Chapitre XX

Le DC 10 en partance était stationné un peu à l’écart des autres longs courriers, face au salon d’honneur de l’aéroport d’Abidjan. Protégé par une haie de parachutistes ivoiriens en tenue de brousse, armes au poing. Des projecteurs éclairaient le tarmac autour, de façon à ce que personne ne puisse s’approcher de l’appareil sans être vu.

L’embarquement des passagers avait commencé. Malko attendait en compagnie de Stanley Parker et d’un policier ivoirien en civil. L’Américain consulta sa montre.

— Encore vingt minutes. Je crois que nous avons pris toutes les précautions possibles et imaginables.

Derrière eux, un grand panneau rappelait aux passagers de n’accepter sous aucun prétexte un paquet d’un inconnu. Les passagers faisaient la queue devant le portique magnétique checkant leurs bagages à main et les objets métalliques qu’ils pouvaient avoir sur eux. La sensibilité de l’appareil avait été réglée au maxima et la sonnerie se déclenchait sans arrêt, pour quelques pièces de monnaie.

Derrière les policiers ivoiriens, deux civils blancs veillaient à ce qu’il n’y ait aucune faille dans le dispositif.

— Certaines grenades n’ont pas assez de métal pour déclencher l’appareil, remarqua Malko.

— Exact, reconnut Stanley Parker. Aussi nous avons un second contrôle manuel par des gens à nous effectué au bas de la passerelle. Cela retarde l’embarquement, mais ça vaut la peine.

— Et les bagages de soute ?

— Ils ont été passés aux rayons X. Et ils sont reconnus par leurs propriétaires avant d’être mis en soute. Je peux vous garantir que personne ne monte à bord avec une arme. Même avec une lime à ongles.

— Qui y a-t-il comme passagers ?

— Des gens d’ici, une quarantaine de citoyens américains venus jouer au golf et dix-sept de nos diplomates avec leurs familles qui partent en congé.

La cible idéale pour des terroristes. Malko n’arrivait pas à se débarrasser complètement du malaise qui l’étreignait en dépit des assurances de l’homme de la CIA.

Quelque chose ne collait pas. Depuis le début, il avait été question de deux terroristes. Apparemment destinés à la même opération. Or, l’un semblait avoir brutalement décroché.

— Il y a des Libanais à bord ? demanda-t-il.

— Bien sûr, confirma Stanley Parker. Il y en a cent cinquante mille en Côte d’Ivoire.

— Je suppose que vous avez vérifié leurs identités ?

— Ils ont tous des passeports ivoiriens ou des permis de séjour. Il n’y a pas un Sierra Leonais à bord.

Malko regarda la file qui s’allongeait devant les passerelles, à bout d’argument. Pour une fois en Afrique, la sécurité était sérieuse.

— Il y aura des gardes armés dans l’avion ? demanda-t-il.

— Non, le commandant de bord s’y oppose, fit l’Américain. Mais je vous assure que toutes les précautions ont été prises. L’expérience des détournements passés nous a servi.

Malko avait dans sa poche sa carte d’embarquement. Il tenait à être sur ce vol, et, de toute façon, il devait rentrer en Europe. Stanley Parker contemplait les derniers passagers en train d’escalader la passerelle lorsqu’un agent de la compagnie s’approcha de lui et murmura quelque chose à son oreille.

L’Américain explosa :

God damn it !

— Qu’est-ce qui se passe ? demanda Malko.

— Il manque un passager…

Et pourtant, plus aucun bagage ne se trouvait sur le tarmac. Ou c’était un passager sans bagages – étonnant sur un long courrier – ou, à la suite d’une erreur de manutention, sa valise avait été chargée avec les autres.

— Retrouvez-le, fit le chef de Station de la CIA. On ne partira pas sans lui !

— Et si on ne le retrouve pas ?

— On fait descendre tous les passagers, on vide les soutes et on recommence la reconnaissance des bagages de soute.

L’employé était effondré.

— Il y en a pour des heures…

— Ça vaut mieux que d’exploser en vol, fit Parker.

Il alluma une cigarette et l’attente commença dans la chaleur moite et l’odeur de kérosène. Tous les passagers étaient maintenant à bord, mais les portes restaient ouvertes. Les minutes s’écoulaient. Walkie-talkie au poing, les employés au sol passaient l’aérogare au peigne fin…


* * *

— Le voilà !

