et se sentait encore gênée par son accent de Nouvelle-Angleterre : « J’aimerais emmener Kyle dans ce mott de chênes vivants près du ruisseau. » La réceptionniste l’avait regardée d’un air déconcerté. « Je veux dire, dans le bosquet d’arbres », avait précisé Sandra en rougissant. Oh. Bien sûr, aucun problème.

C’était en tout cas devenu un rituel, quand le temps le permettait. La plus grande partie des employés de jour la reconnaissait, à présent, et Sandra savait le nom de la plupart d’entre eux. « C’est encore caniculaire, aujourd’hui, lui dit l’infirmière qui l’aidait à sortir Kyle de son lit et à l’installer dans un fauteuil roulant. Mais votre frère apprécie la chaleur, je crois.

— Il aime l’ombre des arbres. »

Simple conjecture, bien entendu. Kyle n’avait exprimé de préférence ni pour l’ombre des arbres, ni pour quoi que ce soit : il était incapable de marcher, de contrôler ses sphincters ou de prononcer une phrase cohérente. Quand quelque chose le chagrinait, il plissait le visage en poussant des hululements. Quand il se sentait heureux, du moins pas malheureux, il grimaçait une espèce de sourire animal qui dévoilait ses dents et ses gencives. Ses bruits de bonheur étaient de légers soupirs qui se formaient au fond de sa gorge. Ah, ah, ah, ah.

Ce jour-là, il sembla ravi de voir sa sœur. Ah. Il tourna le visage dans sa direction tandis qu’elle le poussait sur le chemin pavé, puis sur la pelouse, en direction des chênes vivants. L’infirmière l’avait coiffé d’une casquette aux couleurs des Astros de Houston pour lui éviter le soleil dans les yeux. Comme il tendait le cou, cette casquette de base-ball menaçait de tomber et Sandra dut la remettre d’aplomb.

Il y avait une table de pique-nique dans le bosquet, davantage destinée aux visiteurs qu’aux patients, pour la plupart incapables de marcher. Ce jour-là, Kyle et elle eurent l’endroit pour eux. L’ombre, associée à la fraîcheur humide qui semblait monter du ruisseau, rendait la chaleur supportable et presque agréable. Par chance, une brise soufflait. Les feuilles des chênes tremblaient et filtraient la lumière.

Kyle avait cinq ans de plus que Sandra. Avant ce que les docteurs appelaient « son accident », elle avait toujours pu lui parler de ses ennuis. Il avait pris au sérieux son rôle de grand frère, même s’il plaisantait à ce sujet. « Je n’ai aucun conseil pour toi, Sandy », disait-il. Elle ne laissait personne d’autre l’appeler ainsi. « Tous mes conseils sont mauvais. » Mais il lui avait toujours prêté une oreille attentive et bienveillante, ce qui était le plus important.

Elle aimait toujours lui parler, même s’il ne comprenait pas une syllabe de ce qu’elle racontait. Il la suivait du regard quand elle s’adressait à lui, peut-être parce qu’il aimait le son de sa voix, et elle se demandait, malgré les conclusions des neurologistes, s’il ne restait pas un petit fragment de mémoire fonctionnelle en lui, une braise de conscience qui luirait parfois de compréhension.

« J’ai quelques petits problèmes, en ce moment », commença-t-elle.

Ah, fit Kyle, un bruit aussi doux et sans plus de signification que le bruissement des feuilles.


C’était le Spin qui avait tué son père et détruit son frère.

Au fil des ans, Sandra avait de nombreuses fois réfléchi et cherché une cause première à l’événement. Elle aurait aimé pouvoir déverser sa haine sur quelqu’un ou quelque chose, mais en la circonstance, le reproche se montrait insaisissable. Il passait sur les cibles potentielles en refusant de rester fixé à elles. Et en définitive, derrière tous les faits banals et quotidiens, derrière le million d’éventualités énigmatiques, il y avait le Spin. Le Spin avait changé et mutilé de nombreuses existences, pas seulement celle de son frère, pas seulement la sienne.

