Comme ça, j'ai pris l'habitude de rendre visite à El Hadj. J'allais une fois par semaine, un peu plus, un peu moins. Ce qui était bien, c'est qu'il ne m'attendait pas, ou du moins il ne laissait pas voir qu'il avait pu attendre. Quand j'entrais dans la petite chambre, ce n'est pas à Hakim qu'il s'adressait. Il savait que j'étais là, il tournait la tête: «Laïla?» Hakim disait que les aveugles sont ainsi, ils ont un autre sens, ils sentent mieux les odeurs, comme les chiens.
Dans le train pour Évry, il y avait une bande de garçons et de filles, douze, treize ans à peine, encore des enfants. Dépenaillés, insolents, bruyants, mais j'aimais bien les voir. Ils m'amusaient, ils se passaient une cigarette, ils faisaient des grimaces, ils disaient très fort des grossièretés en regardant du coin de l'œil l'effet que ça faisait sur les banlieusards grognons. Un peu avant Évry, deux contrôleurs sont arrivés pour les arrêter, et la bande d'enfants s'est sauvée en sautant par la fenêtre sur le talus, juste avant la gare. Ils se suspendaient à l'extérieur, accrochés à la vitre, et ils lâchaient en criant.
C'est comme cela que j'ai rencontré Juanico.
À présent, je quittais tôt le squat du Javelot, j'allais travailler une heure ou deux dans le quartier, je faisais le ménage chez Béatrice, qui était rédactrice dans un journal, dans le Ve arrondissement, et chez un couple de retraités rue Jeanne-d'Arc. Houriya restait à faire la cuisine, elle sortait un peu vers midi, elle allait se promener toute seule, avec son gros ventre, dans le jardin des immeubles, au-dessus de nos têtes. Elle a fait la connaissance de M. Vu, un Vietnamien qui était gérant d'un restaurant, dans notre quartier.
Je ne voyais pas beaucoup Nono. Quand je partais, il dormait encore dans la salle-garage, sur ses feuilles de carton. Depuis la fois où il m'avait enlacée, après mon arrivée, je ne l'avais pas invité à se coucher contre moi. Je ne voulais pas. J'avais peur que ça ne devienne une histoire, si vous voyez ce que je veux dire. Je crois que ça le rendait très malheureux, mais il restait gentil avec moi, comme s'il ne s'était rien passé.
L'après-midi, j'allais retrouver Hakim dans un café près de la Sorbonne. Hakim l'appelait le café de la Désespérance parce qu'il disait que ça ressemblait à l'entrée de l'Enfer. Il apportait les livres, les cahiers, et je commençais à travailler. Il avait décidé que je devais brûler les étapes et me présenter au bac en candidate libre, ou à la capacité en droit. Pour le français, l'histoire et la philosophie, je n'avais aucun mal. Les leçons de Lalla Asma étaient exceptionnelles, elle m'avait façonnée à l'âge où d'autres jouaient à la poupée ou restaient des heures devant des dessins animés. Hakim me faisait lire des passages de Nietzsche, de Hume, de Locke, de La Boétie. Il m'apportait des photocopies. Il prenait ça très à cœur. Je crois que, tout d'un coup, c'était devenu plus important pour lui que de réussir à ses propres examens.
Il avait mis son grand-père dans le secret, et quand j'allais à Évry-Courcouronnes, El Hadj demandait: «Alors, où en es-tu de la philosophie?» On discutait des problèmes de morale, de la violence, de l'éducation, des idées sociales, de la liberté, etc. Et toujours il disait des choses très belles, comme si elles venaient du fond du temps et qu'il les avait retrouvées intactes dans sa mémoire.