Deux hôtesses encadraient un grand Noir en boubou, l’air ahuri, avec une minuscule valise en carton tenue par des ficelles. L’une d’elles expliqua :

— Il attendait dans la salle des départs domestiques. Il s’était endormi et n’a pas entendu les appels.

— Vous l’avez fouillé ?

— Oui. La valise aussi.

— Alors, en avant !

Tandis qu’on emmenait le Noir vers la passerelle arrière, Stanley Parker poussa un soupir de soulagement et tendit la main à Malko.

— Allez-y ! On va fermer les portes. Et faites bon voyage.

Malko monta l’escalier de la passerelle et gagna sa place en première, un siège au milieu. Son estomac continuait à être noué et, pourtant, tout semblait parfaitement normal. Avec deux fouilles dont une à main, par des professionnels, personne ne pouvait avoir passé une arme. C’était le principal. Quant aux bagages de soute, ils avaient été identifiés par les passagers.

Il essaya de se détendre durant la routine du décollage, mais son angoisse lui collait à la peau. Le DC 10 était bourré. Il se leva et commença à inspecter les travées, examinant tous les passagers. Il parcourut ainsi tout le côté gauche, puis revint sur ses pas, par la travée droite. Rien que des visages anonymes, inconnus. Des Noirs, des Blancs, des Libanais. Beaucoup d’entre eux passaient par Paris pour gagner Beyrouth.

C’est au premier rang de la seconde cabine qu’il éprouva un sentiment de malaise. Le passager près du hublot était jeune, de type moyen-oriental et regardait fixement devant lui, un peu comme un drogué. Il sortit un mouchoir de sa poche et s’essuya le visage, visiblement nerveux. Mais beaucoup de gens l’étaient en avion. Surtout s’ils ne le prenaient pas souvent. Malko allait s’éloigner quand une image flasha dans sa mémoire. Il se retourna et regarda à nouveau le jeune homme nerveux. Avec, quand même, un doute. Il l’aurait peut-être conservé si ce dernier n’avait pas appelé une hôtesse qui passait.

— Est-ce que je pourrais avoir un café ? demanda-t-il. Avec du sucre.

En un éclair, Malko revit l’arrière-boutique du torréfacteur de East Street, à Freetown, là où avait été probablement assassiné Eddie Connolly, le journaliste. Le passager du DC 10 était le Libanais qui s’y trouvait le matin où Malko y était venu.

Au lieu de regagner sa place, il demeura debout près des toilettes, comme s’il attendait qu’elles se libèrent… Faisant le point. Plus il l’examinait, plus il était certain de sa mémoire. Comment était-il monté à bord ? D’après la CIA, aucun passager n’avait de passeport sierra-leonais… Il avait donc trouvé sur place un autre document de voyage. Ce qui n’avait rien d’étonnant, le meurtre de Charlie ayant prouvé que les Chiites liés à l’Iran disposaient de complicités à Abidjan.

Pourquoi se trouvait-il à bord ? Était-il en train de fuir et de regagner le Liban ? Sa nervosité apparente pouvait s’expliquer par les recherches dont il se savait être l’objet.

En raison des contrôles, il ne pouvait être armé. D’ailleurs, vêtu d’un jean et d’un polo, il lui était impossible de dissimuler une arme sur lui et son bagage à main avait été fouillé…

Malko continua à l’observer dans la glace du galley. Il semblait de plus en plus nerveux… Il fit mine de se lever puis se rassit aussitôt. Malko recula : la porte des toilettes s’ouvrait. Pour ne pas éveiller les soupçons du Libanais, il dut y entrer à son tour. Il y demeura moins d’une minute et rouvrit. Son pouls s’accéléra brutalement le Libanais avait disparu.

D’un regard rapide, il parcourut la cabine. Personne. L’autre avait dû s’engouffrer dans les toilettes voisines…

Les deux portes arboraient le signal « occupé ». Il attendit, faisant semblant de chercher un magazine.

