LA PAIX DES MÉNAGES L’HAPPE DÉMÉNAGE

Et or donc car mais, à la réception, qui trouvé-je ? Je ne te le donne pas en mille, mais en un.

La femme de service noire de l’hôpital, tu sais, la petite grosse. Elle a troqué sa blouse professionnelle contre une robe imprimée dans les tons vigoureux. Ça représente des fleurs exotiques entremêlées de lianes aquatiques, avec, pour achever de faire joli, des petits poissons parsemés et un gros perroquet jaune et vert à l’avant-scène.

La chère fille boulotte (parce qu’elle boulotte) me semble être dans un certain état de surexcitation. Je lui dépêche par courrier spécial mon meilleur sourire.

— Eh bien, ma très charmante, lui dis-je avec enjouage, vous paraissez tout émue ?

Ce disant, l’alarme me vient à l’œil. « Seigneur, me dis-je, Sirella serait-elle décédée, et serait-ce cela que viendrait m’annoncer cette noire jouvencelle de chez Olida-Dakar.

— C’est mademoiselle Aïcha, dit-elle.

— Quoi, mademoiselle Aïcha ! m’écrié-je comme dans une pièce d’amateurs, afin de donner plus de prix à la réplique qui va suivre.

— Elle m’a appelée par la fenêtre, parce qu’on habite la même maison.

— Et alors ? poursuis-je, avec force, tel M. Salvador quand il interprète Zorro.

— Elle m’a crié que j’alle la voir. J’y suis été.

— Et aloooors ?

— Sa maman était très très malade et elle aussi, mais un peu moins.

— Et alooooooors ?

— J’ai demandé de l’aide. On a transporté la maman à l’hôpital et Aïcha est restée dans sa chambre. Elle m’a demandé de vous prévenir, et de vous dire comme ça qu’elle voudrait vous voir.

— Retournez auprès d’elle, mon petit bout de zan, et assurez-la que j’arrive. Quelle est son adresse ?

— C’est le grand immeuble neuf, derrière la palmeraie, au bout de l’avenue El Chan Zélizé, au quatrième, mamoiselle Aïcha Choukroût.

Son message étant délivré, la môme se retire presto.

Je regagne l’illustre table pour déposer mon modeste cul sur le siège qui lui fut proposé. Sa Branligotante Majesté continue de tortorer du bout des doigts, des lèvres, des gencives.

Je me confonds en excuses racées.

— Un message important, Votre Odorante Majesté. Et qui va me devoir faire quitter votre chiément fabuleuse table, avec votre augustissime permission dorée sur tranche, à bien entendu, saleur !

Le monarque déboulonné m’adresse un geste que, s’il était archevêque au lieu d’émir au chômedu, tu pourrais le prendre pour une bénédiction toutes catégories. Je baise sa main en peau de lézard, me prosterne seize fois en direction de La Mecque, douze en direction du mec, et mets les adjas.


Dans une grande salle à manger voisine, le gai trio, déchaîné, en est aux Matelassiers. Bérurier vocifère les couplets, tandis qu’Achille et leur égérie reprennent au refrain. Belle ambiance, que je ne saurais troubler. Aussi m’esbigné-je délicatement.


La femme de service noire est déjà sur place. C’est elle qui m’ouvre la porte. De grosses belles larmes brillantes coulent sur son visage sombre.

— Ça ne va pas ? m’inquiété-je.

— Elle a perdu connaissance. Je vais aller téléphoner à l’hôpital pour qu’on vienne la chercher aussi.

La fille pose sa chère dextre sur mon admirable avant-bras, dit bras d’honneur.

— Et moi ça me prend aussi depuis que je suis arrivée.

— Qu’est-ce qui vous prend, ma gazelle bleue ?

— Dans la tête, c’est « ouïe, ouïe », comme si on m’enfoncerait une grande fourchette dans le cerveau.

Je songe, in petto (car elle ne comprend pas l’italien, Dieu merci bien) qu’il faudrait que les dents de ladite fourchette fussent rudement fines et acérées pour arriver à se planter dans une chose aussi menue.

Mais le temps des gouailleries n’est point encore revenu. Nous vivons un drame, il convient de lui faire front.

— Où est Aïcha ?

— Dans la chambre.

— Et où est la chambre ?

— Dans le living.

— Allez respirer à l’air libre, mon enfant. Pourquoi ai-je décidé de la sorte ?

Parce que mon instinct ne se trompe jamais. Ou rarement, et en cas d’erreur j’ai le droit de faire appel à tous. San-Antonio, tel un cheval sauvage, se précipite dans le logis. Exigu, mais coquet. Il comporte une assez vaste pièce pourvue de deux renfoncements servant de chambre. Une salle d’eau, une entrée-kitchenette. L’essentiel.

La môme Aïcha gît sur une couche basse. Son souffle est encombré de râles. Elle a les yeux révulsés.

