Du pain et des jeux

Après la Coupe du monde de 2022, l 'humanité entière fut gagnée par la fièvre du ballon rond et ce sport s'imposa comme la meilleure façon de régler les problèmes internationaux. Grâce à lui, les pays les plus pauvres, les plus petits ou les plus inconnus furent capables d'accéder au rang des nations de tout premier ordre.

Dans ce stade, on avait désormais la possibilité de se livrer à un simulacre de guerre, pendant une heure trente minutes, sans jamais avoir recours aux armes. Les Birmans pouvaient battre les Espagnols, les Rwandais écraser les Américains, les Finlandais venir à bout des Brésiliens… Le football permettait aux peuples de briller à la face du monde sans tenir compte des différences de langues, de religions, de cultures ou de richesses.

Très vite, le moindre tournoi de dimension planétaire garantissait un audimat record. On estima que le dernier match avait mobilisé deux milliards de spectateurs. Un tiers de l'humanité. Deux milliards de personnes qui, à la même seconde, avaient détesté le même joueur parce qu'il avait fait un tacle à un autre. Qui avaient espéré ou craint qu'un penalty soit marqué. Deux milliards de personnes qui, pendant la durée d'un match, oubliaient leurs problèmes quotidiens.

Le phénomène se développa et une première métamorphose d'importance fut constatée: les effets du football se diversifiaient. La pratique dépassa le simple jeu pour devenir une sorte d'analgésique destiné à l'humanité souffrante. En moins de temps qu'il n'en faut pour l'écrire, la planète vibra d'un même élan aux trajectoires aléatoires du modeste ballon de cuir.

Après quelques matchs, les règles de ce jeu commencèrent à paraître simplistes, surtout au regard des passions déchaînées. Vingt-deux joueurs, un terrain exigu de cent mètres de long sur cinquante de large… cela semblait vraiment étriqué. D'autant que, lors de la fameuse finale Italie-Brésil de 2022, aucune équipe n'étant parvenue à marquer, le match s'était terminé par des tirs au but. Décevant. Il convenait donc d'accroître les difficultés. Dans un premier temps, on imagina de doubler la taille du terrain et le nombre des joueurs, ce qui fournissait déjà un bon niveau de complexité supplémentaire. À vingt-deux contre vingt-deux, des groupes de dix ou douze pouvaient simultanément mener une attaque contre une défense de quatorze ou quinze joueurs.

Puis on modifia le relief du terrain: on ajouta tumulus, mares, bassins de sable… Les attaquants avaient désormais toute latitude pour se cacher derrière une dénivellation, ballon au pied, tandis que les défenseurs ratissaient les alentours. Parfois le ballon tombait dans une mare ou un ruisseau, et les plus courageux devaient s'y précipiter pour le récupérer. Parfois la balle s'enfonçait dans une sablière… Les joueurs ne la dégageaient qu'en provoquant des geysers, un peu comme les golfeurs dans les bunkers. Superbe occasion pour les photographes. Enfin, chaque joueur fut muni d'un téléphone portable: au fur et à mesure de sa progression, il signalait sa position à ses équipiers puis à son capitaine qui, aussitôt, donnait des ordres en conséquence. Par la force des choses se développèrent peu à peu de nouvelles stratégies, toujours plus sophistiquées, qui donnèrent au football moderne la physionomie d'une partie d'échecs en trois dimensions.

Un nouveau public s'enthousiasma ainsi pour ce sport.


L'audimat de la Coupe du monde 2026 passa de deux à trois milliards de téléspectateurs. Soit la moitié de l'humanité. On constata une baisse générale des conflits durant les matchs, comme si le fait d'observer des joueurs se défier sur une pelouse suffisait à faire perdre l'envie de trucider son prochain sur des terrains non reconnus par les fédérations mondiales. Dès lors, les stades se multiplièrent et s'agrandirent. Des conflits considérables se réglèrent par le truchement d'un seul match de foot, un peu à la manière dont les Horaces et les Curiaces s'étaient affrontés dans l'Antiquité. Pourquoi martyriser dix mille personnes quand il suffisait de dépêcher vingt-deux champions pour trancher un dilemme? Certains pays choisirent même pour enjeu la possession d'un territoire ou d'une zone minière.

Les champions devinrent des héros absolus, on les couvrit d'honneurs et d'argent, leurs posters ornèrent les chambres des adolescents. Les plus belles femmes les convoitaient. Même les têtes d'affiche de la télévision, de la chanson et du cinéma ne pouvaient rivaliser avec leur gloire.