Il disait: «Dieu fend le grain et le noyau, il fait sortir le vivant du mort et le mort du vivant.» Il disait: «Sais-tu ce qu'est la frappante? C'est la journée où les hommes seront comme des papillons épars et les monts comme de la laine cardée.» Il disait: «Je me réfugie auprès du Seigneur de l'Aurore, contre le mal, contre la nuit qui se déroule, contre le mal de celles qui soufflent sur les nœuds, contre le mal du jaloux quand il jalouse.» Il tournait son visage vers la fenêtre, et c'était comme si les mots venaient du plus profond de lui, doux et sonores.
Il parlait du Prophète, et de Bilal, son esclave, qui avait le premier lancé l'appel à la prière. Après l'hégire, quand le Prophète avait rendu son dernier soupir dans les bras d'Aïcha, Bilal était retourné en Afrique, il avait parcouru les forêts jusqu'au grand fleuve qui l'avait conduit sur le rivage de l'océan. Il parlait de cela comme s'il avait connu Bilal, comme si c'était arrivé dans sa propre famille, et je voyais Hakim, assis par terre, qui buvait ses paroles. Je n'ai jamais oublié l'histoire de Bilal, et pour moi aussi, c'était ma propre histoire.
Hakim voulait que je vienne le voir à la cité U d'Antony. Là-bas, c'était un autre monde. Ça ne ressemblait pas à la rue du Javelot, ni aux stations de métro, et on était bien loin de Courcouronnes. C'était immense, entouré de beaux jardins verts comme à la campagne, avec des pies et des merles. Il y avait des étudiants du monde entier, des Américains, des Italiens, des Grecs, des Japonais, des Belges, même des Turcs et des Mexicains. Hakim m'invitait au resto U, il payait mon déjeuner avec des tickets. Je mangeais des raviolis, des lasagnes, des plats que je ne connaissais pas. Comme dessert, j'essayais les petits-suisses, les profiteroles, les beignets aux pommes, la frangipane. Hakim me regardait m'empiffrer, ça avait l'air de l'amuser. Lui était habitué. Il mangeait à peine, il grignotait un bout de biscotte. Il trouvait tout dégueulasse.
Après, il voulait que je monte dans sa chambre. Il disait qu'il voulait me montrer ses livres. Mais je n'avais pas envie de me disputer avec lui. Je savais qu'il voulait m'embrasser, et tout, et je n'avais pas envie que ça devienne comme ça avec lui. Je voulais qu'on reste amis, qu'on continue à aller voir El Hadj, pour l'écouter parler du Prophète.
Je savais bien que ça l'embêtait. Il était jaloux, parce qu'il croyait que Nono était mon petit ami. Mais il n'osait rien dire. On allait dans le salon, on s'asseyait sur le sofa, et je sortais de mon sac Par-delà le bien et le mal. «Explique-moi pourquoi Nietzsche parle de contrat. Tu m'as dit qu'il n'avait rien inventé, que c'était Hume qui avait dit que toutes les sociétés reposent sur un contrat.» Il me regardait derrière ses verres. Avec sa barbiche et ses lunettes d'acier, il avait l'air d'un homme dur. Je suppose qu'il voulait ressembler à Malcolm X, et pour ça aussi il ne sortait jamais sans avoir repassé ses chemises blanches et choisi sa cravate. Il ne voulait pas ressembler aux Africains de Nanterre ou aux Antillais des Saules avec leurs piggytails et leurs dreadlocks. Il détestait tout ça et, en même temps, il souffrait pour eux. Un jour, il m'a dit: «Tu sais ce qui me fait le plus mal? C'est de les regarder et de penser que même pas la moitié d'entre eux arrivera à l'âge adulte. C'est comme si tu étais dans le couloir de la mort.»
Il parlait aussi de l'Afrique, des règlements de compte, des mercenaires au Biafra, des enfants qui mouraient de faim, de sida, de choléra.