« Seigneur, me dis-je, car je m’interpelle volontiers dans les cas d’urgence, il y a quelque chose dans cet appartement qui y fout la mort. Dix secondes pour le découvrir ! »

Je pirouette sur un seul talon, admirable pivot autour duquel ma personne accomplit trois cent soixante degrés sans escale ni coup férir.

Vu ! C’est là, c’est beau, c’est énorme.

Je me précipite alors sur la gosse, la prends dans mes bras pieuvresques, me sauve sur le palier. Au bout du couloir : l’ascenseur. Je descends ma jolie Aïcha dans le hall où de magnifiques plantes grasses font semblant d’être fausses. Une banquette de rotin. Je l’y dépose. Son pouls est chamadeur à outrance. Des gens se la radinent, la petite femme de service en tête, qui dit qu’elle se sent mieux, preuve que son nez fonctionne. Elle a déjà rameuté l’hosto et une ambulance va se pointer.

Le gars mézigue, fils unique, aîné et préféré de Félicie, s’émoustille. Je remonte à l’appartement, en prenant grand soin, lorsque je m’y trouve, d’établir un courant d’air et de garder mon mouchoir devant mes voies respirantielles. J’explore, d’une main, le secteur de mort. En deux attentats trois mouvements de foule, j’ai trouvé. Bravo, San-Antonio !

Je sors dans la merveilleuse nuit marocaine, si richement cloutée d’étoiles, comme ça s’écrivait dans les books du dix-neuvième. L’air tiède sent le jasmin et les pieds, la fleur d’oranger aussi, un tantisoit.

Par quoi continué-je ?

Mentalement, je récapitule les multiples périphéries de la journée. T’as que l’embarras de voitures du choix, mecton. Tiens, si je m’offrais une mignonne virouze à l’hôtel El Chibr, pour dire ?


L’hôtel El Chibr, tu te rappelles ? Il figure sur les fafs de location de la voiture de mon vénérable tueur. Son nom, à cézigue ? Du moins son nom opérationnel, tu te le souviens ? Roumain. Flavius Tedseuquitu. Né en 1908 à Bucarest (Puy-de-Dôme). Domicilié à London, 120 Grattefor Street. Tout dans le citron, l’Antoine. Pine et mémoire d’éléphant, tels sont ses atouts majeurs pour affronter l’Asie Mineure.

Je débotte devant un établissement ultra-moderne qui s’inspire vaguement du style marocain, mais interprété dans le verre et le béton. Le concierge, derrière son bioutifoule comptoir en forme de rose des sables stylisée, paraît interpréter, lui, une féerie pour matinée de Noël, avec son uniforme bleu clouté d’or, son jabot jaune pâle, ses cheveux gris mousseux et sa tronche d’ancien boxeur arabe reconverti dans l’hostellerie.

Je lui réclame M. Tedseuquitu.

Il virgule un œil à son tableau de marche.

— Chambre 41, mais il n’est pas rentré, m’avertit-il (ou Néfertit-il, s’il est égyptien).

Là-dessus il laisse tomber son nez en forme de tubercule malmené sur de la paperasse.

Je fais mine d’attendre un peu, puis m’abstrais pour gagner le couloir des chambres, car cet hôtel est de plain-pied et décrit un double vé dans une palmeraie enrichie de rosiers et de jasmins.

Le 41 paraît n’attendre que mon sésame. Je l’ai échappé beau (je ne suis pas celle que vous croyez pour l’échapper « belle ») car, de plus en plus, dans les nouveaux complexes hôteliers, les lourdes s’ouvrent à l’aide de cartes magnétiques et tu peux toujours te carrer ton passe dans le fion.

Chambre gaie, d’un luxe limité au fonctionnel chatoyant. Mobilier design, réfrigérateur, télé, radio incorporée ; posters sublimes représentant le Sud marocain.

Je me dirige vers le dressinge, sorte de sas entre chambre et salle de bains. Et je me fige, ahuri.

Cela produit toujours un certain effet que de se trouver nez à nez avec soi-même.

Or, je suis là, grandeur nature, punaisé sur la paroi. La photo en pied a été prise devant le Mâ-Kâch, je reconnais l’écusson de mon palace, en fond flou. En fait, il y a deux images de moi : celle qui me représente de trois quarts et en pied, et une autre montrant seulement ma tête, mais considérablement agrandie. Grâce à la démesure, rien n’est perdu de l’harmonie de mon visage, non plus de l’intelligence qui en rayonne (ou en fibranne, au choix). Chose curieuse, je fixe l’objectif en plein dans les yeux, si j’ose dire. Or, je ne le voyais pas, ce qui prouve que le photographe clandestin usait d’astuces éprouvées.

— Oh ! c’est vous ! s’exclame une voix aussi féminine que britannique.

Je volte-face.