Naturellement, devant l'ampleur de ce succès, on construisit de nouveaux stades, toujours plus grands; plus complexes. On augmenta encore le nombre des joueurs, quarante-quatre contre quarante-quatre. En plus du capitaine, chaque équipe disposait maintenant de deux lieutenants, trois commandants, six sergents. Ce n'étaient plus des mottes de terre ou des tumulus mais des petites collines qui structuraient la pelouse. Les mares et les ruisseaux qui striaient l'espace de jeu furent remplacés par des lacs, des rivières et des torrents glacés. On ajouta aussi des marécages, des sables mouvants, des jungles épaisses dont on ne pouvait se dégager qu'à la machette. Certains joueurs furent équipés de réacteurs dorsaux grâce auxquels ils s'élevaient au-dessus du sol. Les avants-centres revêtirent des tenues camouflées, ce qui leur permettait de surgir d'un coup hors du sol, ou de derrière un arbre, à la grande surprise de l'adversaire.

Seule règle inchangée: l'interdiction absolue du contact avec les mains. Dans l'eau, la boue ou les airs, dans les jungles, les joueurs déployaient des trésors d'ingéniosité pour ne pas commettre la faute irréparable.

Au fil des rencontres, les meilleurs réalisateurs de cinéma finirent par remplacer ceux de la télévision. Ils s'en donnaient à cœur joie pour découvrir de nouveaux angles de prises de vues, produire des images surprenantes, des effets spectaculaires. Grâce à des caméras dotées de puissants téléobjectifs, les téléspectateurs voyaient la sueur de l'effort et de l'angoisse perler sur le front des joueurs.

À leur tour, les entraîneurs furent remplacés par des champions de la stratégie issus des grandes écoles militaires. Avant chaque partie, des états-majors de dix à douze personnes se réunissaient pour étudier des tactiques nouvelles et inventer des techniques de passe capables de déconcerter l'adversaire.

On allongea le temps des parties. Six heures pour un match permettaient de mieux développer combinaisons complexes et offensives séduisantes. Parallèlement, les joueurs durent accroître leur masse musculaire; leur alimentation était calculée à une calorie près, leur entraînement digne des meilleurs athlètes.

Après l'extension du terrain et l'augmentation du nombre des joueurs, on imagina d'inclure des femmes dans les équipes, histoire d'ajouter une «note de fraîcheur» aux parties. En fait, il s'agis sait surtout d'améliorer la diversité des images télévisées. Ces femmes étaient des reines du bodybuilding. Certaines, comme Killing Lily, se révélèrent de fabuleuses dribbleuses, bien supérieures à la plupart des hommes. Killing Lily parvenait, grâce à ses réacteurs dorsaux, à exécuter d'incroyables sauts périlleux tout en fusillant les cages de la fameuse Fortress Josepha, une gardienne de but bulgare, ex-championne de patinage (mais ça n'a rien à voir), qui, la première, eut l'idée d'utiliser un radar pour voir venir le ballon lorsqu'il était caché par des troupes d'avants-centres trop bien camouflées.

Tout allait donc pour le mieux et le public était ravi.


Au fil dis temps, le football se développa de manière exponentielle… jusqu'à ce fameux matin de mars 2030, date de la finale mondiale opposant deux pays inattendus: la Nouvelle-Zélande et la Thaïlande.

Ce jour-là, la sophistication de ce sport était parvenue à son apogée. Les deux équipes disposaient désormais d'une île volcanique de cinquante kilomètres carrés. Le nombre des joueurs atteignait trois cent vingt et un, hommes et femmes. Quant à la durée d'un match, elle était carrément: passée à une journée pleine, la partie commençant à huit heures du matin et finissant à huit heures du soir.

Tous les coups étaient permis. Même les plus tordus. Ainsi la position des buts fut-elle laissée à la discrétion des équipes. Côté thaïlandais, on choisit un espace enfoui au fond d'un puits, dont le seul accès se situait au cœur d'un château perché à cent trente mètres d'altitude. Côté néo-zélandais, on installa la cage dans une grotte sous-marine uniquement accessible en apnée par un couloir aquatique. Plus besoin de faire parvenir la balle avec les pieds, il suffisait de la transmettre d'une manière ou d'une autre, du moment qu'on ne la touchait pas avec les mains.