Une des portes se rouvrit. Une vieille femme en sortit et retourna s’asseoir. Le Chiite était donc dans l’autre. Malko allait regagner sa place lorsqu’une information lui revint en mémoire. Un certain dimanche, Karemba avait été à l’aéroport et on ignorait pourquoi… Or, ce jour-là, il se trouvait un DC 10 de la même compagnie à Freetown. La porte des toilettes se rouvrit et il se trouva nez à nez avec le Libanais…

Ce dernier avait un sac de toile à la main.


* * *

Leurs regards se croisèrent. À la lueur de panique dans celui du Libanais, Malko comprit que ce dernier l’avait identifié comme un ennemi. Tout se passa très vite. Le Libanais plongea la main dans son sac et en sortit un pistolet.

Malko bondit sur lui, lui écrasant le poignet contre le montant de la porte des toilettes. Un steward aperçut la scène. Lâchant son plateau, il se rua au secours de Malko. Le Libanais luttait farouchement, les pupilles dilatées, un rictus de haine déformant son visage. Il appuya sur la détente de son arme et la détonation fit sursauter tous les passagers… Touché en pleine poitrine, le steward tituba et s’effondra dans l’allée. En une fraction de seconde, ce fut la panique. Des passagers se levaient, des femmes hurlaient ; un autre steward et deux hôtesses se précipitaient.

Le terroriste cria quelque chose en arabe, luttant toujours avec Malko.

Ce dernier parvint à lui saisir le poignet à deux mains et à le lui tordre. Deux coups de feu partirent encore, et les projectiles s’enfoncèrent dans le plancher… Enfin, les doigts du Libanais lâchèrent l’arme qui glissa sous un siège. Le terroriste recula brutalement, Malko accroché à lui, et les deux hommes se retrouvèrent dans l’espace étroit des toilettes… Le Chiite mordit violemment au poignet Malko qui lâcha prise. Ce qui donna à l’autre le temps de saisir une grenade cachée dans le sac en toile… Une défensive ronde, de fabrication soviétique. Comme son arme, elle avait été dissimulée dans le gilet de sauvetage placé sous le siège de chaque passager et qui gisait maintenant par terre dans les toilettes.

Malko, de justesse, l’empêcha de retirer la goupille. Les mains jointes, les deux hommes luttaient comme des furieux, se cognant aux murs, sous les regards impuissants de l’équipage cabine, accouru.

D’un violent coup de tête, le terroriste étourdit Malko, lui ouvrant l’arcade sourcilière. Groggy, celui-ci le vit passer le doigt dans l’anneau de la goupille pour l’arracher. Ensuite, il suffisait de relâcher la cuillère pour provoquer l’explosion de l’engin… Il entendit vaguement le haut-parleur annoncer que l’appareil retournait sur Abidjan, conseillant aux passagers de ne pas s’affoler. Comme si ce n’était pas déjà fait.

D’un effort désespéré, Malko expédia un formidable coup de pied au Chiite et l’atteignit au bas-ventre. Une fraction de seconde avant que la goupille ne soit complètement arrachée. Sous le coup de la douleur, les doigts du terroriste s’ouvrirent, laissant échapper la grenade droit dans la cuvette des WC.

Un athlétique steward se rua dans l’espace exigu et saisit le Chiite par les cheveux, le tirant dehors. À moitié KO, il n’opposa que peu de résistance. Aussitôt, deux membres de l’équipage le maîtrisèrent, l’allongeant à terre. Il écumait, hurlait des injures en arabe et en anglais sous les yeux des passagers terrifiés. À quelques mètres du steward en train d’agoniser… Le commandant de bord surgit, les traits tendus.

— Il est maîtrisé ?

— Oui, dit Malko, mais il a jeté une grenade dans les toilettes et la goupille tient par un fil.


* * *

My god !

Stanley Parker tenait d’une main tremblante le télex transmis par la tour de contrôle.

— Tentative de détournement à bord du vol 675. Un mort. Explosif non neutralisé. L’appareil a fait demi-tour sur Abidjan. Les services de sécurité sont en alerte.

— Mais qu’est-ce qui s’est passé ? demanda le chef de Station d’Abidjan, atterré. Nous avons soixante-huit citoyens à bord, dont dix-sept diplomates. C’est une horreur…

Stanley Parker posa le télex.

— Filons à l’aéroport. Et prions.