Paradoxalement, le Spin avait été bénéfique pour la mère de Sandra, dont la carrière d’ingénieur en électronique avait végété jusqu’à ce que le Spin rende obsolètes les communications par satellite et crée un marché dynamique pour les relais aérostatiques de signaux. Elle avait été embauchée par une compagnie appartenant au magnat des aérostats, E. D. Lawton, pour laquelle elle avait conçu un système de stabilisation d’antenne aéroportée devenu ensuite une norme industrielle. Très sollicitée sur le plan professionnel, elle était souvent absente.

On pouvait dire l’inverse du père de Sandra. Le chaos et la confusion consécutifs à la disparition des étoiles dans le ciel avaient provoqué une récession mondiale au cours de laquelle l’entreprise de développement de logiciels de son père s’était étiolée comme un poinsettia de Noël après le Nouvel An. Cela, ou le Spin lui-même, dans sa simplicité et sa brutalité, l’avait plongé dans une dépression qui s’atténuait parfois, mais ne disparaissait jamais vraiment. « Il a juste plus ou moins oublié comment on souriait », expliqua un jour Kyle, et Sandra, alors âgée de dix ans, avait sombrement accepté cette non-explication.

C’était facile, pour nous autres de la génération suivante, songea-t-elle : nous étions complètement habitués à ces vérités, à ce que notre planète soit encerclée par d’anonymes extraterrestres capables de manipuler jusqu’au passage du temps, à ce que, pour ces êtres divins, l’espèce humaine soit à la fois dérisoire et importante d’une manière ou d’une autre. On vivait avec parce qu’on l’avait toujours fait. Sandra elle-même était née en fin de Spin, à peu près à l’époque où les étoiles (bien que dispersées et étranges) étaient réapparues dans le ciel. Elle devait peut-être sa propre existence à un dernier accès d’optimisme ou de désespoir de ses parents, geste positif consistant à créer une nouvelle vie dans un monde qui semblait s’écrouler et sombrer dans l’anarchie.

Mais le retour des étoiles n’avait pas changé grand-chose pour son père. On aurait cru qu’un processus interne de délabrement s’était enraciné en lui, impossible à arrêter. Personne n’avait jamais rien dit de significatif à ce propos. La mère de Sandra, quand elle était présente, s’efforçait de créer une impression de normalité. Et comme ni Sandra ni Kyle n’osaient la contredire, l’illusion s’avérait d’une facilité surprenante à entretenir. Son père tombait souvent malade et passait beaucoup de temps à se reposer à l’étage. Rien de plus simple à comprendre, si ? Bien sûr que non. C’était triste, et peu pratique, mais la vie continuait. Du moins, elle continua jusqu’au jour où, en rentrant de l’école, Sandra découvrit son père et son frère dans le garage.

Cela se produisit trois semaines avant son onzième anniversaire. Elle fut surprise de ne trouver personne à la maison. Rentré de l’école avec un rhume, Kyle avait laissé son ordinateur ouvert sur la table de la cuisine. La machine jouait un film, un truc bruyant avec des avions et des explosions, comme les aimait son frère. Sandra l’éteignit et entendit alors le moteur de la voiture. Pas celle que prenait sa mère pour aller travailler, l’autre, celle dans le garage, celle que son père conduisait à l’époque où il ne se cachait pas en haut dans l’obscurité.

Elle comprenait le suicide, du moins le concept. Elle savait même que certains se suicidaient en s’enfermant dans un espace fermé avec un moteur en fonctionnement. Empoisonnement au monoxyde de carbone. Elle supposait – c’était une idée qu’elle ressassa surtout dans les mois difficiles qui suivirent – qu’elle comprenait même l’envie de mourir de son père. Les gens pouvaient devenir comme ça. C’était une espèce de maladie. On ne pouvait le reprocher à personne. Mais pourquoi son père avait-il emmené Kyle dans le garage avec lui et pourquoi Kyle avait-il accepté d’y aller ?

