CHAPITRE XI

Le Gros geint because les épines de cactus qui prennent ses salsifis pour des pelotes à épingles. Il remonte à ma hauteur, tel un cheval de trot qui met le laxompem cent mètres avant l’arrivée.

— Qu’est-ce qu’elle a dit ? me demande-t-il.

— C’est elle, le mystérieux correspondant du Vieux.

— Pas possible !

— Ben, il paraît.

— Gaffe. San-A ! Cette crémière te berlure, j’ai dans l’idée.

— Nous verrons bien…

Comme des bruits de motocyclette se font entendre, la gosse nous fait signe de nous planquer au sol. On s’aligne tous les trois, flanc contre flanc dans l’herbe rêche. Le contact avec Conchita est plutôt agréable. Qui qu’elle soit, elle possède un gabarit contre lequel il n’y a rien à redire. Je lui fais le coup de la paluche promeneuse et, à la lumière de la lune, elle m’examine, un rien surprise.

— Vous vous croyez dans une alcôve ? souffle-t-elle.

— J’aurais tendance, en votre compagnie.

— Ce n’est pourtant pas le moment…

Un groupe de motards passe en rafale à quelques mètres de nous. La route redevient déserte.

— Maintenant il faut nous dépêcher, exhorte la belle enfant, dans quelques instants les routes seront barrées.

Le dos rond, nous fonçons sur le talus. Quelques centaines de mètres plus loin il y a un chemin creux bordé d’ad libitum à palmes. Les chromes d’une bagnole brillent dans la pénombre.

— Vous allez vous installer dans le coffre ! décide Conchita avec autorité.

— Vous rigolez, non ? proteste le Preux.

Mais elle branle le chef, ce qui me donne furieusement envie de m’affubler d’une toque blanche.

— Je serai sûrement stoppée avant de parvenir à la ville. Si on vous trouve dans ma voiture, nous sommes perdus.

Je la regarde. S’agit-il d’une manœuvre ? Je ne vois pas à quoi elle rimerait. M’est avis que la toute belle se mouille comme l’ancre d’un navire à cause de nous. Lui témoigner de la méfiance serait déprimant pour elle. Elle a déjà ouvert le coffre de son bahut. Notre installation n’est pas aisée, mais à force de se tasser et de se tortiller, nous parvenons à caser nos prestigieuses personnes entre une roue de secours et la manivelle d’un cric. Le noir se fait. Nous ne respirons que grâce au trou de la serrure. C’est maigrelet lorsqu’on possède nos capacités thoraciques.

— Tu parles d’un cinoche, marmonne le Baraqué. Quand je pense qu’on devait aller ce soir à çui de no’ quartier, Berthe, Alfred, sa femme et moi. On projette un film sur la police justement : « Quand passent les six cognes », ça m’aurait intéressé. Alfred, lui, vu qu’il est coiffeur, préférait visionner : « Certains l’aiment chauve »…

— Oh, sois gentil, ferme-la, supplié-je.

— Biscotte ?

— En parlant tu empiètes sur ma part d’oxygène.

Il se tait, conscient de la gravité de cette frustration. La bagnole roule vite. Conchita a le style taxi : elle prend ses virages à la corde et conduit au frein. Par instants, on peut se croire à bord d’une fusée spatiale. Au bout d’un trajet assez long, me semble-t-il, la guimbarde stoppe. J’entends des voix masculines, très rudes. Puis le gazouillis de la gosse. Je me doute qu’il s’agit d’un barrage de poulets et je prie ardemment le Seigneur pour que Béru n’éternue pas, ce qui, à coup sûr, ferait sauter le couvercle du coffre comme le bouchon d’une bouteille de champagne secouée. Les portières de la voiture sont ouvertes et claquées. Quelqu’un s’approche de l’arrière et toque sur la tôle de notre refuge. Conchita lance quelque chose sur un ton joyeux et un type éclate d’un rire aussi gras que le bouillon d’un pot-au-feu.

— Nous repartons.

Encore cinq minutes et l’auto stoppe. Le couvercle du coffiot se lève, un grand carré de nuit se précipite dans nos éponges desséchées.