Il aimait bien Nietzsche, mais c'était tout de même Fanon qu'il préférait. Il me lisait aussi des morceaux de Maîtres et esclaves de Roberto Frayre. Mais il n'aimait pas les romans, ni les poésies, sauf Mahmoud Darwich et Timagène Houat. «Les romans, c'est de la merde. Il n'y a rien là-dedans, ni vérité, ni mensonge. Juste du vent.» Il acceptait à la rigueur Rimbaud et John Donne, mais il en voulait à Rimbaud d'avoir mal parlé des Noirs et d'avoir trempé dans des trafics. Un jour, je lui ai dit: «Au fond, tu penses comme ton grand-père, que tout a été dit dans le Coran.» Je croyais qu'il se mettrait en colère, mais après avoir réfléchi, il a répondu: «C'est vrai, il ne peut pas y avoir de poésie plus grande que celle-là, c'est terrible que tout ait été dit il y a plus de mille ans, et qu'on sache qu'on ne pourra jamais faire mieux.» J'ai dit: «Alors, on peut peut-être faire pire?» Il m'a regardée avec étonnement, je crois que c'est quelque chose qu'il n'arrivait pas à comprendre.
J'avais deux vies. Le jour, avec Houriya, et les ménages chez ma rédactrice, et les courses dans le quartier chinois, et tout le monde trouvait que j'étais bien gentille. J'allais même voir Nono s'entraîner dans sa salle de boxe, à Barbès. Et puis les rendez-vous d'étude avec Hakim, à la Sorbonne, ou près de la rue d'Assas, et il était très fier de me montrer à ses camarades étudiants: «C'est Laïla, elle est autodidacte. Elle se présente au bac en candidate libre cette année, section littéraire.»
La nuit, tout changeait. Je devenais un cafard. J'allais rejoindre les autres cafards, à la station Tolbiac, à Austerlitz, à Réaumur-Sébastopol. Quand j'arrivais par le tuyau du couloir et que j'entendais les coups du tambour, ça me faisait frissonner. C'était magique. Je ne pouvais pas résister. J'aurais traversé la mer et le désert, tirée par le fil de cette musique-là.
Les Africains étaient plutôt à la Bastille ou à Saint-Paul, et à Réaumur-Sébastopol, c'étaient les Antillais. Mais il y avait quelque-fois Simone. C'est Nono qui me l'a fait connaître, la première fois. Il y avait beaucoup de monde dans les couloirs, mais j'ai réussi à me faufiler au premier rang. Elle était grande, très noire de peau, avec un visage un peu long et des yeux arqués, elle était coiffée d'un turban fait avec des chiffons rouges, et elle portait une longue robe rouge sombre. J'ai pensé qu'elle ressemblait à une Égyptienne. «C'est Simone, elle est haïtienne», a dit Nono. Elle avait une voix grave, vibrante, chaude, qui entrait jusqu'au fond de moi, jusque dans mon ventre. Elle chantait en créole, avec des mots africains, elle chantait le voyage de retour, à travers la mer, que font les gens de l'île quand ils sont morts. Elle chantait debout, presque sans bouger, et puis soudain elle se mettait à tourner en battant des hanches, et sa grande robe s'ouvrait autour d'elle. Elle était si belle que j'en étais suffoquée.
Un soir, elle m'a parlé. Il y avait eu une des-cente de police, et tout le monde s'était dispersé. On s'est retrouvées seules dans la station, au bout d'un long couloir. Il fallait passer. Je lui ai donné un ticket, et nous avons pris le métro vers Place-d'Italie. Elle s'est assise sur un strapontin, et moi à côté d'elle. Dans le wagon crasseux, elle avait l'air d'une princesse, avec ses paupières lourdes, sa lèvre inférieure qui faisait un ourlet, ses pommettes larges et lisses. Elle m'a demandé qui j'étais, d'où je venais. Je ne sais pas pourquoi, je lui ai dit ce que je ne confiais à personne, ni à Nono, ni à Marie-Hélène, ni à Hakim, que je ne savais pas qui j'étais ni d'où je venais, qu'on m'avait vendue, une nuit, avec mes boucles d'oreilles qui représentaient le premier croissant de la lune. Elle m'a regardée un long moment, elle m'a souri, elle était émue, je crois. Elle m'a serré la main, ses mains étaient larges et chaudes, pleines de force. Elle a dit: «Tu es comme moi, Laïla. Nous ne savons pas qui nous sommes. Nous n'avons plus notre corps avec nous.» C'était étrange de l'entendre parler ainsi, avec les cahots du wagon et les éclats de lumière des stations qui passaient sur son visage, qui éclairaient ses iris d'un brun transparent comme une gemme.
