Holden tendit les mains vers Naomi. Il lutta pour s’orienter alors que tous deux tournoyaient sans rien pour prendre appui ou stopper leur vol. Ils étaient en plein milieu de la pièce, sans aucun recoin pour s’abriter.
L’explosion avait propulsé Kelly à cinq mètres, et il avait heurté une caisse d’emballage. Il flottait maintenant là-bas, une de ses bottes magnétiques collée au flanc du conteneur, l’autre s’agitant pour toucher le pont. Amos avait été plaqué au sol et y demeurait immobile. Une de ses jambes était pliée selon un angle impossible. Alex s’était accroupi à côté de lui.
Holden tourna la tête en direction des assaillants. Celui armé du lance-grenades qui avait touché Kelly braquait son arme sur eux pour le coup de grâce. Nous sommes morts, se dit-il. Naomi adressa un geste obscène au tireur.
La silhouette de celui-ci parut frissonner avant de disparaître dans un geyser de sang accompagné de petites détonations.
— À la corvette ! cria Gomez dans la radio.
Sa voix était discordante, trop aiguë, autant à cause de la douleur que de l’extase du combat.
Holden tira sur le filin de raccordement dont l’extrémité saillait de la combinaison de Naomi.
— Qu’est-ce que vous…, commença-t-elle.
— Faites-moi confiance.
Calant les pieds contre l’estomac de la jeune femme, il donna une poussée énergique. Il heurta le pont tandis qu’elle s’élevait en tournant sur elle-même vers le plafond. Il enclencha ses semelles magnétiques et pesa sur le filin pour la faire redescendre vers lui.
Les tirs continus d’armes automatiques emplissaient le hangar d’éclairs.
— Restez courbée, dit-il, puis il courut vers Alex et Amos aussi vite que ses semelles magnétiques le lui permettaient.
Le mécanicien remuait faiblement les membres, il était donc toujours vivant. Holden se rendit compte qu’il tenait toujours le filin de Naomi. Il l’accrocha à une boucle de sa combinaison. Plus question d’être séparés.
Il souleva Amos du pont. Le mécano grogna et bredouilla une obscénité quelconque. Holden relia également le filin d’Amos à sa combinaison. Il porterait tout l’équipage s’il le fallait. Sans un mot, Alex accrocha son filin à Holden et lui fit signe qu’il allait bien.
— C’était… Je veux dire, quelle merde…
— Ouais, fit Holden.
— Jim, dit Naomi. Regardez !
Il tourna la tête dans la direction qu’elle indiquait. Kelly s’avançait vers eux en vacillant. Sa combinaison renforcée était visiblement enfoncée sur le côté gauche du torse, et du fluide hydraulique s’en écoulait dans une succession de gouttelettes qui flottaient derrière lui, mais il se déplaçait. En direction de la frégate.
— Bon, on y va, dit Holden.
Tous les cinq se dirigèrent en un groupe compact vers le vaisseau, tandis qu’autour d’eux flottaient des débris de caisses d’emballage pulvérisées par la fusillade toujours aussi intense. Une guêpe piqua Holden au bras, et l’affichage de visière de son casque l’informa que le système automatique de sa combinaison avait refermé une brèche mineure. Il sentit quelque chose de chaud couler le long de son biceps.
Gomez hurla comme un dément dans la radio quand il fit irruption dans le hangar en tirant derrière lui. La riposte de l’ennemi ne faiblit pas. Holden vit le Marine touché encore et encore, et les petites explosions et les nuages jaillissant de sa combinaison faisaient douter qu’elle contienne encore quelqu’un de vivant. Mais Gomez concentrait l’attention de l’ennemi, et tous les autres purent se hisser jusqu’au sas de la corvette.
Kelly sortit une petite carte métallique d’une de ses poches. Elle ouvrit l’écoutille extérieure, et Holden poussa le corps en suspension d’Amos à l’intérieur. Naomi, Alex et le marine blessé suivirent, en échangeant des regards incrédules et choqués pendant que le sas entamait son cycle et que l’écoutille intérieure se déverrouillait.
— Je n’arrive pas à croire que nous…, dit Alex, mais il laissa sa phrase en suspens.