— Fin de section ! annonce le Gros.

Conchita nous sourit.

— Vous avez entendu ? demande-t-elle. Il s’en est fallu d’un rien que les flics n’ouvrent la porte de la malle arrière.

Je regarde autour de moi. Nous sommes dans une sorte d’espèce d’impasse malodorante.

— Venez, dit Conchita.

Nous démêlons nos membres. Béru récupère ceux qui lui appartiennent et sort de la malle. Je l’imite. Nous gagnons le fond de l’impasse. Une petite porte de bois donne accès à un jardin paisible où glougloute un jet d’eau. Sur la droite s’élève une aimable petite hacienda.

— C’est à vous, ce nid d’amour, Conchita ?

— Oui, c’est ma résidence clandestine.

Nous pénétrons dans une pièce de séjour peinte en blanc sur les murs de laquelle se détachent d’aimables ferrures espagnoles noires.

— Asseyez-vous ! Un drink ?

Béru prend la parole avant moi.

— Écoutez, beauté, dit-il, c’est pas qu’on n’ait pas soif, mais z’on a surtout les crocs. Vous z’auriez pas une bêtise quéconque à nous offrir ? Je sais pas, moi : un reste de gigot ou un jambon de Bahia…

La môme sourit. Elle s’approche d’un cordon de velours et tire dessus. Peu après, une grosse négresse se présente, avec des cocards pareils à des phares d’auto.

Elle ne paraît pas surprise du tout de trouver céans deux hommes fripés, terreux, tuméfiés, dont l’un est en chaussettes. Conchita lui donne des instructions. La négresse s’éclipse.

— Elle a du frichti au frigo ? s’inquiète le Généreux.

— Rassurez-vous. Vous allez avoir une collation.

Maintenant la môme s’exprime dans un français impec. Le Gros lui décoche un sourire déjà empreint de la plus vive reconnaissance.

— C’est un plat d’ici ? demande-t-il.

— Quoi donc ?

— La collection, dont vous causez.

Conchita Danlavaz se tourne vers moi, les sourcils en forme de point d’interrogation.

— Ne vous faites pas de bile, dis-je, c’est un blagueur à froid.

Comprenant confusément qu’il a déballé une balourdise, le Boulimique se contente de sourire aussi finement qu’un camembert trop fait.

— Bon, on s’explique ? tranché-je en prenant la main de Conchita qui vient de s’asseoir à mes côtés sur un canapé.

— C’est le moment, en effet, reconnaît-elle.

— Eh bien allez-y, mon cœur, je vous suis tout ouïe.

— Mon père, attaque-t-elle, était un riche colon d’origine espagnole. Il s’appelait Gonzalez Deconaimé Y Lavétor Y Pijaipa Y Létépa Con Binard, vous avez entendu parler ?

— Si j’avais entendu parler j’aurais retenu, assuré-je.

Bien entendu, le Gros rigole.

— Dites, mon lapin, sa carte de visite c’était un rouleau de papelard hygiénique, non ?

— Père avait les plus vastes plantations de tabac du sud de l’île.

Son expression se durcit.

— À la révolution, poursuit-elle, il a été assassiné et tous ses biens furent saisis. Moi, pendant ce temps, j’achevais mes études à la Faculté des lettres de Paris… Lorsque j’ai appris le désastre, je suis partie pour les États-Unis. Je n’avais qu’une idée en tête ; revenir à Cuho et tout mettre en œuvre pour nuire à ce régime maudit !

Elle est interrompue dans sa diatribe par l’arrivée de sa servante, laquelle pousse devant elle un plateau à roulettes chargé de victuailles. Son Estomac se fait reluire, je vous prie de le croire. Il y a là une dinde farcie à la banane, des saucisses au piment, des poires avocats en robe de chambre correctionnelle, des pruneaux crus et des galettes de fèves.

Plus une bouteille de Santo Emiliano. Essayer de modérer le Mahousse est impossible. Il a déjà une saucisse dans chaque main et on sent à quel point il regrette de ne disposer que d’une bouche pour dévorer tout ça.