Elle m'a emmenée chez elle. Elle habitait une petite maison avec un petit jardin, dans une petite rue, qui avait un nom bizarre, Butte-aux-Cailles. Elle vivait là avec son ami, un médecin haïtien, très grand et mince, élégant, et d'autres gens, des Haïtiens, des Dominicains aussi. Ensemble, ils parlaient cette langue douce et rapide, que je ne comprenais pas. S'il n'y avait pas eu Simone, je crois que je serais repartie tout de suite, parce que ces gens-là me faisaient peur, surtout Martial Joyeux, l'ami de Simone, qui me regardait d'un œil fixe, comme s'il voulait lire dans mon âme. Il y avait aussi quelques Blancs, un homme d'un certain âge, qui se disait critique d'art et qui ressemblait un peu à M. Delahaye, des femmes habillées à l'africaine, portant de lourds colliers de colifichets dans le genre de ceux que vendait Hakim. La fumée des cigarettes et du hasch faisait des volutes lourdes qui s'enroulaient autour des rayons des spots lumineux, en suivant les notes d'une musique lente qui avait l'air de sortir de tous les côtés, du sol, même des fenêtres.
Personne ne s'occupait de moi. J'étais debout devant l'entrée de la salle, je fumais en essayant de voir Simone, son turban écarlate, ses boucles d'oreilles en or.
Le critique d'art est venu vers moi, il m'a dit quelque chose à voix basse, et comme je ne comprenais pas, il s'est penché sur mon oreille pour répéter. «Elle est sublime.» Je crois que c'est ce qu'il disait. «Elle est toute l'âme du martyrologe.» Je n'ai dit ni oui ni non. Peut-être qu'il pensait que je ne comprenais pas. Je l'ai regardé bien en face, et fort, pour qu'il entende, j'ai récité Aimé Césaire:
À moi mes danses
mes danses de mauvais nègre
à moi mes danses
la danse brise-carcan
la danse saute-prison
la danse il-est-beau-et-bon-et-légitime-d'être nègre.
Le critique m'a regardée sans bouger, puis il a éclaté en applaudissements. Il criait: «Écoutez, écoutez cette jeune fille, elle a quelque chose à vous dire!» Et Simone a commencé à chanter, rien que pour moi. J'ai su qu'elle chantait pour moi parce qu'elle était debout au fond de la salle et qu'elle a tendu la main vers moi, et sa voix chantait des paroles en français, très douces et qui glissaient dans la musique des tambours.
Et puis j'ai fumé des cigarettes de hasch. J'avais déjà été dans des endroits où on faisait ça. Au fondouk, de temps en temps, les princesses se réunissaient dans une des chambres et elles fumaient à tour de rôle, et ça sentait une odeur de feuille, un peu âcre, un peu sucrée. Ça m'enivrait et ça m'endormait.
Là, ce n'était pas pareil. C'est un Haïtien qui m'a donné la cigarette, et comme il y avait la musique, et la voix de Simone qui s'enroulait doucement, j'ai respiré la fumée, très fort, comme si je voulais qu'elle me traverse de part en part. J'ai bu aussi de l'alcool, du whisky, de la bière, du rhum. Je me rappelle que je ne pouvais plus m'arrêter. Bien entendu, j'ai été bientôt complètement ivre, non pas inconsciente, mais vraiment ivre, comme ils montrent quelquefois au cinéma. J'étais debout devant Simone, et je chantais moi aussi, je répétais ses paroles, je dansais en même temps. J'étais ivre, mais je n'avais pas perdu la tête, au contraire. Tout était devenu très clair. Je répétais les paroles d'une chanson, au fur et à mesure, sur le rythme des petits tambours qui parlent.
