Après avoir jeté un regard sur la banquette arrière, Matt tourna vers Stefan ses yeux rouges de fatigue :
— Excuse-moi d’être si direct, mais je ne vois pas en quoi le bouquet que tu as cueilli pourrait plaire à Elena…
Les brins de verveine, derrière Stefan, avaient en effet piètre allure : leurs fleurs minuscules, à moitié desséchées, ne pouvaient vraiment pas être appréciées pour leur aspect décoratif.
— C’est parce que tu ignores qu’on en fait c’est un excellent collyre, cent pour cent naturel, répondit l’intéressé après un moment de réflexion. Ou une délicieuse tisane.
— Continue à te foutre de moi et je te mets un pain, feignit de s’énerver Matt.
— Stefan eut un sourire. ca faisait une éternité qu’on ne l’avait pas charrié. Enfin quelqu’un qui l’acceptait tel qu’il était ! Sans compter Elena, bien sûr. Cette confiance le réconfortait tellement… même s’il n’était pas sûr de le mériter. Il eut l’impression, l’espace d’une seconde, d’être redevenu l’être humain de jadis.
Elena fixait son reflet avec horreur. La découverte qu’elle venait de faire la traumatisait au plus haut point Ce n’était donc pas un rêve…
Elle comprit soudain comment la fenêtre avait pu s’ouvrir : comment avait-elle pu oublier qu’elle-même avait invité Damon chez Bonnie, lors du souper muet ? Et cette invitation était manifestement valable pour l’éternité… Son ennemi pouvait revenir à n’importe quel moment, et même à cet instant s’il le désirait. Dans l’état où elle était, il n’aurait aucun mal à la persuader d’ouvrir la fenêtre, comme il l’avait visiblement déjà fait dans son sommeil.
Elle quitta précipitamment la salle de bains et passa devant Bonnie sans s’arrêter. Dans sa chambre, elle attrapa son sac et y entassa ses affaires en toute hâte.
— Elena ? Qu’est-ce que tu fais ? Tu rentres chez toi ? s’étonna Bonnie.
— Il faut que je parte immédiatement ! Elle s’avança vers le pied du lit à la recherche de ses chaussures, et s’arrêta net. Sur l’extrémité du drap blanc qui traînait par terre de détachait une immense plume d’un noir luisant. Elena recula en poussant un cri, au bord de la nausée.
— Bon OK, finit par consentir Bonnie, je vais demander à mon père de te ramener.
— Tu dois partir aussi, affirma Elena.
— Quoi ?
Elle n’avait pas oublié les menaces de Damon à l’encontre de son entourage : Bonnie n’était pas plus en sécurité qu’elle dans cette maison.
— Viens avec moi, Bonnie la supplia-t-elle en lui agrippant le bras.
Redoutant la crise de nerfs, les parents de son amies finirent par accepter d’emmener les deux filles chez les Gilbert, où elles pénétrèrent sur la pointe des pieds.
De retour dans sa chambre, Elena ne parvint pas pour autant à trouver le sommeil. Allongée à côté de Bonnie paisiblement endormie, elle guetta le moindre mouvement derrière la vitre. Mais mis à part les branches du cognassier agité par le vent, rien ne bougea jusqu’à l’aube.
Au petit matin, elle entendit un moteur asthmatique, dans la rue. À n’en pas douter, c’était celui de la vieille Ford de Matt, reconnaissable entre tous. Elle se précipita à la fenêtre pour s’en assurer, puis dévala les marches jusqu’au perron.
— Stefan ! Elle lui sauta au cou, folle de joie, sans lui laisser le temps de claquer la portière. Le garçon, un peu surpris par tant d’effusions, dut s’adosser à la carrosserie pour ne pas tomber en arrière.
— Eh, attention aux fleurs, se plaignit-il.
Malgré ses traits tirés, ses yeux brillaient. Quant à Matt, il avait le visage bouffi de fatigue et les yeux injectés de sang.
— Dans quel état vous êtes ! s’étonna-t-elle. Venez entrez.
— C’est de la verveine, lui expliqua Stefan un peu plus tard.
Ils étaient assis côte à côte à la table de la cuisine, La porte entrebâillée laissait voir Matt endormi sur le canapé du salon. Il s’y était affalé après avoir englouti trois bols de céréales. Tante Judith, Bonnie et Margaret dormaient encore en haut.
— Tu te rappelles ce que je t’ai dit sur cette plante ? murmura Stefan.
— Elle aide à garder l’esprit clair lors d’une tentative d’hypnose, répondit Elena, d’une voix dont elle réussit à maîtriser le chevrotement.
— Exact. C’est ce que pourrait tenter Damon. Même pendant ton sommeil. À ces mots, Elena eut grand-peine à retenir ses larmes. Elle fixait les minuscules fleurs de verveine toutes desséchées.