Le ballon avait été truffé de minuscules caméras, de sorte que seul le joueur qui le détenait et les téléspectateurs devant leur écran savaient où il se trouvait. Quant à l'ensemble du match, il était retransmis par des centaines d'autres caméras réparties dans l'île, et logées dans une centaine de dirigeables téléguidés filmant depuis les airs.

Le capitaine de l'équipe thaïlandaise s'appelait Harao Bang. Un petit homme malin, rapide et très cruel.

Le capitaine de l'équipe néo-zélandaise était une superbe jeune fille, Linda Foxbit, ex-miss Océanie, ex-agent secret et surtout top-model en vogue des magazines hawaiiens.

Ce match de la Coupe du monde 2030 était en tout point exceptionnel. D'abord parce que, pour la première fois, les joueurs étaient autorisés à se blesser, voire à se tuer, si les nécessités du jeu l'imposaient. Ensuite parce que le jour de la rencontre avait été décrété férié à l'échelle de la planète. Enfin, parce qu'une multitude de sponsors avaient investi sur le lieu même de la partie. Pas un arbre, une souris, ni un oiseau n'avait été épargné: chaque feuille, poil ou plume portait le nom d'une marque de cigarettes, de soda ou de cosmétiques.

Pour parvenir en finale, les Néo-Zélandais avaient dû éliminer les Indonésiens (1 but à 0, vingt-quatre morts et cinquante-huit blessés), les Hongrois (2 buts à 1, huit morts, onze blessés), les Croates, les Kenyans, les Grecs, les Libyens, les Péruviens. De leur côté, les Thaïlandais avaient écrasé les Américains (4 à 2, trente-cinq morts, douze blessés), les Japonais, les Russes, les Monégasques (un match épique, pour un modeste 1 à 0, soixante-sept morts, pas de blessés), sans oublier les petites équipes qui avaient participé aux éliminatoires et s'étaient fait exclure avec plus ou moins de pertes.

Pour cette finale, chacun des deux camps avait eu la possibilité de choisir une ville comme capitale de base. Au centre se trouvait une métropole neutre où pouvaient librement intervenir et manœuvrer les espions.


À peine le sifflet de l'arbitre eut-il retenti que l'action démarra.

Le ballon, que l'on avait caché dans une consigne de la gare neutre, fut instantanément retrouvé par les Néo-Zélandais, plus précisément par le trois-quarts avant-centre Billy Maxwain. Il tenta aussitôt de le transmettre au trois-quarts aile James Summer, camouflé en policier, mais celui-ci se fit descendre d'une flèche au curare qu'une petite Thaï, l'avant-centre Daï Winei, portant le numéro 164, avait tirée grâce à une sarbacane à soufflerie électrique. Ayant récupéré le ballon, Daï Winei le déposa dans sa voiture de course tout-terrain et se précipita à la pizzeria de la ville neutre centrale.

Là, Daï Winei tenta une passe en direction de son capitaine Harao Bang mais le ballon fut discrètement intercepté par l'agent néo-zélandais Cordwainer, jadis connu pour ses activités de pickpocket. Jusqu'alors les robots-caméras volants avaient pu suivre le match sans grande difficulté. Mais hélas! tout se détériora soudainement. Le capitaine thaïlandais découvrit que la passe de son équipière avait échoué et, dans le même temps, prit conscience que le ballon avait disparu. Volatilisé! Ses radars ne transmettaient plus d'images, signe que la balle était probablement tombée dans une cache sombre ou un trou profond. L'équipe dut faire appel à un détecteur cuir/métaux pour la localiser… Enfermé dans le train de 19 heures 5, le ballon fonçait à 120 kilomètres-heure vers les buts thaïlandais.

Grâce à ses téléphones portables, l'équipe asiatique put avertir la horde de l'aile droite qui, à cheval et sabre au clair, attaqua le wagon. Mais les Neo-Zélandais avaient prévu une parade, en installant sur les toits du convoi une batterie de mitrailleuses et des lanceurs de micro-missiles à tête chercheuse alpha.

La voie ferrée devint le théâtre d'un sublime canardage. Virtuoses de la cavalcade, les terribles égorgeuses thaïlandaises sautèrent de leurs montures et, profitant de la fumée et du tohu-bohu, s'introduisirent dans les wagons. L'une d'elles s'avisa qu'un prêtre presbytérien, naturalisé néo-zélandais, dissimulait le ballon sous sa soutane. Elle le lui subtilisa, non sans avoir préalablement fendu en deux le corps du saint homme, d'un coup de sabre.