— On en parlera plus tard ! aboya Kelly. Alex Kamal, vous avez servi sur des unités de la Flotte de la République martienne. Vous pourrez piloter cet engin ?
— Bien sûr, répondit Alex, qui se reprit manifestement. Pourquoi moi ?
— Notre autre pilote est dehors, en train de se faire tuer, répliqua le lieutenant en lui tendant la carte métallique. Prenez ça. Les autres, sanglez-vous. Nous avons déjà perdu trop de temps.
Vus de près, les dégâts subis par la combinaison renforcée de Kelly étaient encore plus apparents. Il devait souffrir de plusieurs blessures graves au torse. Et tout le liquide qui s’écoulait de sa tenue n’était pas du fluide hydraulique. Il s’y mêlait du sang, c’était indéniable.
— Laissez-moi vous aider, proposa Holden en esquissant un geste vers lui.
— Ne me touchez pas, répliqua Kelly, avec une colère surprenante. Vous vous sanglez à votre place, et vous la fermez. Exécution.
Holden ne chercha pas à discuter. Il décrocha les filins de raccordement de sa combinaison et aida Naomi à placer Amos dans un siège anti-crash et à l’y harnacher. Kelly resta sur le pont supérieur, mais sa voix leur parvint par le système comm du vaisseau.
— Monsieur Kamal, prêts à décoller ?
— Affirmatif, lieutenant. Le réacteur était déjà chaud quand nous sommes arrivés.
— Le Tachi était le vaisseau d’urgence. C’est pourquoi nous le prenons. Allons-y. Dès que nous aurons quitté le hangar, poussée maximale.
— Compris, dit le pilote.
La pesanteur revint par petites touches et selon des directions aléatoires quand Alex fit décoller le vaisseau du pont et l’orienta vers la sortie du hangar. Holden termina de boucler son harnais et vérifia que Naomi et Amos étaient bien attachés. Le mécano geignait et crispait les mains sur les accoudoirs de son siège avec l’énergie du désespoir.
— Toujours avec nous, Amos ?
— Bordel, c’est le pied, chef.
— Oh, merde, j’aperçois Gomez, s’exclama Alex dans le système comm. Il est au sol. Ah, espèces d’enfoirés ! Ils lui tirent dessus alors qu’il est à terre ! Les fils de pute !
La corvette s’immobilisa, et Alex dit d’une voix calme :
— Mangez-moi ça, fumiers.
Toute la structure du vaisseau vibra pendant une demi-seconde, puis il repartit en direction de la sortie.
— Canons de défense rapprochée ? demanda Holden.
— Justice sommaire au débotté, répondit le pilote dans un grognement.
Holden en était encore à imaginer ce que plusieurs centaines de projectiles au tungstène avec enveloppe de Teflon pouvaient occasionner comme dommages à des corps humains lorsque Alex mit les gaz et qu’un troupeau d’éléphants effectua un saut de l’ange pour atterrir sur sa poitrine.
Il reprit connaissance à 0 g. L’arrière de ses globes oculaires et ses testicules étaient douloureux, ce qui signifiait qu’ils avaient volé sous haute poussée pendant un certain temps. Le terminal sur la cloison voisine lui apprit que presque une demi-heure s’était écoulée. Naomi remuait dans son siège, mais Amos était inconscient et du sang s’écoulait selon un débit inquiétant d’un trou dans sa combinaison.
— Naomi, occupez-vous d’Amos, dit Holden dans une sorte de croassement qui enflamma sa gorge. Alex, au rapport.
— Le Donnie a explosé derrière nous, chef. Je crois bien que les Marines n’ont pas tenu le coup. Le vaisseau a disparu, fit Alex à mi-voix.
— Et les six appareils qui attaquaient ?
— Aucun signe d’eux depuis l’explosion. À mon avis, ils ont grillé.
Justice sommaire au débotté, en effet. Tenter l’abordage d’un vaisseau était une des manœuvres les plus risquées. À la base, c’était une course de vitesse entre les assaillants pour atteindre la salle des machines et la volonté collective de ceux qui avaient le doigt sur le bouton d’autodestruction. Après un seul regard au commandant Yao, Holden aurait pu dire aux intrus qu’ils avaient perdu d’avance.
Il n’en restait pas moins que quelqu’un avait estimé que cette opération valait qu’on prenne de tels risques.