— Même endormie ? demanda-t-elle en tremblant.
— Oui, il peut te persuader de sortir de chez toi, ou bien de le laisser entrer. Mais, avec cette plante, tu n’as rien à craindre !
En dépit de tous ses efforts, une larme roula sur sa joue. Si seulement il savait… Il était arrivé trop tard. Le mal était fait…
— Elena ! Qu’est-ce qui se passe ?
Il essaya de lui relever le menton, mais elle s’obstina à garder la tête baissée, pressée contre son épaule.
— Dis-moi, insista-t-il en l’entourant de ses bras. C’était le moment ou jamais de lui dire la vérité. Mais ses aveux risquaient de le monter davantage contre son frère…
— C’est que… j’étais inquiète pour toi, improvisa-t-elle. Je ne savais pas où tu étais passé…
— Excuse-moi… , J’aurais dû te prévenir. Et… c’est tout ?
— Oui, c’est tout.
Elle allait devoir demander à Bonnie de garder le secret au sujet du corbeau. Pourquoi un mensonge en amenait-il toujours un autre ?
— Et cette verveine ? Comment est-ce que je dois m’en servir ? demanda-t-elle, un peu calmée.
— Une fois que j’aurai extrait l’huile des graines, tu t’en enduiras la peau ou tu en mettras dans l’eau de ton bain. Tu peux aussi glisser les feuilles séchées dans un sachet que tu porteras sur toi.
— J’en donnerai aussi à Bonnie et Meredith. Elles en ont autant besoin que moi, maintenant, il hocha la tête, puis lui tendit un brin.
— En attendant, prends toujours ça. Je rentre chez moi pour préparer ce qu’il te faut. Il resta un moment silencieux.
— Elena…
— Oui ?
— Si ça pouvait te débarrasser de Damon, je n’hésiterais pas à partir. Mais je sais que ça ne servirait à rien. C’est toi qu’il veut !
— Ne fais jamais ça, surtout ! Je ne le supporterais pas. Jure-moi que tu ne m’abandonneras pas !
— Je ne te laisserai pas seule, promis, répondit Stefan.
Ce n’était pas la même chose, mais Elena n’eut pas le courage de le lui faire remarquer.
Stefan sortit avec Matt après l’avoir réveillé, et Elena monta se préparer pour les cours. Bonnie, qui n’avait cessé de bâiller pendant le petit déjeuner, finit par émerger de sa torpeur, dehors, au contact de l’air froid.
— J’ai fait un rêve très étrange, déclara-t-elle.
Elena tressaillit Et si Damon s’en était pris à son amie ? La verveine qu’elle avait glissée dans son sac à son insu ne servirait à rien…
— Ah bon ? C’était quoi ? s’enquit-elle en se préparant au pire.
— J’ai rêvé de toi. Tu étais sous un arbre et le vent soufflait très fort. C’était très bizarre parce que… tu étais effrayante : très pâle, presque transparente, tu n’osais pas t’approcher. Tout à coup, un corbeau perché dans l’arbre s’est envolé dans ta direction. Tu l’as attrapé avec une agilité incroyable. Puis tu m’as fait un sourire, vraiment flippant, et tu lui as tordu le cou.
Elena en avait la chair de poule.
— Mais c’est horrible ! S’écria-t-elle.
— C’est aussi mon avis. Je me demande si ça veut dire quelque chose. Les corbeaux sont des oiseaux de mauvais augure. On dit qu’ils annoncent la mort…
— Faut peut-être pas pousser, feignit de s’indigner Elena. Ce corbeau dans ma chambre t’a foutu la frousse, et tu en as rêvé, c’est tout !
— Sauf que j’ai fait ce rêve avant que tu réveilles tout le monde avec tes hurlements…
À midi, un autre message violet se détachait sur le panneau d’affichage. Pour une fois, il ne citait pas son journal :
Jette un coup d’œil aux petites annonces.
— Quelles petites annonces ? s’étonna Bonnie.
À ce moment, Meredith les rejoignit, brandissant le dernier exemplaire de Wildcat Weekly, l’hebdomadaire du lycée.
— Vous avez vu ça ? demanda-t-elle, tout excitée. Elle leur montra un texte sans signature ni destinataire.
— Je ne supporte pas l’idée de le perdre mais s’il n’a pas assez confiance en moi pour me parler de ses problèmes, je ne vois pas comment ça peut marcher entre nous.
Elena était folle de rage. Elle avait des envies de meurtre envers le salaud qui s’amusait à la tourmenter. Elle s’imaginait déjà en train de lui tirer violemment les cheveux en arrière pour lui planter ses dents vengeresses dans le cou. Tout au plaisir de cette horrible et délicieuse vision, elle en oublia ses amies, qui la dévisageaient avec stupeur.
— Qu’est-ce qu’il y a ? demanda-t-elle, troublée.