Elle ouvrit la porte de communication entre le garage et la cuisine. Les gaz d’échappement lui firent tourner la tête, aussi rebroussa-t-elle chemin et sortit-elle faire coulisser la grande porte du garage pour permettre à l’air frais de chasser le poison. La manœuvre ne lui posa aucune difficulté malgré les chiffons enfoncés par son père dans les interstices pour empêcher les gaz de s’échapper. Ce n’était même pas verrouillé. Elle ouvrit ensuite la portière côté conducteur et parvint, en se penchant sur son père, à couper le moteur. La tête de son père avait roulé sur ses épaules et sa peau avait pris une troublante et délicate teinte bleue. Il avait de la salive séchée sur les lèvres. Elle essaya de le réveiller, en vain. Kyle était à côté de lui, ceinture attachée. S’attendait-il à aller quelque part ? Ni l’un ni l’autre ne bougea quand elle les secoua et qu’elle cria.

Elle appela les secours et attendit l’ambulance devant la maison. Les minutes s’écoulèrent comme des heures. Elle aurait voulu appeler sa mère, mais celle-ci participait à un salon professionnel au Sri Lanka et Sandra ne savait pas comment la joindre. Cet après-midi ensoleillé de mai donnait un début d’air estival à la banlieue de Boston dans laquelle elle habitait. Elle ne voyait personne d’autre dans la rue. On aurait dit que les maisons s’étaient endormies. Que tous les voisins avaient été enfermés chez eux, comme des rêves faits par les maisons.

Les secours emmenèrent Sandra à l’hôpital avec eux et lui trouvèrent un endroit pour dormir. La mère de Sandra revint de Colombo le lendemain. Son père, apprit-on, était mort longtemps avant qu’elle le découvre. Elle n’aurait rien pu faire pour lui. Le jeune corps de Kyle avait mieux résisté au poison qu’il respirait, expliqua un médecin. Il vivait, mais avait subi des dommages cérébraux irrémédiables et ne retrouverait jamais ses fonctions supérieures.


La mère de Sandra avait succombé sept ans plus tard à un cancer du pancréas diagnostiqué trop tard pour le traiter efficacement. Son testament stipulait qu’une somme d’argent devait servir à financer les études de Sandra et une autre beaucoup plus substantielle à subvenir en permanence aux besoins de Kyle. Quand Sandra déménagea à Houston, elle demanda aux notaires de la succession de trouver une résidence dans les environs pour Kyle, s’il y en avait une de convenable, afin qu’elle puisse lui rendre visite régulièrement. Ils avaient choisi le Live Oaks Polycare Residential Complex. Live Oaks se consacrait aux patients gravement handicapés et était considéré comme un des meilleurs du pays dans cette spécialité. Cela coûtait cher, mais peu importait : la succession pouvait se le permettre.

Kyle avait été placé sous sédatifs pour le vol dans l’ouest. Sandra s’était arrangée pour assister à son réveil. Mais si reprendre conscience dans un lit inconnu d’une chambre inconnue avait suscité en lui la moindre angoisse ou appréhension, il n’en avait rien montré.


Dans la chaleur de la mi-journée, il avait l’air d’attendre qu’elle lui parle. Et pour une fois, Sandra ne savait pas trop par où commencer.

Elle lui parla d’abord de Jefferson Bose. Elle lui dit qui il était et toute l’affection qu’elle lui portait. « Je crois qu’il te plairait aussi. Il est policier. » Elle marqua un temps d’arrêt. « Mais il n’est pas que ça. »

Elle baissa la voix, même s’il n’y avait personne d’autre dans le bosquet pour l’entendre.