Holden détacha ses sangles et flotta jusqu’à Amos. Naomi avait ouvert un kit médical d’urgence et découpait la combinaison du mécanicien à l’aide d’une grosse paire de ciseaux. La déchirure avait été créée par une extrémité du tibia brisé d’Amos quand la combinaison avait été plaquée contre lui à douze g.
Quand elle eut fini de dégager la plaie, Naomi blêmit devant la masse de sang et de chairs qu’était devenu le bas de la jambe.
— Qu’est-ce que nous faisons ? s’enquit Holden.
Elle le regarda fixement une seconde, et éclata d’un rire aigre.
— Je n’en ai aucune idée, répondit-elle.
— Mais vous…
— S’il était fait de métal, je martèlerais les pièces défectueuses pour leur redonner leur forme d’origine et je souderai le tout pour que ça tienne.
— Je…
— Mais il n’est pas fait avec des composants de ce vaisseau, continua-t-elle d’une voix qui grimpait dans les aigus, alors pourquoi me demander ce qu’il faut faire ?
Holden leva les deux mains en un geste d’apaisement.
— Ça va, j’ai compris. Pour l’instant, essayons simplement de stopper le saignement, d’accord ?
— Et si Alex se fait tuer, c’est aussi à moi que vous allez demander de piloter cet appareil ?
Il faillit répondre, se reprit à temps. Elle avait raison. Chaque fois qu’il ne savait pas comment faire, il lui confiait le problème à résoudre. Il agissait ainsi depuis des années. Elle était intelligente, compétente, et en règle générale imperturbable. Elle était devenue une béquille, alors qu’elle avait encaissé les mêmes traumatismes que lui. S’il ne se maîtrisait pas, il finirait par la briser, et il n’avait vraiment pas besoin de ça.
— Vous avez raison, dit-il. Je vais prendre soin d’Amos. Montez et allez voir comment va Kelly. Je vous rejoins dans quelques minutes.
Elle ne le quitta pas des yeux jusqu’à ce qu’elle ait retrouvé une respiration normale, puis elle acquiesça et se dirigea vers l’échelle.
Il aspergea la jambe d’Amos avec un coagulant et l’enveloppa dans de la gaze prise dans le kit de premiers secours. Ensuite il brancha le terminal mural sur la base de données du vaisseau et effectua une recherche concernant les fractures multiples. Il lisait ces informations avec un sentiment de désarroi croissant quand Naomi l’appela.
— Kelly est mort, annonça-t-elle d’un ton morne.
Le ventre d’Holden se noua, et il s’accorda le temps de trois respirations pour refouler de sa voix tout accent de panique.
— Compris. J’aurai besoin de votre aide pour replacer correctement cet os. Revenez en bas. Alex ? Donnez-nous une poussée d’un demi-g pendant que nous travaillons sur Amos.
— Une direction en particulier, chef ?
— Peu importe. Donnez-nous une poussée d’un demi-g et ne touchez pas à la radio tant que je ne vous dis pas de le faire.
Naomi redescendit par le puits de l’échelle tandis que la gravité commençait à revenir.
— Il semble que toutes les côtes du côté gauche ont été brisées chez Kelly, dit-elle. Avec la poussée, elles ont probablement perforé tous ses organes.
— Il devait savoir que ça allait se produire, remarqua Holden.
— Sûrement, oui.
Il était facile de se moquer des Marines quand ils n’étaient pas là pour entendre. À l’époque où Holden servait dans la Flotte, railler les crânes rasés était aussi naturel que jurer. Mais quatre Marines étaient morts pour qu’ils puissent quitter le Donnager, et trois d’entre eux avaient pris cette décision en toute conscience. Il se fit la promesse de ne plus jamais plaisanter à leur propos.
— Il faut que nous remettions l’os bien droit avant de le fixer. Tenez-le, qu’il ne bouge pas, et je vais tirer sur son pied. Dites-moi quand l’autre se sera rétracté et que les deux morceaux seront de nouveau alignés.
Naomi voulut protester.
— Je sais que vous n’êtes pas toubib, l’interrompit-il. Mais on n’a pas mieux.
