Lorsque mon cœur sera

Paroles: Bernard Dimey. Musique: Charles Aznavour 1968 "Charles Aznavour chante Dimey"

Lorsque mon coeur sera comme un vieux fruit d'automne

Et que mes ossements s'en iront à vau-l'eau

Peut-être direz-vous que la récolte est bonne

Les vers pendant ce temps glisseront sous ma peau

Les yeux noirs que j'aurai seront d'un noir de tombe

Et je ne pourrai plus sourire que des dents

Vous aurez tout loisir d'aller faire la bombe

Quel que soit votre jeu moi je serai perdant

Je serai comme un tronc que la rivière emporte

Vers on ne sait quel trou où rien ne vous attend

Sans doute aurez-vous mis les scellés sur ma porte

Moi, je m'en foutrai bien? j'aurai fini mon temps

Je n'aurai rien à dire et plus rien à défendre

Je serai comme un roi dans un palais désert

Ayant tout désappris y compris d'être tendre

Oublié le mensonge et comment on s'en sert

Allongé je serai comme un vieux saint de pierre

Les vieux copains viendront s'agenouiller sur moi

Ma maison dormira étouffée sous le lierre

Après deux ou trois ans il en restera quoi?

Il n'en restera rien qu'un peu de phrases mortes

Que j'aurai par hasard prononcées devant vous

La vie fait son métier mais la mort est plus forte

Et qu'on le veuille ou non on vient au rendez-vous

Lorsque je n'aurai plus de cerveau dans la tête

De langue dans la bouche et cela pour toujours

Peut-être serez-vous tous ensemble à la fête

En train de fredonner quelques chansons d'amour

Quelques gentils refrains jaillis de ma jeunesse

Souvent enjolivés d'un air d'accordéon

Vous en serez à l'âge où tout cela vous blesse

Il faut aimer le mal que nous font les chansons

Lorsque je dormirai quelque part bien tranquille

Au fond d'un trou creusé par un bonhomme idiot

Qui s'en ira plus tard fredonner par la ville

Une chanson de moi glanée à la radio

Lorsque j'en serai là, j'aimerai tout le monde

Et tout le monde alors dira du bien de moi

Comme on sait que jamais les morts ne vous répondent

A mon sujet, chacun dira n'importe quoi

Que je fus le plus beau des poètes à la manque

Sans que ni Dieu ni Diable n'en fussent avisés

Que j'eus tout dans la vie, à part un compte en banque

Que je tirais fort bien sans savoir que viser

Lorsque mon coeur sera comme une vieille éponge

Vous pourrez tous ensemble évoquer qui je fus

J'en rigole d'avance aujourd'hui quand j'y songe

Car aucun d'entre vous, ne l'aura jamais su.

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