« Tu as toujours aimé les histoires sur Mars de l’époque du Spin. Sur la transformation des colonies humaines en véritables civilisations pendant que la Terre était enfermée dans la barrière du Spin. Sur leur quatrième stade de la vie, celui où les gens pouvaient vivre plus longtemps s’ils acceptaient certaines obligations et certains devoirs. Tu te souviens ? Ces histoires que Wun Ngo Wen a racontées au monde avant de se faire tuer ?

« Eh bien, Mars ne nous parle plus et des gens sans aucun scrupule ont transformé ces médicaments martiens en quelque chose de plus laid, un truc avec lequel ils peuvent gagner de l’argent au marché noir. Mais Wun Ngo Wen avait dans son camp des gens comme Jason Lawton et ses amis, des gens qui prenaient au sérieux l’éthique martienne. J’avais entendu des rumeurs et on trouvait toujours des trucs en ligne là-dessus. Sur des groupes clandestins qui considéraient le traitement de longévité de la même manière que les Martiens. Qui le gardaient pur et ne le vendaient pas, mais le partageaient, comme il avait été conçu pour l’être, avec les responsabilités que ça impliquait. Qui s’en servaient avec sagesse. »

Elle murmurait presque, à présent. Les yeux de Kyle continuaient à suivre le mouvement de ses lèvres.

« Je n’y croyais pas, à ces histoires. Mais maintenant, je crois qu’elles sont vraies. »

Bose lui avait dit ce matin-là n’être pas uniquement flic. Il connaissait des gens qui respectaient les usages martiens. Des amis qui détestaient le marché noir. On pouvait acheter la police, mais pas les amis de Bose, parce qu’ils avaient déjà pris le traitement de longévité, la version originale. Et ce que lui-même faisait, il le faisait dans l’intérêt de ces gens-là.

Elle raconta cela tout bas à Kyle.

« Bon, tu veux sans doute me demander », et en tant que grand frère, il aurait sûrement posé la question, « si je lui fais confiance. »

Le clignement d’yeux de Kyle ne voulait rien dire.

« La réponse est oui », continua-t-elle, soulagée de le confirmer à voix haute. « C’est ce que je ne sais pas qui m’inquiète. »

Par exemple la signification, si elle en avait une, de l’histoire de science-fiction d’Orrin Mather. Ou le pansement sur le bras de Jack Geddes et ce qu’il pouvait vouloir dire sur les tendances violentes d’Orrin. Ou la cicatrice que Bose avait essayé de lui cacher et qu’il n’avait toujours pas expliquée.

Le temps passa. Une infirmière finit par prendre le chemin qui menait au bosquet, le pas lent dans la chaleur. « Il est temps de remettre ce garçon au lit », annonça-t-elle. La casquette de Kyle était tombée, mais à l’ombre des arbres, cela n’était pas bien grave. Il perdait déjà ses cheveux. Sandra voyait la peau de son crâne, rose comme celle d’un bébé, entre les mèches blond pâle. Elle ramassa la casquette des Astros et la lui remit doucement sur la tête.

Ah.

« Allez, porte-toi bien, Kyle. À bientôt. »


Sandra avait étudié la psychiatrie pour comprendre la nature du désespoir, mais n’en avait vraiment appris que sa pharmacologie. L’esprit humain était moins facile à comprendre qu’à traiter avec des médicaments. On trouvait à présent davantage d’antidépresseurs, et plus efficaces, qu’à l’époque du long déclin de son père, ce qui était une bonne chose, mais le désespoir lui-même restait mystérieux, tant sur le plan clinique que personnel, punition céleste autant que maladie.