— Tu pourrais écouter ce qu’on te raconte, s’exaspéra Bonnie, je disais donc que, d’après moi, ce n’est pas le genre de Da… , enfin de l’assassin d’agir comme ça. C’est trop mesquin.
— Pour une fois, je crois que tu as raison, approuva Meredith. Ça m’a tout l’air d’un règlement de compte. C’est quelqu’un qui a visiblement une dent contre toi et qui est prêt à toutes Ses vacheries pour te nuire.
— C’est forcément un élève du lycée, conclut On est obligé de remplir on formulaire en salle de journalisme pour faire passer une annonce.
— Et cette personne doit savoir que j’écris un journal intime, ajouta Bonnie. Elle était sûrement en cours arec toi un jour où tu l’as sorti. Par exemple, quand Tanner a failli te choper.
— C’est d’ailleurs ce qu’a fait la prof de maths, dit Elena. Elle a même lu un passage à voix haute. Et ça concernait Stefan, en plus… On sortait ensemble depuis peu. Mais… j’y pense Bonnie. Le soir du vol, combien de temps vous êtes-vous absentés du salon ?
— Juste quelques minutes. Je n’entendais plus mon chien aboyer. On est allées voir dans le jardin, et c’est la qu’on l’a découvert… acheva tristement Bonnie.
— Alors, ça veut dire que le voleur est déjà venu chez toi Bonnie ! s’exclama Meredith. Sinon, comment expliquer qu’il a pu si rapidement s’emparer du journal et disparaître. Il connaissait les lieux, c’est évident ! Donc, si on résume le voleur connaît la maison de Bonnie, a au moins un cour en commun avec toi, du genre mesquin, et t’en veut au point de… Oh, Je sais !
Les trois amies se regardèrent : la réponse leur vint en même temps.
— Mais oui, murmura Bonnie. C’est obligé !
— On est vraiment trop bêtes ! ajouta Meredith. Ça fait longtemps qu’on aurait dû deviner. La rage d’Elena s’était changée en fureur.
— Caroline, souffla-t-elle entre ses dents.
Une envie incontrôlable d’aller étrangler la coupable la saisit Elle partait de ce pas la punir ! Meredith la retint par le bras.
— Attends la fin des cours. On s’expliquera avec elle dans un endroit tranquille. Tu peux tenir jusque-là, quand même !
Sur le chemin de la cafétéria, Elena aperçut la présumée voleuse disparaître en direction des salles de travaux. Elle se rappela alors ce que Stefan lui avait dit en début d’année, Caroline l’avait souvent emmené au labo photo à l’heure de déjeuner.
— Allez-y, déclara-t-elle à Bonnie et Meredith qui venaient de prendre leur plateau. Je vous rejoins.
El le ne leur laissa pas le temps de protester et se lança à la poursuite de Caroline. La porte du labo photo n’était pas fermée à clé, bien que plongée dans l’obscurité. Elle tourna tout doucement la poignée et se glissa à l’intérieur sur la pointe des pieds. Qu’est-ce que Caroline pouvait bien faire dans le noir ? Encore fallait-il qu’elle soit là…
Au premier coup d’œil, la salie était déserte. Mais, en tendant l’oreille, Elena perçut un murmure provenant d’une porte entrebâillée qui donnait sur la chambre noire. Elle s’approcha à pas de loup et entendit distinctement une voix. Celle de Caroline.
— Comment peux-tu être sûr quelle sera choisie ? Une voix masculine lui répondit :
— Mon père fait partie du conseil d’administration du lycée. Je m’arrangerai pour que ce soit elle.
Elena ne mit pas beaucoup de temps à reconnaître l’interlocuteur de Caroline : Tyler Smallwood. Son père, un avocat renommé, était membre d’une quantité de comités.
— Et puis, de toute façon, qui veux-tu que ce soit d’autre ? continua-t-il. L’élève qui doit représenter Fell’s Church est censée être belle et intelligente.
— Et moi, ce n’est pas ce que je suis, peut-être ?
— Écoute, si tu tiens absolument à être choisie défiler à côté du maire à la commémoration du lycée OK. Mais alors, tu n’auras pas le plaisir de voir Stefan trahi par le journal de sa copine et chassé de la ville…
— Je n’ai pas la patience d’attendre jusque-là.
— Mais tu ne comprends pas ! répliqua Tyler avec un soupir impatient. Ça gâchera par la même occasion cette fête ridicule. Les Fell’s sont des usurpateurs. Ils n’ont pas le droit à tous ces honneurs. Ce sont les Smallwood les véritables fondateurs de la ville : ils étaient là les premiers.
— Je me fous de savoir qui a fondé Fell’s Church. Tout ce que je veux c’est qu’Elena soit humiliée devant tout je monde.