Ce fut un des moments les plus horribles qu’il ait connus. Amos reprit conscience et hurla pendant l’opération. Holden dut tirer sur la jambe à deux reprises, parce que la première fois les deux parties de l’os ne s’alignèrent pas, et quand il lâcha prise l’extrémité déchiquetée du tibia jaillit hors de la plaie dans un flot de sang. Par chance le mécano s’évanouit aussitôt après et ils purent faire leur deuxième tentative sans devoir l’entendre crier. Ils eurent plus de succès. Holden arrosa la blessure d’antiseptiques et de coagulants. Il referma la plaie avec des agrafes, l’entoura d’un bandage imbibé de stimulants pour la repousse des tissus, et paracheva le tout avec un plâtre aéré à prise rapide et un patch antibiotique sur la cuisse du mécanicien.
Ensuite il s’effondra sur le pont et se laissa aller aux tremblements qu’il avait contenus jusque-là. Naomi se réfugia dans son siège anti-crash pour sangloter. C’était la première fois qu’il la voyait pleurer.
Holden, Alex et Naomi flottaient en formant un triangle approximatif autour du siège où reposait le corps du lieutenant Kelly. En bas, Amos était plongé dans le sommeil de plomb que lui assuraient les sédatifs. Le Tachi dérivait dans l’espace sans aucune destination particulière. Pour la première fois depuis bien longtemps, personne ne les suivait.
Holden savait que les deux autres attendaient d’apprendre comment il comptait les sauver tous. Ils le couvaient de regards impatients. Il s’efforçait de paraître calme et en pleine réflexion. Intérieurement, il paniquait. Il n’avait pas la plus petite idée de la destination à prendre, ni de ce qu’il convenait de faire. Depuis qu’ils avaient découvert le Scopuli, tous les endroits où ils auraient dû se trouver en sécurité s’étaient révélés des pièges mortels. Le Canterbury. Le Donnager. Holden était terrifié à la seule idée d’aller quelque part, par peur que ce quelque part soit anéanti très peu de temps après leur arrivée.
Faites quelque chose, avait dit un formateur à ses jeunes officiers une dizaine d’années plus tôt. Il n’y a pas besoin que ce soit la bonne chose, il suffit que ce soit quelque chose.
— Ils vont enquêter sur ce qui est arrivé au Donnager, dit-il. Des unités martiennes ont mis le cap sur ce coin alors même que nous parlons. Ils doivent déjà savoir que le Tachi s’en est sorti, puisque notre transpondeur annonce notre survie à tout le système solaire.
— Sûrement pas, dit Alex.
— Vous pouvez m’expliquer pourquoi, monsieur Kamal ?
— Nous sommes à bord d’une corvette qui est aussi un torpilleur. Vous croyez que son équipage veut un gentil signal de transpondeur qui permettrait de les localiser alors qu’ils s’apprêtent à attaquer l’ennemi ? Non, Il y a une chouette touche dans le cockpit marquée “transpondeur éteint”. Je l’ai enfoncée juste avant que nous partions. Nous ne sommes plus qu’un corps indéfini en mouvement, comme un million d’autres.
Holden resta silencieux une poignée de secondes.
— Alex, il se pourrait que ce soit la plus grande chose qu’un être humain ait faite dans l’histoire de l’univers.
— Mais nous ne pouvons nous arrêter nulle part, Jim, dit Naomi. Un, aucun spatioport ne laissera approcher un vaisseau dont le transpondeur n’émet pas. Et deux, dès qu’ils nous auront en visuel il nous sera difficile de dissimuler que nous sommes à bord d’un appareil de guerre martien.
— Mouais, ça c’est le mauvais côté des choses, approuva Alex.
— Fred Johnson nous a communiqué les coordonnées du réseau pour entrer en contact avec lui, dit Holden. Je pense que l’APE pourrait être le seul groupe à nous permettre de poser quelque part notre vaisseau martien volé.
— Il n’est pas volé, rétorqua Alex. C’est désormais une récupération légitime.
— Ouais, sortez donc cet argument à la Flotte de la République martienne s’ils nous capturent, mais faisons quand même tout notre possible pour que ça ne se produise pas.
— Alors nous attendons simplement ici que le colonel Johnson reprenne contact avec nous ? interrogea Alex.