Pour découvrir une mignonne créature d’un mètre cinquante, blonde, avec le regard noir, vêtue d’une robe rouge fendue de côté comme une châtaigne au four. Elle est moins jeune que sa petite taille gracieuse ne le laisse supposer. Ma présence ne la déroute pas outre mesure. Elle me sourit d’un petit air fripon, tu vois ? Avec juste un côté de la bouche. J’ai dans l’idée que ce petit lutin, quand il se met à t’escalader les gréements, t’as plus envie de faire la Transat en solitaire. C’est de la petite guenuche d’amour, ça madame. De la salope mignonnette. Maquette de dévoreuse. Tu la juches sur ta biroute : t’en fais une girouette. Et qui tourne parfaitement, au gré de ton caprice : est-ouest, d’un léger coup de paluche aux noix, vzoummm ! valsez les miches ! Elle pas-de-visse en gloussant. Quand t’entends la sonnerie, c’est qu’elle est parvenue au terminus.

— Qui êtes-vous ? lui demandé-je.

— Véra Tedseuquitu. Mon père est à la salle de bains ?

— Heu, non, je ne pense pas. Vous me connaissez donc ?

Elle pouffe et montre les deux grands portraits.

— Ce serait malheureux.

— Pourquoi ces photos ?

— Daddy procède toujours ainsi avant d’entrer en contact avec la personne qu’il doit interviewer.

Hé ! dites, les gars ; j’ai l’impression que les sustentes du parachute de ma compréhension s’accrochent aux branches d’un fraisier. Je considère le joli bibelot aux grands yeux noirs de bohémienne tinorossienne.

— Que fait-il, votre papa ?

— Il travaille pour le Corner, un magazine littéraire britannique. Il écrit de longues interviews sur les personnages les plus divers. Ne me dites pas que vous l’ignoriez ?

— Ma foi, je l’avoue.

— Il devait vous rencontrer aujourd’hui ?

— Heu…, eh bien, je, j’ai eu un contretemps…

— Mais alors, où est-il ?

— Je l’ignore, mens-je.

— Et vous, pourquoi êtes-vous ici ?

— Parce que j’ai trouvé un message à mon hôtel, me priant d’y passer.

— Et la porte de sa chambre était ouverte ?

— Oui, c’est pourquoi je me suis permis d’entrer.

— En ce cas, dad va arriver, il est sûrement dans les parages.

Bon, le sac de nœuds ne s’aggrave pas pour l’instant. J’ai le temps de souffler.

— Vous disiez que votre père avait pour habitude de contempler les photos de ses… clients avant de les contacter ?

— C’est sa méthode. Il capte ainsi leur personnalité, et ensuite l’entretien devient facile, prétend mon père.

— Vous l’accompagnez toujours dans ses déplacements ?

— A l’étranger, oui. Il se fait vieux… Il m’a eue sur le tard et il m’adore. Nous formons une espèce de couple, lui et moi, vous comprenez ça ?

— Très bien, avoué-je sincèrement, en lançant une pensée tendre à ma Félicie par-dessus la Méditerranée.

Le cas est éberluant, non ? Le vieux tueur largement septuagénaire qui va remplir ses contrats, méthodiquement, en compagnie de sa fifille venue au crépuscule de sa vie. Elle l’attend à l’hôtel, le choie, le dorlote. Lui, il va perpétrer ses interviews, vieux monsieur un peu solennel et gourmé. La canne truquée : poum ! Ensuite il s’esbigne. Les témoins racontent qu’ils ont vu un type « déguisé » en vieillard. Marrant ! Superbe ! T’aimes ? Je te l’offre !

— Vous n’êtes pas mariée, si je comprends bien ?

— Non, un jour peut-être, quand papa m’aura quittée.

M’est avis qu’elle va pouvoir convoler d’ici peu.

— La… heu… solitude ne vous pèse pas, miss Tedseuquitu ?

Son sourire coquin remonte à ses lèvres. Ses yeux s’éclairent au braquemard fluorescent.

— Je fais des tas de rencontres intéressantes, mais sans lendemain. Pour l’instant, je m’en trouve bien.

— Qu’appelez-vous des rencontres intéressantes ?

Elle plante son regard hardi dans le mien qui commence à se voiler.

— Vous voyez ce que je veux dire ? Un bel homme passe par là, comme vous en ce moment. Il me plaît, je le lui fais comprendre. Si je lui plais aussi, il me le fait comprendre. Tout va très vite, très bien ; je hais les simagrées. La plupart des gens se croient obligés de jouer toute une comédie avant d’arriver au même résultat ; c’est déshonorant, vous ne trouvez pas ? L’hypocrisie bafoue l’acte d’amour qui est noble et franc.

— Exact, fais-je en la saisissant aux épaules.

Ses ravissantes petites mains de pianiste sur zobs me foncent droit au siège de l’amour-propre. Mon sésame, c’est les serrures, ses menottes, c’est les braguettes. Quelle technique ! Rapidité, précision, pas de temps mort, d’accrochages, de faux mouvements. Net et sans bavures (pour l’instant).