Tandis qu’il s’obstrue les caries dentaires, je reviens au récit de Conchita, armé je l’avoue d’un pilon de dindon. C’est un digne dindon, digne d’un don et je lui fais celui de ma personne.

— Continuez, mon chou.

— Je connaissais votre chef, lequel est très lié à l’ancien ambassadeur de Cuho à Paris. C’est lui qui, voyant ma soif de vengeance, m’a adressé aux Services secrets américains.

— C’est bien du Dabe, mastique Béru. Il a de ces relations, le vieux salingue !

Il cueille entre le pouce et l’index, et avec le maximum de grâce, un bout de peau de saucisse bloqué entre deux de ses ratiches, l’examine avec attendrissement et, poussé par ce sens de l’économie qui fait les bonnes maisons, il se le remet dans le concasseur.

— C’est passionnant, mon petit, assuré-je. Je comprends pourquoi mon Boss ne m’a pas révélé votre identité : il ne tient pas à vous compromettre…

— J’ai toujours eu l’idée que le Vioque était un chaud lapin, assure Béru en enfournant un morceau de dindon gros comme mon poing.

— Une fois aux U.S.A., dit la mignonne, on m’a fait subir une instruction puis, m’ayant pourvue d’une fausse identité, on m’a lâchée ici avec pour mission de surveiller particulièrement Paulo Chon.

— Alors ?

— C’est de cette manière que j’ai découvert les entretiens secrets entre les meneurs guadeloupéens et Chon.

— Alors ?

— J’estimais avoir une dette de reconnaissance vis-à-vis de votre chef. Les hommes de Pointe-à-Pitre étant des ressortissants français, c’est donc lui que j’ai alerté.

— Et vous n’avez pas prévenu vos services ?

— Pas encore. J’estimais qu’il appartenait à la France de se pencher sur cette question.

Ça me fout en renaud. Je balance mon pilon à travers le living et j’aboie.

— Un agent secret digne de ce nom n’a pas à estimer ! Vous faites de l’espionnage comme d’autres gonzesses font de la broderie ! Dans ce damné boulot on n’a qu’un chef, vous m’entendez ! Qu’un seul, sinon il devient impraticable.

— Allons ! sermonne le Gravos, fâche-toi pas, t’intimide mademoiselle. Vise-la : a se demande ce qui te prend.

Le fait est que la môme est toute pâle et qu’elle me considère avec des yeux stupéfaits. Je me calme.

— Excusez-moi, Conchita, mais je vous jure que j’ai raison. Si vous aviez alerté les Services amerlocks au lieu des Services français, tout serait O.K. maintenant.

— Pourquoi ?

— Mais parce que ces fameuses entrevues concernaient plus les États-Unis que la France. Vous l’ignorez donc ?

— Bien sûr !

— Pourtant vous paraissiez au mieux avec Paulo Chon.

— J’étais devenue son amie…

— Sa petite amie ?

Elle rosit.

— Tous les moyens sont bons pour parvenir à ses fins.

— Et vous êtes arrivée à vos fins ?

— Oui. Grâce à mon intimité avec Paulo Chon, j’ai pu sauver la vie à beaucoup de gens, croyez-moi.

— Je vous crois, Conchita. Mais venons-en à l’histoire Tepabosco.

— C’a été terrible.

— Racontez…

— Lorsque j’ai eu prévenu votre chef, il m’a annoncé qu’il envoyait quelqu’un. Or, le jour même de l’arrivée de Tepabosco au Dubonn e Sinzano, Chon a été prévenu par une lettre anonyme.

— C’est Chon qui vous l’a dit ?

— Non, c’est Juan Lépino, l’homme que vous avez molesté hier pour le faire parler et qui était dans les papiers de Paulo Chon.

— Alors ?

— Je me suis dit qu’il y avait des fuites et que tout risquait d’échouer. Alors j’ai pris les devants.

— C’est-à-dire ?

— J’ai guetté Tepabosco devant le Dubonn e Sinzano et je lui ai dit de venir me rejoindre au Parisiana.