* * *

Le terroriste, toujours allongé par terre, s’était calmé, plongé dans une profonde torpeur. Les passagers, déchaussés, ceintures attachées, bien calés sur leurs sièges, s’attendaient au pire. Près des toilettes, un steward veillait, fixant la lunette comme si cela avait pu empêcher la grenade d’exploser… Le corps de son collègue avait été transporté dans le galley avant, pour être hors de vue des passagers. Un silence de mort régnait dans l’appareil…

Malko, debout derrière le commandant de bord, demanda :

— Nous sommes à quelle distance d’Abidjan ?

— Vingt minutes environ.

— Il n’y a aucun terrain de dégagement ?

— Aucun.

Il avait un sacré poids sur l’estomac. La goupille avait été à moitié arrachée par le terroriste. Il suffisait d’une vibration pour qu’elle s’enlève complètement, déclenchant l’explosion de l’engin. Et très probablement la destruction lu DC 10 les commandes passaient sous les toilettes…

À neuf cents à l’heure, le gros appareil fonçait vers le sud. Il n’y avait rien d’autre à faire qu’à prier… Le second se retourna vers Malko.

— Comment ces armes ont-elles été introduites à bord ? Tout le monde a été fouillé…

— Elles y étaient déjà, dit Malko. Je pense qu’elles ont été dissimulées à Longi Airport, en Sierra Leone, la semaine dernière, lorsque cet appareil y a fait escale. Un des policiers du CID sierra-leonais travaillait avec les terroristes. Pour lui, c’était très facile…

— Il a fallu qu’ils aient des complicités dans la compagnie, remarqua le commandant de bord, pour connaître la programmation de l’appareil.

— Ils en ont, dit Malko.

Il regarda le ciel étoilé au-dessus d’eux. Ils se trouvaient à la verticale de Bouaké. En bas, c’était la forêt, sans une lumière. S’ils avaient à y atterrir en détresse, cela ferait 320 morts… Dont lui.

Les Iraniens avaient bien monté leur coup. Avec une « chèvre » – Nabil Moussaoui – et le véritable acteur : l’homme qui gisait allongé sur le plancher du DC 10. Les minutes s’écoulaient avec lenteur. Enfin des lumières apparurent dans le lointain, droit devant. Abidjan. Le commandant de bord annonça aussitôt dans le micro :

— Mesdames et messieurs, nous allons nous poser à Abidjan dans quelques instants. Demeurez calmes. Tout danger est désormais écarté…

Une salve d’applaudissements et de cris de joie salua son annonce.


* * *

— Le vol 675 va se poser en priorité-détresse, annonça la tour. Sur la 034. Services de sécurité, à vos postes.

L’aéroport d’Abidjan grouillait de soldats et de policiers. Des véhicules avec des mitrailleuses gardaient tous les accès de la piste. Des projecteurs fouillaient la nuit. Des ambulances, des voitures de pompiers, des jeeps de police attendaient à l’entrée de la piste 034.

Les phares blancs du DC 10 trouèrent la nuit. Il semblait presque immobile. Stanley Parker avait du mal à respirer. Tant qu’il n’aurait pas touché le sol, tout pouvait encore arriver. L’ambassadeur des États-Unis, arraché à un dîner officiel, était là en smoking blanc, entouré de ses gardes du corps, debout près de sa Cadillac.

Volets baissés, le DC 10 toucha la piste avec douceur. Aussitôt, plusieurs voitures de pompiers se lancèrent à toute vitesse le long du bitume, lances en batterie, suivies par des véhicules de police… Deux mille mètres plus loin, le DC 10 s’arrêta enfin, les pneus fumants. Quatre portes s’ouvrirent en même temps et les toboggans de secours se déroulèrent aussitôt. Les premiers passagers touchèrent le sol au moment où les pompiers atteignaient le gros porteur. Suivis de la Cadillac de l’ambassadeur et de la Ford de la CIA.

— Malko, Malko !

Stanley Parker agitait les bras désespérément. Il récupéra Malko au bas du premier toboggan avant, le secouant comme un prunier.

— Qu’est-ce qui s’est passé ?

Malko le lui expliqua au milieu des gens qui s’enfuyaient dans tous les sens, pieds nus, affolés. Courant vers l’aérogare. Des policiers se ruèrent sur une passerelle et s’emparèrent du terroriste. Stanley Parker était partagé entre la fureur et la stupéfaction.