Elle me dédouane Popaul au port franc, le temps que ta grand-mère diabétique met pour sucrer son café. Elle s’exclame de ravissement devant un si beau bébé joufflu, bien portant, qui se tient droit comme un héron emmanché d’un long cou sur sa grosse papatte. Déjà en pleine croissance et excroissance, vigoureux, tambourinant la harde, à dodeliner comme la tronche à la tortue articulée. Oh ! le joli bibelot pour cette femme-enfant. Comme elle va bien jouer à la maman avec ce ravissant baigneur. Lui donne de grosses bisouilles humides sur ses bonnes joues. Lui gazouille des gentillesses, promesses et presque des serments déjà.

— Laissez-moi faire, laissez-moi faire, qu’elle me supplille, la belle chérie.

Tenant ma camarade zifolette par le goulot, elle m’emporte jusqu’à la chaise la plus voisine. S’y agenouille comme pour élever son âme ; mais non : il s’agit seulement de son exquis dargif pommé, faut un début à tout. Combien ont commencé par se préoccuper de leurs miches pour, ensuite, pouvoir contenter leur âme à culotte reposée ? L’existence prend les pires chemins, qui tous, tu le veux ou pas, te conduisent rémédiablement à Rome (Saône-et-Loire).

Là, donc, mon petit oiseau gligli se juche en équilibre peu stable, mais elle est si souple et légère…

Cannes parenthésées, elle plonge sa main sous cette arche de triomphe pour m’aller cueillir la camarade à l’œil en amande, me l’attire irrésistiblement jusqu’à son jardin d’éden. Suivez le guide ! T’as plus qu’à faufiler. Un petit coup en flâneur, pour dire de reconnaître les lieux. Impec. M’est avis que le séjour ne manquera pas de charme. Elle t’arrime l’extraterrestre façon casse-noisettes, cette merveille. Le coup du sabot de Denvers (Calvados) ; elle assure sa prise en goupillant hermétiquement le sas. Bon, moi je suis de plus en plus partant, ou plutôt « arrivant ». Un lutin d’amour pareil, tu peux tout espérer, tout accomplir. C’est le bonheur-banane, comme je dis puis à mes potes de Bourgoin-Jallieu (Isère). Le bonheur-banane, c’est quand tout ton potentiel d’énergie, toutes tes perspectives du moment, tout ton devenir inaltéré, résident dans ce muscle délicat que le Seigneur nous a accordé, à nous autres, mâles d’espèce divine, pour fourrer qui de droit, qui de gauche et surtout qui du centre.

La fifille au vieux journaliste-tueur sait ce qu’elle veut, le réclame et l’obtient. Moi, tu me connais sur le bout du nœud ? Eh bien, jamais encore je n’ai été le partenaire d’un tel numéro de haute voltige. Tu me crois ? Jure-moi que tu me crois, sinon je ne te dirai plus rien ; ne voulant pas partir en cinocherie pour des sceptiques irrécupérables, toujours à ricaner sur tout et le reste, qui te brandissent leur incrédulité comme si c’était une glorieuse bannière flottant au-dessus de leur connerie pour la transmuter en intelligence de bistrot.

Bon, puisque tu me donnes ta parole (je n’exige pas ta parole d’honneur, tu ne saurais pas de quoi je parle) de considérer comme authentiques les faits ci-dessous, je te les fais part, en espérant que vous ferez bon ménage, eux et toi et que vous aurez de nombreux z’enfants.

Lorsque je suis dûment installé dans l’entresol de mam’zelle Bout-de-Chou, tu veux que je te dise tout ? Elle me noue ses gambettes à la taille, puis, follement téméraire, largue la chaise.

T’as bien lu, Bazu ? Elle n’a plus d’autre point d’appui que moi. Atlas ! Atlas devant l’Atlas ! Fresques !

— Tournez ! Tournez ! elle écrie.

Du cirque, je te dis ! Barnum !

Docilement, j’amorce un arc de cercle.

— Plus vite, plus vite !

J’accélère. La force centrichose se met de la partie. Il s’ensuit un phénomène pousso-contracto-coïto-pétardant qui fait brailler la gosse comme le son du boa au fond du corps d’Alfred (pas le Capricieux, l’autre, le grand veneur).

Soucieux de parfaire et d’assister, je lui prends les mains. Arc-bouté je monte la giration. Le grand frisson ! Foire du Trône. Vzoooouuuu Vzoooouuu ! Mon manège à émoi, sétois, que dit mon cher Constantin. Valsez, saucisse ! Une, deux trois ; une, deux trois ! Encore ! A l’envers, maintenant !

Yes ! Oh ! Yes, again ! elle clame, la nière.

Bon, si ça l’amuse, moi je veux bien.

Elle enchaîne :

— Attention, je vais lâcher les jambes.