Au même moment, l'arbitre siffla un penalty, estimant qu'une tricherie s'était produite. En effet, les Thaïlandais ne pouvaient avoir découvert l'emplacement du ballon à l'aide du détecteur cuir/métaux. Il fallait qu'ils aient aussi regardé la télévision ou que quelqu'un leur ait transmis l'information de l'extérieur, ce qui était strictement interdit. Pour le penalty, on requit un nouveau clergyman, néo-zélandais de souche, et on le fit avancer avec le ballon jusqu'au château thaïlandais.

Le saint homme de remplacement n'eut pas plus de chance que son prédécesseur: les joueurs thaïlandais le mirent en charpie et repartirent sur un autre train qui passait par hasard.

Hélas pour eux! À peine embarqués, un joueur néo-zélandais en short, même pas armé, leur reprit le ballon et se mit à dribbler en avançant vers leur camp!

Consternation dans les rangs asiatiques. Comment l'homme avait-il franchi les barrages?

Il fallut un piège à tigres du Bengale, fait de bambous taillés, pour l'arrêter dans sa course. Le ballon fut aussitôt récupéré par un autre joueur néo-zélandais, camouflé en faux rocher et qui parvint à remonter dans un train partant en sens inverse.

À cet instant, la défense thaïlandaise fut prise de panique. Elle envoya une escouade d'amazones en deltaplane bombarder le train. Initiative qui aurait pu aboutir sans l'intervention inopinée de Mc Moharti. La baronne, d'une grande éloquence, avait déjà quitté le convoi, ballon en main, et amadoué le gardien de l'entrée du château thaïlandais grâce à quelques baisers astucieusement placés.

Joli coup! L'ailière Mc Moharti put ainsi pénétrer dans la bâtisse! Mais c'était sans compter avec la diabolique hargne du capitaine thaïlandais Harao Bang. Il fit enlever la jeune femme et exigea qu'on lui livre le ballon, sinon il la précipiterait depuis la plus haute tour de son manoir dans un lac regorgeant de crocodiles aux dents cariées. Harao Bang méritait vraiment sa réputation de capitaine le plus cruel du football moderne. L'ai-lière était suffisamment difficile à remplacer pour que les Néo-Zélandais cèdent.

La balle revint donc une fois de plus entre les pieds de l'équipe thaïlandaise qui dégagea le plus loin possible en se servant d'une catapulte pneumatique.

Alors, la partie s'accéléra.

Le ballon fut intercepté en vol par un missile air-air qui le renvoya dans le château thaïlandais: à la réception, l'ailière Mc Moharti réussit cette fois à pénétrer dans le grand salon du château en passant par les douves et le service pressing. Là, l'habile ailière séduisit un groom et, après une séance érotique torride (qui choqua le jeune public), se fit guider en direction des buts secrets de l'équipe thaïlandaise. Dans toute la Thaïlande ce ne fut qu'un immense et interminable cri de dépit. Le malheureux groom fut copieusement hué (probablement irait-il après le match s'exiler en Nouvelle-Zélande, seul refuge possible pour lui et sa famille).

Harao Bang s'aperçut trop tard de la manœuvre. Il voulut à nouveau capturer l'espionne mais un arbitre en embuscade siffla un corner, contraignant les deux adversaires à souper ensemble.

Évidemment la baronne tenta un dribble en introduisant un puissant soporifique dans le verre du capitaine ennemi. Mais celui-ci, malin, inversa les verres. Dans le doute, l'ailière s'abstint de boire.

Arrivèrent les hors-d'œuvre. L'arbitre obligea les deux joueurs à manger les aliments présentés sous peine de disqualification. Ce fut le moment que choisit la baronne pour tenter de placer sa botte secrète. Elle sortit de son sac à main un petit cochon d'Inde dressé dont les incisives avaient été enduites de soporifique. Mais l'animal s'endormit, et l'arbitre siffla une faute car on n'avait pas le droit d'utiliser des animaux dressés. Harao Bang jubila, reprit le ballon du pied droit alors que, de la main gauche, il saisissait une hallebarde à double tranchant. L'ailière n'eut que le temps de sortir son nunchaku. Un duel féroce s'ensuivit. Nunchaku contre hallebarde, la baronne était en difficulté… C'est alors que Linda Foxbit, haletante et échevelée, épuisée d'avoir fait l'amour avec tous les gardes thaïlandais, accourut au secours de son ailière droite. À deux contre un, le combat parut plus équilibré.

