Le blason

Paroles et Musique: Georges Brassens 1972

Ayant avecques lui toujours fait bon ménage

J'eusse aimé célébrer sans être inconvenant

Tendre corps féminin ton plus bel apanage

Que tous ceux qui l'ont vu disent hallucinant.

Ceût été mon ultime chant mon chant du cygne

Mon dernier billet doux mon message d'adieu

Or malheureusement les mots qui le désignent

Le disputent à l'exécrable à l'odieux.

C'est la grande pitié de la langue française

C'est son talon d'Achille et c'est son déshonneur

De n'offrir que des mots entachés de bassesse

A cette incomparable instrument de bonheur.

Alors que tant de fleurs ont des noms poétiques

Tendre corps féminin' c'est fort malencontreux

Que la fleur la plus douce la plus érotique

Et la plus enivrante en ait de plus scabreux.

Mais le pire de tous est un petit vocable

De trois lettres pas plus familier coutumier

Il est inexplicable il est irrévocable

Honte à celui-là qui l'employa le premier

Honte à celui-là qui par dépit par gageure

Dota de même terme en son fiel venimeux

Ce grand ami de l'homme et la cinglante injure

Celui-là c'est probable en était un fameux.

Misogyne à coup sûr asexué sans doute

Au charmes de Vénus absolument rétif

Etait ce bougre qui toute honte bue toute

Fit ce rapprochement d'ailleurs intempestif.

La malpeste soit de cette homonymie

C'est injuste madame et c'est désobligeant

Que ce morceau de roi de votre anatomie

Porte le même nom qu'une foule de gens.

Fasse le ciel qu'un jour, dans un trait de génie

Un poète inspiré que Pégase soutient

Donne en effaçant d'un coup des siècles d'avanie

A cette vraie merveille un joli nom chrétien

En attendant madame il semblerait dommage

Et vos adorateurs en seraient tous peinés

D'aller perdre de vue que pour lui rendre hommage

Il est d'autre moyen et que je les connais

Et que je les connais.

Загрузка...