De l’Avare et du Passant.

Un Avare enfouit son trésor dans un champ; mais il ne put le faire si secrètement qu’un Voisin ne s’en aperçût. Le premier retiré, l’autre accourt, déterre l’or et l’emporte. Le lendemain l’Avare revient rendre visite à son trésor. Quelle fut sa douleur lorsqu’il n’en trouva que le gîte! Un dieu même ne l’exprimerait pas. Le voilà qui crie, pleure, s’arrache les cheveux, en un mot se désespère. À ses cris, un Passant accourt. – Qu’avez-vous perdu, lui dit celui-ci, pour vous désoler de la sorte? – Ce qui m’était mille fois plus cher que la vie, s’écria l’Avare: mon trésor que j’avais enterré près de cette pierre. – Sans vous donner la peine de le porter si loin, reprit l’autre, que ne le gardiez-vous chez vous: vous auriez pu en tirer à toute heure, et plus commodément l’or dont vous auriez eu besoin. – En tirer mon or! s’écria l’Avare: ô ciel! je n’étais pas si fou. Hélas! je n’y touchais jamais. – Si vous n’y touchiez point, répliqua le Passant, pourquoi vous tant affliger? Eh, mon ami, mettez une pierre à la place du trésor, elle vous y servira tout autant. -

Загрузка...