Le long trajet de retour à Houston la fit passer devant un centre d’internement du State Care, un des endroits où allaient ses patients une fois privés de liberté. Longer cet endroit lui pesa inévitablement sur la conscience. Elle évitait en général de le regarder. On parvenait à l’ignorer avec une facilité réconfortante : seul un petit panneau très digne en indiquait l’entrée, le centre lui-même étant situé derrière une crête recouverte d’herbe (jaune et desséchée) qui en dissimulait la plus grande partie à la route, même si Sandra apercevait le sommet des tours de guet. Mais elle avait déjà pris plusieurs fois ce chemin et savait ce qu’il y avait derrière : une énorme résidence de deux niveaux en parpaings, entourée de logements complémentaires de fortune, en général des mobile homes en métal sortis des surplus de la FEMA[2], le tout encerclé de grillage. C’était une communauté d’hommes (en majorité) et de femmes soigneusement séparés les uns des autres et qui ne cessaient d’attendre. Car on ne faisait rien d’autre, dans ces endroits-là. On attendait son tour pour le programme de réinsertion par le travail, on attendait la maigre possibilité d’un transfert dans un foyer du State Care, on attendait les lettres de parents éloignés et indifférents. On attendait avec un optimisme qui mourait à petit feu l’avènement miraculeux d’une nouvelle vie.

C’était une vie faite de grillage, de tôle ondulée et de désespoir chronique. De désespoir médicamenté… Sandra avait dû elle-même rédiger quelques-unes des ordonnances perpétuellement renouvelées au dispensaire du camp. Ce qui ne suffisait même pas toujours. Sandra avait entendu dire que le flux de stupéfiants (alcool, herbe, opiacés, meth) qu’on y introduisait en fraude constituait le principal problème de sécurité du centre.

Une loi en discussion devant la législature d’État prévoyait de privatiser les camps résidentiels. Avec une clause précisant que « la thérapie par le travail » pouvait s’interpréter comme la permission d’embaucher des détenus en bonne santé sur les chantiers routiers ou comme saisonniers agricoles, histoire de rembourser en partie le coût de leur internement. Si cette loi est votée, se dit Sandra, elle signera la fin définitive de ce qu’il restait d’idéalisme dans le système du State Care. Ce qui avait été conçu comme un moyen de fournir réconfort et protection aux indigents chroniques serait devenu une source acceptable d’une forme de servitude… de l’esclavage avec une coupe de cheveux et une chemise propre.

Les tours de guet disparurent dans son rétroviseur au milieu des collines jaunes qui cuisaient au soleil. Elle réfléchit à la colère dans laquelle l’avait plongée Congreve en la dessaisissant du cas Orrin Mather pour l’empêcher de rendre un diagnostic gênant. Mais avait-elle les mains propres de son côté ? Combien d’âmes avait-elle uniquement fait interner parce qu’elles correspondaient à un profil dans le Manuel Diagnostique et Statistique ? Les sauvant ainsi de la cruauté et de la violence des rues, très bien, les sauvant de l’exploitation, du VIH, de la malnutrition et des drogues, tout cela était assez vrai pour soulager sa conscience, mais les sauvant pour quoi, en fin de compte ?

Il faisait presque nuit quand elle arriva chez elle. On était à présent en septembre et les jours raccourcissaient, même si la température restait supérieure à celle de plein août. Elle vérifia si elle avait reçu un message de Bose. C’était le cas, mais il s’agissait juste d’un nouvel extrait du carnet d’Orrin.

Son téléphone vibra pendant qu’elle réchauffait son dîner aux micro-ondes. Pensant que Bose l’appelait, elle décrocha sans vérifier le numéro, mais ne reconnut pas la voix au bout du fil. « Docteur Cole ? Docteur Sandra Cole ?

— Oui ? » Elle se tenait sur ses gardes, mais sans savoir pourquoi.

« J’espère que cette visite à votre frère a été enrichissante.

— Qui est à l’appareil ?

— Quelqu’un qui a vos intérêts à cœur. »

Elle sentit la peur naître dans son ventre et remonter sa colonne vertébrale pour trouver apparemment le moyen de s’installer dans son cœur. Ce n’est pas bon, se dit-elle. Mais elle ne raccrocha pas. Elle attendit, elle écouta.

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