— Non, moi j’attends. Vous deux, vous préparez les funérailles du lieutenant Kelly. Alex, vous avez servi dans la Flotte martienne, vous connaissez ses traditions. Faites-le avec tous les honneurs dus, et inscrivez la cérémonie dans le journal de bord. Il est mort pour nous permettre de sauver notre peau, et nous allons lui accorder tout le respect auquel il a droit. Dès que nous nous serons posés, nous transmettrons tout le dossier au commandement de la Flotte martienne pour qu’ils puissent officialiser son décès.
— Nous allons faire les choses comme il faut, monsieur, affirma Alex.
Fred Johnson répondit à son message si rapidement qu’Holden se demanda s’il n’était pas assis devant son terminal, à le guetter. Le message se limitait à des coordonnées et à l’expression faisceau de ciblage. Holden braqua donc le système laser sur l’endroit désigné – le même depuis lequel le colonel avait envoyé son premier message –, puis il alluma son micro et dit :
— Fred ?
Les coordonnées étaient distantes de plus de onze minutes-lumière. Holden s’attendit donc à patienter vingt-deux minutes. Pour s’occuper, il transmit la localisation au cockpit et demanda à Alex de mettre le cap dans cette direction à un g dès qu’ils en auraient fini avec le lieutenant Kelly.
Vingt minutes plus tard, la poussée débuta et Naomi gravit l’échelle. Elle avait ôté sa combinaison pressurisée et portait une tenue de vol martienne rouge qui était trop courte pour elle de vingt bons centimètres et trois fois trop large à la taille. Elle semblait s’être lavé les cheveux et le visage.
— Il y a une douche à la proue de ce vaisseau, fit-elle. Nous pouvons le garder ?
— Comment ça s’est passé ?
— Nous avons pris soin de lui. Il y a une cale de bonnes dimensions située sous la chambre des machines. Nous l’avons placé là en attendant de pouvoir le renvoyer aux siens. J’ai coupé les paramètres environnementaux là-bas, donc sa dépouille sera bien conservée.
Elle tendit la main et laissa tomber un petit cube noir sur les cuisses d’Holden.
— C’était dans une de ses poches, sous sa combinaison renforcée.
Il prit l’objet. Cela ressemblait à une sorte d’unité de stockage de données.
— Vous pouvez trouver ce qu’il contient ? demanda-t-il.
— Bien sûr. Laissez-moi juste un peu de temps.
— Et Amos ?
— Tension artérielle stable, dit-elle. C’est certainement bon signe.
La console comm laissa échapper un bip, et Holden enclencha l’enregistrement.
— Jim, les nouvelles concernant le Donnager viennent d’atteindre le réseau. Je dois admettre que je suis extrêmement surpris d’avoir de vos nouvelles, dit la voix de Fred. Que puis-je faire pour vous ?
Holden mit un temps pour préparer sa réponse. La suspicion de Fred était manifeste, mais il avait envoyé à Holden un mot de passe pour cette raison précise.
— Fred. Tandis que nos ennemis sont devenus omniprésents, la liste de nos amis s’est écourtée. En fait, nous sommes à peu près seuls. Je suis dans un vaisseau volé…
Alex se racla bruyamment la gorge.
— Dans une canonnière de la Flotte martienne que nous avons récupérée, corrigea Holden. J’ai besoin d’un moyen pour cacher ce fait, et d’une destination où ils ne m’abattront pas dès que je montrerai le bout de mon nez. Aidez-moi à trouver cet endroit.
Une demi-heure s’écoula avant la réponse :
— Je vous joins un fichier sur un sous-canal. Il contient le code de votre nouveau transpondeur et les indications pour l’installer. Le code s’adaptera dans tous les registres. Il est parfaitement valide. Le fichier contient également les coordonnées qui vous mèneront dans un endroit sûr. Je vous y rencontrerai. Nous avons beaucoup à nous dire.
— Le code d’un nouveau transpondeur ? dit Naomi. Comment l’APE se procure-t-elle les codes de nouveaux transpondeurs ?
— Ils craquent les protocoles de sécurité de la coalition Terre-Mars, ou bien ils ont une taupe au service des enregistrements, supposa Holden. Quoi qu’il en soit, je crois que nous jouons dans la cour des grands, désormais.