— Pourquoi ?

— Vous allez comprendre. Tepabosco est venu et nous avons eu une conversation ensemble. Je lui ai annoncé qu’il était brûlé ; que nous devions aviser d’urgence et arrêter un plan de conduite…

— Lequel ?

Tout en l’écoutant passionnément, je ne puis que me dire, tout aussi passionnément, que cette fille est l’un des plus beaux sujets qu’il m’ait été donné de rencontrer. L’excitation lui empourpre le visage et ses yeux de braise ont des lueurs qui vous font bouillir le raisin.

Faut être Béru pour pouvoir lui préférer une dinde farcie aux bananes !

— J’ai dit au Roumain la nature de mes relations avec Chon. Je pouvais les mettre à profit pour le sauver. Seulement, pour cela, je devais gagner tout à fait la confiance de Paulo. Comme je supposais que Tepabosco était surveillé, sans plus attendre j’ai téléphoné à Chon pour lui dire que je venais de repérer un étranger qui paraissait s’intéresser à lui et que je lui faisais le coup de la séduction afin de l’avoir en main.

— Très habile, approuvé-je. Qu’a dit Paulo Chon ?

— Il m’a complimentée et m’a chargée de surveiller le type.

— Ensuite ?

— Le lendemain, l’entrevue entre Chon et les gars de Pointe-à-Pitre devait avoir lieu, et Tepabosco a décidé d’y assister. Après il devait feindre d’avoir un accident.

— Pourquoi ?

— Pour gagner du temps. Pendant son séjour à l’hôpital il ne risquait pas grand-chose. Il a suivi mon conseil. Trop bien même, car il a été assez sérieusement blessé. Je suis allée le voir à l’hôpital le lendemain et ensemble nous avons composé le texte du message qui devait être transmis à votre chef.

— C’est vous qui avez posté le message ?

— Oui, après l’avoir soumis à Paulo Chon.

— Qu’a-t-il alors décidé ?

— De jouer le jeu tout en surveillant Tepabosco étroitement.

— Dites, fillette, vous, vous jouiez là un drôle de double jeu !

— C’était le seul moyen d’accorder un sursis au Roumain. Je parvenais simultanément : à retarder son arrestation, à satisfaire Paulo Chon, et à prévenir votre chef ! Pas mal comme résultat !

— De première, éructe Béru.

Le dindon gît devant lui comme un dessin de Bernard Buffet. Il ne subsiste plus que l’armature générale. Il a la bouche comme une bassine à friture, le Gros.

— En effet, conviens-je, c’était bien combiné pour un aussi joli cerveau.

Elle m’adresse un rapide sourire.

— Et nous ? dis-je.

— Quoi, vous ?

— Comment se fait-il que nous ayons eu maille à partir avec Paulo Chon ? Pourquoi m’avez-vous volé mon portefeuille ? Pourquoi avez-vous donné l’alerte après vous être enfuie de chez votre ami Juan Lépino ?

— Que de questions erronées ! sourit la déesse. Je vais tout vous expliquer…

Elle se verse un verre de Santo Emiliano, l’avale d’un trait pour bien montrer qu’elle s’est débarrassée des minauderies de salon, puis elle revient s’asseoir près de moi et ne me repousse pas lorsque je lui glisse mon bras préféré autour de la taille.

— Je vous ai dit que Tepabosco était surveillé. Votre ami, ici présent…

Là, Béru rote de confusion.

— … Votre ami est allé lui rendre visite. C’était donc se signaler à l’attention des anges gardiens !

Je l’interromps :

— Mais moi-même je filais l’inspecteur principal Bérurier et je n’ai rien vu d’insolite !

— Parce que l’homme qui s’était attaché à ses pas a su passer inaperçu.

Ça me mortifie un brin. Je prends un ton de confesseur à qui une ravissante pénitente raconte son dernier adultère et je balbutie :

— Continuez, mon enfant, dites-moi tout !

Et elle continue.

— Ce qui a tout faussé, c’est qu’ils ont cru que Monsieur…

Courbette de Béru qui en perd trois boutons de braguette d’une seule plongée.