Tandis que fusaient les gémissements des gardes thaïs, empalés sur les tours du château pour avoir laissé passer le capitaine ennemi, la liesse soulevait les milliards de téléspectateurs. La planète tout entière suivait avec fièvre chaque seconde de cet événement, à côté duquel le dernier James Bond ou la guerre en Afghanistan faisaient figure de récréation pour enfants frappés par la maladie du sommeil.

Les paris pleuvaient, des sommes si énormes circulaient que la Bourse mondiale en fut affectée.

La baronne renversa la table et saisit une grande épée qu'elle fit tournoyer. Effarement chez les spectateurs lorsque l'épée passa à quelques millimètres du ballon: c'était en effet une cause d'annulation de la partie.

Harao Bang eut le dessus jusqu'à ce que, traversant les vitraux du salon, bondissent le sergent arrière gauche Smith et le trois-quarts centre Wilbur, dit le Conquérant.

Wilbur subtilisa le ballon, fonça vers le puits des buts lorsqu'une crise d'asthme (due à la présence de salpêtre auquel il était allergique) le terrassa. Il n'eut que le temps de sortir son spray vasodilatateur et de réussir une passe à Smith qui, accroché au lustre rococo du salon, récupéra la balle. Smith utilisa ses fumigènes et parvint à traverser la ligne de défense thaïlandaise. D'un bond, il sauta au fond du puits. Il sortit son couteau, ce qui s'avéra un bon réflexe car les Thaïlandais avaient empli le puits de piranhas. Smith se débattit, occit quelques poissons mais succomba finalement sous les morsures. Il aurait dû allonger une passe au capitaine Foxbit qui avait plongé à côté de lui et qui maintenant se faisait grignoter, elle aussi, par les piranhas. Dommage. Ça aurait pu donner un joli but à l'équipe néo-zélandaise. Mais c'était toujours le problème avec Smith, il jouait beaucoup trop perso.

Les Thaïlandais récupérèrent le ballon avec des hameçons et voulurent à nouveau dégager en utilisant leur catapulte pneumatique lorsque l'ailier gauche Burroughs ôta son masque: maquillé en Thaïlandais, son déguisement était remarquable, avec ses yeux bridés et sa peau mate. Le défenseur thaïlandais Lim voulut l'assommer d'un coup de gourdin… Trop tard. Quel suspense. Burroughs eut le temps de livrer la passe à la baronne qui venait juste de se libérer de son carcan d'acier. Elle plongea dans le puits et nagea en apnée pour rejoindre le but thaïlandais. Les piranhas complètement gavés depuis le dégagement de Smith et de Foxbit la regardèrent foncer. Ils avaient besoin d'une pause pour digérer.

Buuuuuuuuuuuuuuut!

1 à 0 en faveur de la Nouvelle-Zélande. Ce fut du délire dans l'équipe néo-zélandaise. Tout le monde s'embrassait, se congratulait et s'étreignait, se déshabillait, se félicitait. Le ballon fut replacé au centre du terrain et un groupe de joueuses thaïlandaises enragées foncèrent sans rencontrer de résistance. Elles séduisirent facilement vingt-quatre joueurs néo-zélandais qu'elles étranglèrent ensuite. Une attaque au lance-flammes leur permit de s'enfoncer dans les lignes adverses.

But!

La sirène de fin de match retentit sur ces entrefaites. Score: 1 à 1. Égalité.

Il importait coûte que coûte de départager les équipes: les joueurs survivants se firent donc face sur la colline pour l'épreuve des tirs au but. En effet, malgré la constante évolution des règles, on n'avait toujours pas pensé à remplacer les tirs au but.

Chaque joueur rescapé disposait d'une catapulte pneumatique au moyen de laquelle il devait envoyer le ballon dans un but placé cette fois-ci à même le sol. Le suspense était à son comble. Une Thaïe se saisit du ballon. À l'aide de ses jumelles, elle estima la distance. Avec son doigt, elle tint compte de la vélocité du vent et plaça enfin le ballon sur la catapulte. Feu.

But!

Le ballon avait frappé le sol avec une telle violence qu'à la place du gardien de but néo-zélandais, on apercevait dorénavant un cratère. 2 à 1. Au tour d'un Néo-Zélandais de tenter sa chance. Il tira et… manqua sa cible. Vagues de cris de joie dans un camp et de sifflets dans l'autre.

Le score final fut donc de 2 à 1 en faveur de la Thaïlande, nouvelle championne du monde de football.

Suite à ce match, les Pompes funèbres générales décidèrent, enthousiastes, de sponsoriser la prochaine rencontre.

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