Et c’est vrai. La voilà qui dénoue ses flûtes mutines de mon autour. Les recroqueville en position de fœtus (c’est une femme fœtale). Elle est de plus en plus mignarde, la gosse.

— Attention, je vais tourner sur moi-même, qu’elle n’annonce.

Ses doigts se décroisent des miens. Non, je rêve ! On va vers l’impossible, les gars ! Reusement que ma présence d’esprit est accompagnante. J’imprime la rotation de mes mains libres en exerçant sur ses jolies fesses une poussée de gauche à droite égale au poids du liquide déplacé. Et on entre alors de plein cul dans le système solaire, mon bon ami. Véra, tu sais quoi ? L’exclamation de Galilée emprisonné pour avoir su avant tout le monde (y a rien de plus condamnable ici-bas) me monte au cerveau : « Et pourtant, elle tourne ! »

Oui, ce délicat petit être, cette fille si menue qu’en étant un peu moins grande elle aurait pu être naine, cet objet d’art vivant, salope de haut niveau, me tourne autour du zigomar à empennage scabreux (non, vraiment, c’était pas l’empenne, non vraiment c’était pas l’empenne, c’était pas l’empenne assurément, de changer de gouvernement).

Fou, non ? Oui, bon !

Je t’avais dit qu’il fallait beaucoup de conviction profonde et de confiance en ton Sana pour croire une connerie pareille.

Mais alors, mais alors là, mon Gaston de bois, de fer ou de carton, mais alors alors, on touche au sursublime, à l’hypersuper, au Mitterrandisme absolu, au Giscardisme total, au Chiraquisme de pointe. Bon, dans l’Histoire de l’humanité, y a eu quoi ? La roue, le feu, le fer, la pénicilline, le Coca-Cola et, tu veux que je lâche le tout grand mot ? Et ça. Oui, ça, je l’écris en toutes lettres, déplorant que le mot n’en comporte pas davantage pour l’affirmer plus copieusement. Ça ; ce vertige, cet exploit, cet effarement sexuel, ce débordement intensiel. Ça : elle, moi, son cul, mon paf, nous quatre, eux deux, et des lois physiques qu’Archimède, je lui pisserai au cul, tout de suite après que j’aurai récupéré mon matériel de miction dangereuse, provisoirement adapté à du plus noble, à de l’in-fer-nal, voilà les trois mots que je cherchais. Satan conduit le bal, le trou de bal, je sens bien. Je l’entends ricaner !

Non, c’est la sonnerie du téléphone.

Nain porte. Qu’il gredouille, tintoche, vrillonne. Je refuse, le téléphone, je sodomise Graham Bell.

Ça berlute un bon moment. Puis plus rien. La môme fait encore l’hélice un instant. Mais l’immense cri qu’elle libère me donne à penser que le vertige qui suivra ne sera plus que du tournis. Alors je dégage les aérofreins.

Holà ! Mollo ! Doucement ! Tout beau ! Là, là… Gentil. Hop ! Terminé !

Galant de bout en train, je vais déposer miss sur un canapé pour lui rendre congé. Pas brutal, tout dans le suave. Je pense à la reine d’Angleterre, moi. Je me dis, comment comporterais-je, s’il s’agissait d’elle si glorieuse ? Alors, hein : piano. Merci ! Ça va. Pas trop meurtrie ? Un peu de scotch pour retrouver des pulsations normales ? Deux doigts ? Dans quel sens ? Comme d’habitude ? Et ce fut convenable, ma chérie ? Juste comme vous aimez ? A la limite de la prouesse, avec un zeste de soudardise ? Bravo !

Et, peu tout de suite après cette mémorable séance patronnée par Moulinex, le bigophone remet la gomme.

— Répondez, please, demande la chevrette brisée.

Je décroche.

— Allô ! me dit une voix, ici le concierge, pourrait-on informer miss Tedseuquitu que deux policiers sont dans le hall, qui désirent lui parler ?

— Miss Tedseuquitu est en train de se rafraîchir la babasse, concierge, réponds-je. Elle en a pour quelques minutes, veuillez prier ces messieurs de l’attendre au bar, elle s’y pointera dès le dernier coup de serviette nid-d’abeille donné.

Je raccroche, soucieux, à présent, d’accoucher la mutine de ce qu’elle pourrait m’apprendre.

Elle est lovée sur le canapé, le joufflu toujours à l’air, délicat, préhensile comme une main d’homme ou une queue de singe, à moins que ce ne soit le contraire.

— Qu’est-ce que c’est ? soupire la vaporeuse.

— Des gens qui vous demandent.

— Ce doit être de la part de papa ?

— C’est très possible. Mais dites-moi, ma raffinée, vous ne rencontrez jamais personnellement les gens que votre cher vieux papa a charge d’interviewer ?

