La sœur tourière nous conduit, le Gros et moi, jusqu’au parloir où nous attend la Supérieure. Béru a pris une mine recueillie. Il tient son chapeau à la main et il a remonté le nœud de sa cravate, ce qui est malaisé vu qu’elle ne se compose plus que d’un nœud depuis qu’elle a servi à des essais d’artificier.
Je m’incline devant la religieuse. Elle m’apprend que maman se porte bien et qu’elle achève de préparer sa valise.
Effectivement, la porte s’ouvre et ma chère Félicie paraît. Je m’élance et je la serre très fort dans mes bras.
— Ma poule, je murmure, la voix enrouée par l’émotion. Ma petite poule, ça y est, le cauchemar est terminé. On va se prendre quelques jours de vraies vacances tous les deux.
Béru sanglote. Il s’avance pour embrasser Félicie, mais il glisse sur le parquet trop encaustiqué et s’étale lourdement. La Supérieure cherche à réprimer son hilarité. Le vocabulaire du Gros l’aide du reste à retrouver son sérieux.
— C’est la faute à ce p… de parquet, n… de D… ! vocifère le Gros.
Il s’avise alors de l’énormité de ce qu’il profère, du lieu où il se trouve et, assis sur le plancher luisant, il balbutie en reboutonnant sa braguette béante :
— Mande pardon, ma sœur, mais c’est plus fort que moi : je deviens mal embouché chaque fois que je me casse la gueule !