C'est arrivé un après-midi de mai. Un appel que je n'attendais pas.
J'étais assise à mon bureau où je me débattais avec mon ordinateur récalcitrant. J'ai décroché en prononçant un « allô » que je savais sec.
« Bonjour. C'est William Rainsferd. »
Je me redressai d'un coup, le cœur battant mais essayant de garder mon calme.
William Rainsferd.
Je restai muette, accrochée au combiné comme à une bouée.
« Vous êtes toujours là, Julia ? »
J'avalai ma salive.
« Oui, j'ai juste des problèmes avec mon ordinateur. Comment allez-vous, William ?
— Ça va », dit-il.
Il y eut un bref silence, mais sans tension perceptible.
« Ça faisait longtemps. »
Mon intervention sonnait un peu vide.
« Oui, c'est vrai », dit-il.
Il y eut encore un silence.
« Je vois que vous êtes une vraie New-Yorkaise à présent. J'ai trouvé vos coordonnées dans l'annuaire. »
Zoë avait donc raison. « Et si on se voyait ?
— Aujourd'hui ? dis-je.
— Si vous le pouvez, c'est parfait. »
Le bébé dormait dans la chambre d'à côté. Elle avait été à la crèche le matin. Mais pourquoi ne pas l'emmener avec moi, après tout ? Même si je savais qu'interrompre sa sieste provoquerait un drame. « Je peux m'arranger.
— Très bien. Je vous rejoins dans votre quartier. Vous connaissez un endroit où nous pourrions aller ?
— Vous voyez le Café Mozart ? Au croisement de la soixante-dixième Rue Ouest et de Broadway ?
— Je vois. Parfait. Disons dans une demi-heure ? » Quand je raccrochai, mon cœur battait si vite que je pouvais à peine respirer. J'allai réveiller mon petit monstre, ignorai ses protestations, attrapai la poussette et sortis.