— Oh ! non ; j’ignore qui ils sont la plupart du temps. Vous, par exemple, daddy m’a dit que vous apparteniez à la littérature française et que vous étiez l’un des cinq grands écrivains de ce siècle.

— Les quatre autres étant ? ne puis-je me retenir de bougonner, déjà sur le qui-vive.

Tu nous connais, nous autres, littérateurs : toujours jalminces des lauriers d’autrui, soucieux de ne pas se laisser enfermer dans n’importe quel tabernacle. La gloire, d’accord, mais sans partage, ou alors demander les fafs des autres, savoir s’ils sont qualifiés.

— Daddy ne l’a pas précisé.

— Il aura voulu parler de Proust, Céline, Dutourd et Cohen, conclus-je, encore que Proust, hein ? La place de la Madeleine, ça commence à bien faire. Donc, en réalité vous ignorez le comportement professionnel de votre papa ?

— Je ne le connais qu’au niveau des préparatifs.

— Vous voyagez beaucoup ?

— Dans le monde entier.

— Vous lisez ses articles du Corner ?

— Le Corner est une revue littéraire vendue uniquement par abonnement, mon père qui est la modestie même refuse de le recevoir.

Pas curieuse, fifille. Nympho, mais laissant licebroquer le mérinos. Femme-jouet, femme-d’amour. La toupie ronfleuse, O.K., m’sieur Jules. La vie d’hôtel : banco ! Pour ce qui est du reste, elle s’en remet à son vieux. Dis, elle va y trouver une paille, à présent que la voilà orpheline.

Gentil couple : le dabe et sa jeune fille. Bon chic, bon genre britannoche. Flanelle de qualité, maintien, carabine truquée. Thé à five o’clock. Mam’selle se fait bourrer pendant que le father remplit ses petits contrats jolis. La vie est chouette.

Et puis crac ! le grain de sable. Un branque de pseudo-détective privé qui ne sait pas utiliser sa pétoire, et tout est foutu ! La môme Véra plonge la tête la première dans le malheur. Elle va retrouver dans un instant les pénibles réalités.

— Bon, vous devriez descendre au salon rejoindre ces policiers.

Elle écarquille.

— Des policiers ?

— Il paraît !

— Mon Dieu, serait-il arrivé quelque chose à mon père ?

Je regarde ailleurs, qu’à quoi bon la réconforter puisque le chagrin est déjà à l’affût à quelques mètres de là. Elle va mettre un peu d’ordre dans sa mise (et c’est pile le mot que j’aurais choisi s’il ne s’était imposé à moi) tandis que je m’hâte de dépunaiser mes portraits pieds et face. Je les roule pour les emporter sans attirer l’attention.

Véra s’élance hors de la salle de bains. J’attends qu’elle ait pris quelque avance et je me carachose à mon tour.

Mais comme je m’apprête à passer le seuil, le téléphone retentit pour la troisième fois. Mon hésitance est de choucroute durée. En trois enjambées, je vais au combiné et le défourche.

— J’écoute ?

— Flavius ? demande une voix basse et anglaise.

Yes, mens-je brièvement.

— Où en sommes-nous ?

Je ne perds pas de temps à composer un beau texte claudélien.

It’s right ! je soupire.

No problem ?

Never (Nièvre).

Et je risque, baissant le ton :

— Il serait indispensable que je vous voie.

— Il vaut mieux pas.

— C’est capital, je ne peux pas parler de ça au téléphone.

— Bon, en ce cas vous savez où me trouver !

Et le gus raccroche.

In the babe, comme disent les pâtissiers londoniens.

Je dépote mon jacteur et forme le numéro du standard. Une voix de très jolie jeune fille brune avec un grain de beauté sur la joue gauche et un autre en haut de la cuisse droite, me demande ce que je désire.

— Ici l’appartement 41, je viens de recevoir un appel téléphonique dont j’aimerais connaître la provenance.

La jeune fille du standard à la robe verte pépie :

— Les chambres sont équipées de lignes directes, monsieur, il n’est pas possible de déterminer l’origine des appels.

— Merci, ma jolie.

Pour dire de, je vais explorer l’armoire du vieux, ainsi que sa valtoche. Dans la poche à soufflet d’icelle je découvre un gros rasoir électrique pouvant se transformer en pistolet, le cas échéant. Sinon, rien de particulier à signaler.

Je me masse la nuque, perplexe.

Ce coup de grelot ? Probablement un complice du vieux ? Son commanditaire, peut-être même ? Il croit que le contrat a été rempli. Il pense que je suis clamsé et que pépère projette encore de devenir centenaire. Putain d’Adèle ! Si je pouvais au moins savoir où il crèche, ce gonzier. Je ferme les châsses et rembobine la bande son pour me faire repasser sa voix, de mémoire.

Faisons l’autopsie de cette voix, si tu le veux bien, et si tu ne le veux pas, va t’acheter des fraises, il doit rester du sucre en poudre dans le placard.