— … Que Monsieur était seul. Quand ensuite ils vous ont vus ensemble ils ont mené une rapide enquête sur vous et ont appris que vous étiez Suisse, ce qui les a quelque peu déconcertés.

Elle s’arrête un instant pour reprendre haleine. Marrant tout de même que ce que j’estimais être une ruse suprême, se soit retourné contre moi. Nature, ces tocassons se sont demandé au départ ce que je voulais à ce gros lardon débarqué seul ici.

— Ils ont pensé que j’étais peut-être l’agent d’une autre puissance ?

— Oui.

— Et quand je vous ai entreprise au Parisiana, ils se sont dit que c’était une aubaine et vous ont chargée d’en savoir plus long sur mon compte ?

— Exact.

— Seulement lorsqu’une fois dans ma chambre je vous ai posé des questions sur Tepabosco, vous avez bien dû piger, non ?

— Au contraire ma méfiance s’est renforcée. Et voici pourquoi : j’ai pensé que si vous étiez un envoyé des Services secrets français, votre chef vous aurait communiqué mon adresse.

— Alors ?

— Pendant que vous vous trouviez dans la chambre de votre ami j’ai fouillé votre portefeuille et j’ai trouvé dedans une carte de police. Ça m’a paru être la preuve que vous trafiquiez pour une deuxième puissance. Je ne me serais jamais doutée qu’un agent travaillant sous un faux nom et une fausse nationalité conserverait dans ses poches sa véritable carte professionnelle. Je l’ai prise pour un accessoire destiné à vous faire agréer par Tepabosco.

— Ça, je dois reconnaître que t’as pas été bien aspiré, ricane le futur commissaire.

Ayant dit, il croise ses mains de charcutier enrichi sur sa bedaine de prélat repu et dodeline du chef. San-A fait la tronche. À ce qu’on dirait, miss Deuxième Burlingue vient de prendre sa revanche, hein ? Elle me revaut mes sarcasmes de tout à l’heure.

— Les plus vastes génies ont leurs petites misères comme n’importe quel Bérurier, assuré-je.

Sa Majesté soulève un store.

— Y me semble qu’on cause de mon nom ? s’inquiète-t-il.

Ne recevant pas de confirmation il s’assoupit de nouveau.

Je poursuis :

— Vous m’avez secoué mon portefeuille pour me faire croire que vous étiez une petite entraîneuse indélicate, n’est-ce pas ?

— Oui.

— Et vous êtes allée chez l’ami Lépino ?

— Oui.

— Vous avez prévenu Paulo Chon de votre prouesse ; puis, vous vous êtes dit que par l’autre fille…

Béru, qui s’est à demi réveillé, soupire mélancoliquement :

— Ah ! Prohibition, ça, c’est de la souris !

— Oui, enchaîne Conchita, je me suis dit que vous alliez savoir mon adresse officielle par Incarnation et j’ai envoyé quelqu’un chercher mes effets chez moi.

— Quelle idée ?

— Ma valise comportait un double fond et contenait certains documents. Sous le prétexte des robes, c’était elle que je voulais récupérer. Je craignais que vous ne mettiez la main sur certaines pièces…

— Je vois. Reste maintenant la dernière question. Pourquoi avez-vous alerté les flics après vous être enfuie de chez Juan Lépino ? À ce moment-là il n’y avait plus de doute pour vous : vous étiez sûre de ma qualité d’A.S. français.

— Je n’ai rien alerté du tout.

— Pourtant, nous les avons eus illico sur le râble.

— Évidemment, votre collègue était arrivé chez Juan au volant d’un car de police, c’est un véhicule qui ne passe guère inaperçu !

Elle me sourit, enjouée.

— Vous ne voulez pas un verre de vino avec moi ? À force de parler j’ai le gosier comme de l’amadou.

— Bonne idée ! meugle le Gros.

Nous trinquons tous trois.

— Et maintenant que les mystères passés sont en grosse partie éclaircis, parlons…

— De l’avenir ? gazouille-t-elle.

— Non, chère Conchita, du présent !

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