Les chers absents

Il y avait une dernière chose que je voulais faire à Ilium : prendre une photo de la tombe du savant. Je retournai donc à l’hôtel. Sandra n’était plus dans ma chambre. Je pris mon appareil de photo et sautai dans un taxi.

Il tombait toujours une neige mouillée, grise et acide. Je songeai qu’avec un temps pareil, la tombe du vieux ferait une bonne photo, qui pourrait peut-être même illustrer la jaquette de mon livre.

À l’entrée du cimetière, le gardien m’expliqua comment trouver la concession Hoenikker.

— Vous ne pouvez pas la rater. C’est le plus grand monument de tout le cimetière.

Il n’avait pas menti. C’était une stèle, un phallus d’albâtre de six mètres de haut sur un mètre de diamètre. Elle était gaufrée de neige fondue.

— Grand Dieu ! m’exclamai-je en riant comme je descendais de taxi avec mon appareil. Voilà qui me semble assez bien choisi pour célébrer la mémoire du père de la bombe atomique !

Je demandai au chauffeur s’il voulait bien poser à côté du monument pour donner une idée de l’échelle. Puis je lui demandai de balayer de la main un peu de neige afin qu’on puisse voir le nom du défunt.

Ce qu’il fit.

Et Dieu m’est témoin que nous vîmes apparaître sur la colonne, en lettres de quinze centimètres, l’inscription suivante :


MÈRE

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