Primo : voix britannique. Indiscutable.

Deuxio : voix placide de quelqu’un qui ne s’émeut en aucune circonstance.

Troisio : voix un tantisoit grasseyante. Son propriétaire est soit un homme enrhumé, soit un homme fort.

Bon, ça nous mène à qui, ça ? T’as pas une petite idée ? Avec ma pomme, t’as pourtant toujours été à bonne école, non ?

Eh oui, mon chérubin, eh oui : je ne puis m’empêcher de songer à Adam Delameer, ce gros faux mort presque veuf, devenu homme zéro sous l’identité provisoire du docteur Jess O’Meil.

Alors, tout naturellement, au lieu de m’en vatre (ou de m’en aller, au cas où tu pigerais pas mes lubies), je m’installe dans le fauteuil, le biniou sur mes genoux, l’annuaire de Marrakech ouvert sur la table basse en verre fumé.

Rubrique des hôtels. Partout j’attaque de la même manière incisive, canine et presque molaire :

— Docteur Jess O’Meil, s’il vous plaît !

D’un ton tellement péremptoire que même s’il n’est pas laguche, le bon doc, faut me le passer, sinon je casse.

Et pourtant, partout c’est la ritournelle :

— Comment dites-vous ? Jess O’Meil. Attendez, je vérifie…

Le petit moment mesquin, pour moi plein de suspense, puis la voix de mon correspondant :

— Nous n’avons pas de client à ce nom, je regrette.

Et moi donc ! Qu’est-ce qu’ils m’en ont foutu du faux docteur Jess O’Meil, les gars de Marrakech, tu peux me l’apprendre ?

Je fais tous les hôtels, par ordre alphabétique, et puis les établissements inscrits à « Résidence », les autres marqués à « Club-houses », et encore des machinchouettes pouvant prêter à confuse : nibe ! j’ai pas beau chpile, ce soir, mes braves. Savoir que cette grosse lope d’Adam attend le défunt tonton flingueur à quelques encablures et que je m’enrage à deviner où se peut-il bien être, merde !

Ayant tout passé en revue, je m’affale, bras en croix, gosier sec comme les semelles du mec venant de traverser le Sahara à griffes. J’ai le tournis. Un écœurement physique et moral. Tout ce bigntz, tous ces gens cramponnés à un mystère, et qui butent et qui trichent, s’engueulent, se réconcilient pour mieux s’arnaquer tout de suite après. Des tueurs, des viceloques, un monde noir et gonflé comme un énorme nuage d’orage bourré de merde et d’électricité bien féroce, prêt à déclencher des cataclysmes, à semer foudre et terreur. C’était pendant l’horreur d’une profonde nuit…

D’abord, tu te berlures pas, mon Tonio, en estimant qu’Adam Delameer est descendu dans un hôtel ? Et s’il l’a fait, tu t’imagines qu’il aura conservé le blaze sous lequel il s’est annoncé à l’hosto pour visionner sa rombière ? Docteur Jess O’Meil, sujet irlandoche, ça allait chez les blouses vertes, ça tombait dans le canevas. Mais after, redevenu simple citoyen anonyme, il va se la trimbaler, cette identité bidon ? A d’autres ! Ton gonzier, bout d’homme, il est dans une crèche privée, avec un nom inconnu. Peut-être est-il logé par le consul de Grande-Bretagne ?

Je pense au vieux tueur. Probable que pépère avait ses cas. C’était pas n’importe quel tueur à gages, le Roumain. Mais un spécialiste, un technicien, kif les accordeurs d’orgues (merci, facteur, à demain !). Il devait réserver son savoir à la Maison I.S., London (Nièvre). Ne faire que des extra délicats. Un maniaque du boulot. Son coup des photos en pied, longuement étudiées avant l’entrée en campagne, prouve une nature méticuleuse, un maître ès gâchette.

Ma pensée papillonne, retourne à Aïcha et à sa mother. Elles ont bien failli y passer, et ce de manière peu banale. Pour un rien ; parce que m’selle Aïcha est une fille aimante. Tu voudrais savoir, mais je te raconterai plus loin, si Dieu me prête vie jusque-là.

Chaque rose en son champ ; chaque chose en son temps, disait le bon François Mitterrand au temps qu’il était président de la République[9].

La porte brutalement déponnée va écailler le mur de son loquet de laiton.

Véra se tient dans l’encadrement, tragique. Tu croirais une petite louve enragée. Elle a plus de lèvres : juste des chailles pointues, carnassières en plein. Ses pommettes, franchement, sont comme celles d’un loup. Et son regard ferait glaglater le petit Chaperon Rouge, sa grande vioque et le garde forestier. Du feu ! Deux traits de feu. Telle, je m’attends à un hurlement. Et puis qu’elle se précipite sur moi pour me dévorer en commençant par les bas morcifs, comme le font la plupart des fauves…

— Vous le saviez ? elle murmure dans un souffle.