J'entends la ville qui bat
Dans mon cœur dans mon sang
Nous autres
Loin perdu la mer
… Manjé té
pas fé
Yich pou lesclavaj.…
Le monde vacillait comme dans un séisme, je voyais les murs ondoyer, et les silhouettes des gens s'effilocher, et la couleur écarlate du turban de Simone qui grandissait, emplissait toute la salle. Le docteur Joyeux s'est occupé de moi. Il m'a allongée sur le sofa, et Simone m'a essuyé le visage avec une serviette trempée dans l'eau froide. Elle avait des gestes très doux, très maternels. Elle parlait lentement, et j'avais l'impression qu'elle continuait à chanter, rien que pour moi, de sa voix grave, un peu rauque, mais ça n'était pas le roulement doux des tambours, c'était le bruit de mon cœur dans mes oreilles.
Les gens sont partis les uns après les autres. Peut-être qu'ils avaient peur que je ne cause un problème. C'étaient des gens importants, des critiques d'art, des cinéastes, des politiciens. Ce sont toujours eux qui s'en vont en premier.
D'ailleurs, l'ami de Simone se disputait un peu avec elle. C'était drôle, je les entendais très loin, comme si je flottais au-dessus de mon corps, et qu'ils parlaient devant quelqu'un d'autre. Puis ils m'ont laissée sur le sofa, et ils sont partis dans la chambre. Et j'entendais la voix grave du docteur, et les cris de Simone, d'abord comme s'il la battait, ou la torturait, ensuite elle s'est mise à geindre en cadence, et j'ai compris qu'ils faisaient l'amour.
Je grelottais de fièvre sur mon sofa. À un moment, je suis allée vomir dans la cuisine, je titubais, je renversais des chaises. Il y avait encore deux Haïtiens en train de boire. Quand ils m'ont vue dans cet état, ils sont allés chercher le docteur. J'entendais qu'ils parlaient de moi en créole, et Martial Joyeux a dit: «Elle est peut-être mineure, il vaut mieux la ramener chez elle.» Je crois qu'il a téléphoné un peu partout, jusqu'à ce qu'il retrouve Hakim. C'est ainsi qu'il a eu l'adresse du garage de la rue du Javelot. Je commençais à comprendre que le monde est étroit, quand on tire sur le bon fil, on a tout qui vient, c'est-à-dire que ceux qui comptent pour quelque chose sont liés les uns aux autres, et ils amènent tous les autres, les rien du tout comme Nono et moi avec eux. Je pensais à tout cela pendant que l'ami de Simone téléphonait. J'avais le cerveau qui bouillait. En même temps, je voyais le visage de Simone, ses grands yeux de vache égyptienne, qui exprimaient une détresse profonde, et tout d'un coup, j'ai compris pourquoi elle avait dit que nous étions semblables, que toutes les deux nous n'avions plus notre corps, parce que nous n'avions jamais rien voulu et que c'étaient toujours les autres qui avaient décidé de notre sort.
Elle est restée dans la petite maison, pendant que Martial et un de ses copains m'ont emmenée en voiture. Dehors, il pleuvait. Les flaques frissonnaient sur le pavé noir de la rue. La voiture roulait dans les rues silencieuses et vides. Je crois qu'ils cherchaient une pharmacie de nuit, et le toubib est allé acheter un médicament pour moi, des gouttes de Primpéran, ou quelque chose. Et ils m'ont déposée dans la rue, devant la porte. Ils m'ont fait descendre, ils m'ont assise le dos contre la porte du garage. Martial Joyeux m'a regardée en silence. Le copain du toubib a dit une phrase en créole Je m en fichais. C'aurait pu aussi bien être du javanais. Et puis ils sont partis, les deux feux rouges ont tourné la rue, ont disparu.