Histoire de faussaires

Paroles et Musique: Georges Brassens 1976

Se découpant sur champ d'azur

La ferme était fausse bien sûr,

Et le chaume servant de toit

Synthétique comme il se doit.

Au bout d'une allée de faux buis,

On apercevait un faux puits

Du fond duquel la vérité

N'avait jamais dû remonter.

Et la maîtresse de céans

Dans un habit, ma foi, seyant

De fermière de comédie

A ma rencontre descendit,

Et mon petit bouquet, soudain,

Parut terne dans ce jardin

Près des massifs de fausses fleurs

Offrant les plus vives couleurs.

Ayant foulé le faux gazon,

Je la suivis dans la maison

Où brillait sans se consumer

Un genre de feu sans fumée.

Face au faux buffet Henri deux,

Alignés sur les rayons de

La bibliothèque en faux bois,

Faux bouquins achetés au poids.

Faux Aubusson, fausses armures,

Faux tableaux de maîtres au mur,

Fausses perles et faux bijoux

Faux grains de beauté sur les joues,

Faux ongles au bout des menottes,

Piano jouant des fausses notes

Avec des touches ne devant

Pas leur ivoire aux éléphants.

Aux lueurs des fausses chandelles

Enlevant ses fausses dentelles,

Elle a dit, mais ce n'était pas

Sûr, tu es mon premier faux pas.

Fausse vierge, fausse pudeur,

Fausse fièvre, simulateurs,

Ces anges artificiels

Venus d'un faux septième ciel.

La seule chose un peu sincère

Dans cette histoire de faussaire

Et contre laquelle il ne faut

Peut-être pas s'inscrire en faux,

C'est mon penchant pour elle et mon

Gros point du côté du poumon

Quand amoureuse elle tomba

D'un vrai marquis de Carabas.

En l'occurrence Cupidon

Se conduisit en faux-jeton,

En véritable faux témoin,

Et Vénus aussi, néanmoins

Ce serait sans doute mentir

Par omission de ne pas dire

Que je leur dois quand même une heure

Authentique de vrai bonheur.

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