Il est des situasses où le mieux affranchi des mecs, le plus dégagé, n’a pas la force de bonnir des vannes.

— Oui, fais-je, je le savais.

— Salaud, sale salaud, et tu m’as enfilée au lieu de me le dire ?

— C’est vous qui m’avez sauté dessus, rappelez-vous.

— Tu y étais ?

A cet instant, je lis sur sa frite que foin du fameux reporter et des articles littéraires. Interviews, mes deux chéries ! Journaliste, mon cul ! Elle est parfaitement au parfum de ce que goupillait son dabe. Peut-être qu’il lui racontait des salades auxquelles elle feignait de croire, mais elle savait.

— C’est en essayant de me liquider qu’il s’est fait allonger, Véra. J’aimerais vous dire que ça me navre, mais si ça s’était passé autrement, je ne serais plus là pour en parler ; malgré votre peine, je vous assure qu’il avait mieux que moi l’âge de faire un mort. Ce sont les risques de son dur métier.

Mon cynisme n’accroît pas sa rage froide. Un paroxysme, tu peux plus le gonfler puisqu’il est par définition « à bout ».

— Qui l’a tué ?

— Un tueur.

— Mais encore ?

T’as entendu parler de Machiavel (1469–1527) ? Pour cézigue, le but à atteindre primait la morale. C’est sa pensée tortueuse qui me souffle une bizarre bizarre réponse.

— Un gros type, les cheveux grisonnants, avec des lunettes cerclées d’écaille et une forte moustache. Il se tenait au volant d’une voiture et a tiré sur votre cher papa. Je me suis jeté à terre.

Et voilà le turf, mon gentil mec. J’ai semé mon grain, faut laisser germer la récolte. A moins que ça ne donne rien…

Ce que je viens de déclarer à la louvette, de mon ton le plus spontané, le plus con vingt camps, paraît lui entrer dans le cigare en faisant le grand tour. Elle marque un break, hoche la tête, murmure :

— Mais non, non, c’est impossible.

— Qu’est-ce qui est impossible, petite ? Vous y croyez encore, vous, à l’impossible ?

— Mais ce serait… illogique.

— Vous y croyez encore, vous, à la logique ? Vous trouvez que les hommes et leurs actes concordent, qu’ils alignent leur vie sur leurs paroles ? Bref, qu’ils sont ce qu’ils prétendent être ?

— Mais… mais pourquoi l’avoir fait venir ici, pourquoi ?

Je place, innocemment, ma botte secrète (et tu sais que la botte, ça me connaît !).

— Les desseins de l’I.S. ont de commun avec ceux de la Providence d’être impénétrables, Véra. Dans un certain milieu, les limites n’existent plus et nous devenons tous des daltoniens aveugles, comme l’a écrit votre grand Shakespeare.

— Comment se fait-il que vous ayez vu cet homme ? questionne la miss Hélice en objection suprême.

— Quand un gus sort à demi d’une portière de bagnole avec un canon de pistolet sur son bras replié et qu’il ajuste une cible, on a tendance à le regarder, non ?

— Vous avez parlé de l’I.S., vous connaissiez donc cet homme ?

Moralement, je me mords les lèvres, et même les dents, ce qui est autrement plus délicat. Tu causes, tu causes, mon Antoine. Trop ! Le verbe s’est fait cher.

Prompto je retourne le jeu :

— Dites, mignonne, depuis le meurtre, je ne suis pas resté les deux pieds dans le même sabot. Si les services britanniques ne sont pas manchots, les services français ne sont pas culs-de-jatte. J’ai virgulé quelques coups de téléphone qui valaient le prix de la communication.

La petite louve émet une sorte d’étrange plainte. Elle passe dans sa chambre, va prendre un sac du style bandoulière, s’en harnache.

— Venez !

— Où ça, mon cœur ?

Elle soulève le rabat de son sac et me montre un flingue tout bizarre, plat et gris, avec une espèce de cellule érotico-poldève encastrée.

— Regarde, charogne ! me dit-elle.

Elle braque l’espèce de chose sur un abat-jour. Une vilaine odeur se répand et l’abat-jour devient gros comme deux chips calcinés.

— Tu as compris, si tu bouges, charogne ?

— Ma chère petite, balbutié-je, un peu pâle de la gargue, j’admire cette technique de pointe, mais puis-je vous faire observer que dans toute cette histoire je ne suis qu’une victime miraculée ? Vous me peinez outrancièrement en me traitant de charogne.

Le regard de braise qu’elle me place plein cadre est presque aussi crameur que sa pétoire à ondes blèches.

— Avance, charogne ! Tu resteras toujours deux pas en avant. Et inutile d’essayer une feinte de cinéma, comme par exemple de vouloir me flanquer une chaise ou autre chose à travers la figure : je crois t’avoir donné un aperçu de ma souplesse.

— Il était féerique, je lui dis-je.

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