— Quant à Salvatore… , ajouta Tyler, les yeux brillants de haine, il risque de passer un sale quart d’heure quand tout le monde aura la preuve de sa culpabilité. D’ailleurs, tu es sûre que c’est écrit noir sur blanc dans le journal ?
La voix de Tyler était si vibrante de méchanceté qu’Elena en eut froid dans le dos.
— Mais oui ! Je te l’ai déjà expliqué vingt fois : elle a laissé son ruban le 2 septembre dans le cimetière. Stefan la trouvé le jour même. Or, le pont Wickery se trouve juste à côté. C’est donc la preuve formelle que Stefan rôdait dans les parages le 2 septembre, le jour où le vieux a été agressé. Et tout le monde sait déjà qu’il était la quand Vickie et Tanner ont été attaqués. C’est assez clair comme ça non ?
— Ça ne tiendra jamais la route devant un tribunal. Il faut que je rassemble des preuves plus convaincantes.
— Par exemple, demander à Mme Flowers à quelle heure il est rentré cette nuit-là.
— On s’en fout ! La plupart des gens le soupçonne déjà. Le journal parle d’un mystérieux secret : il ne leur faudra pas longtemps pour tirer leurs conclusions.
— Tu le gardes en lieu sûr, j’espère ?
— Non, non. Il traîne chez moi bien en évidence sur la table du salon… Tu me prends vraiment pour une débile, ou quoi ?
— En tout cas, tu l’es assez pour narguer Elena avec des messages à la con.
Ses paroles furent aussitôt suivies par le froissement d’un papier journal.
— Non mais, regarde-moi ça ! reprit Tyler. T’es tarée ou quoi ? Faut que tu arrêtes tout de suite ! Et si elle découvre que c’est toi, hein ?
— Et alors, qu’est-ce qu’elle peut me faire ? Me dénoncer aux flics ?
— Peu importe ! Tu dois m’écouter et attendre patiemment jusqu’à la commémoration. Tu verras la tête qu’elle va faire… Exit la pétasse…
— Et exit Stefan Salvatore. Au fait, qu’est-ce que tu crois qu’ils vont lui faire ? Pas trop de mal, quand même ?
— T’occupe pas de ça. Mes potes et moi, on s’en charge. Contente-toi de jouer ton rôle.
— Oui, mais… il faut me donner une petite avance minauda Caroline.
Il y eut un silence, puis des rires étouffés et un soupir. Elena en profita pour s’éclipser le plus discrètement possible.
Elle gagna son casier et s’y adossa, le cerveau en ébullition. Son ex-meilleure amie voulait que tout le lycée la méprise ! Et elle avait sous estimé le danger que Tyler représentait pour Stefan… C’était loin d’être un pauvre con. Le pire c’est qu’il se servait de son propre journal comme arme contre Stefan ! Elle comprit soudain la signification de son dernier rêve. L’air furieux et accusateur, il avait jeté un livre bleu à ses pieds, avant de partir. Ce qu’elle avait pris pour un bouquin était en fait son journal intime ! Et celui-ci pouvais effectivement accuser Stefan : il détenait la preuve que son petit ami se trouvai sur le lieu des trois agressions… Ça suffisait pour faire de lui le coupable idéal y comprit aux yeux de la police.
Et impossible de leur dire la vérité. On la prendrait pour une folle ! Et s’entendait déjà : « Vous faîtes fausse route, commissaire. Ce n’est pas Stefan l’assassin, mais son frère Damon, qui lui en voulais à mort. Il commet les pires agressions partout où Stefan passe pour faire croire que c’est lui le coupable. Tout ça en espérant le rendre fou et se cache quelque part dans les parages. Peut-être dans te cimetière abandonné on dans la forêt. Mais il est plus probable qu’il se balade sous la forme d’un corbeau… Et au fait, un dernier petit détail : c’est un vampire ! »
Évidemment personne ne voudrait croire un seul mot de cette histoire. Pourtant la petite entaille douloureuse à son cou était la pour lui rappeler que c’était la pur vérité, D’ailleurs, elle se sentait bizarre depuis le matin, un peu fébrile. La tension nerveuse et le manque de sommeil n’arrangeaient rien à son état. Elle avait même des vertiges. On aurait dit les symptômes de la grippe… sauf que ce n’était pas un virus, elle en était sûre. Ce salaud de Damon y était évidemment pour quelque chose.
En revanche, elle ne pouvait plus l’accuser du vol de son journal Elle ne devait s’en prendre qu’à elle-même, cette fois. Si seulement elle n’avait pas écrit tous ces trucs sur Stefan ! Si seulement elle n’avait pas apporté son journal au lycée ! Si seulement elle ne l’avait pas laissé traîné chez Bonnie ! Si seulement, si seulement…
Mais à quoi bon se lamenter ? Pour l’instant, tout ce qui comptait, c’était récupérer son journal.