— Mais comment a-t-on pu cacher une arme et des explosifs à bord de cet avion ? Il est fouillé de fond en comble à chaque escale. Y compris tous les placards des toilettes.

— C’était dissimulé dans un gilet de sauvetage, expliqua Malko. Il y en a 320 à bord. Impossible de les défaire tous à chaque examen de l’appareil. Cela suppose une coordination parfaite entre les bases terroristes de Sierra Leone et d’Abidjan. Une place avait été retenue au nom de ce terroriste, en précisant le rang et le numéro.

— Mais, même à Longi Airport, cet appareil est sous la protection des services de sécurité.

— N’oubliez pas que Karemba en faisait partie, lui rappela Malko. Pour lui, c’était facile de monter à bord et de dissimuler l’explosif et l’arme dans le gilet de sauvetage désigné.

— Il faudra s’en souvenir, fit l’Américain. Si vous n’aviez pas été à bord, le détournement réussissait probablement.

Malko comprenait maintenant parfaitement le choix de la Sierra Leone qui l’avait intrigué depuis le début. Il donnait aux Iraniens la possibilité de placer l’explosif et les armes à bord du DC 10 ; les terroristes pouvaient s’y procurer de faux papiers, faisant attribuer l’attentat à la communauté chiite locale, détournant les soupçons de l’Iran et ensuite s’infiltrer dans le pays où ils allaient agir, la Côte d’ivoire. Avec beaucoup plus de facilité que s’ils arrivaient directement de Beyrouth…

Ils s’approchèrent du terroriste auquel on avait passé les menottes… Il cracha dans la direction de Malko, se débattant encore. Impossible de lui tirer un mot… Les derniers passagers s’enfuyaient. Ne restait à bord que l’équipage… Malko tamponnait son arcade sourcilière ruisselante de sang.

Le Chiite fixait le DC 10, comme si son regard avait pu le détruire. Résistant aux hommes qui voulaient l’entraîner. Intrigué, Malko l’observa, déchaînant sa rage de nouveau. Il allait ouvrir la bouche pour le questionner quand une terrible explosion les fit tous sursauter.

Une gerbe de feu s’éleva de l’arrière du DC 10 à la hauteur de la soute, enveloppant aussitôt l’appareil. En quelques instants, ce fut un brasier, gagnant les ailes et l’avant.

Holy Cow ! s’exclama Stanley Parker, abasourdi.

Avec des hurlements sinistres, les voitures de pompiers revenaient à toute vitesse. Des jets de neige carbonique attaquèrent le brasier, sans parvenir à l’éteindre.

Les membres de l’équipage apparurent en haut de la passerelle et se jetèrent vers le sol. Tout le monde reculait devant la chaleur terrifiante.

Stanley Parker se tourna vers Malko.

— C’est la grenade ?

— Non, elle était beaucoup plus vers l’avant…

— Quoi, alors ?

— Ce terroriste, celui que nous appelons Mansour Kadar. Il y avait sûrement des explosifs dans sa valise…

— Mais c’était du suicide… s’exclama l’Américain.

— Il y a deux hypothèses, fit Malko. Ou bien il était au courant et la présence de ces explosifs, une fois l’appareil posé dans le lieu de son choix aurait donné encore plus de poids à ses exigences. Ou bien, on les a mis à son insu. Pour être certain de réussir une action terroriste d’envergure. Je pense que son interrogatoire nous éclairera.

Diabolique.

C’était le seul cas de figure qu’on ne pouvait contrer totalement : une action suicide. Il était matériellement impossible de fouiller tous les bagages de soute. Certains explosifs étaient indétectables. Dieu merci, c’était un cas rarissime.

Ils reculèrent encore, incommodés par la chaleur. Il y eut soudain une bousculade et ils virent le terroriste chiite échapper à ses gardiens et s’enfuir en courant vers l’appareil en flammes. Il passa tout près de Malko et ce dernier put voir ses yeux fous, son expression hallucinée. Des coups de feu claquèrent, il trébucha et tomba, n’arrivant pas au brasier. Dans le concert des sirènes de police et des hurlements de pompiers, on remarqua à peine son geste…

L’ambassadeur des États-Unis passa une main sur son visage, la mâchoire tremblante.

— Que Dieu nous préserve de ces fous ! murmura-t-il.

Les flammes atteignirent le corps du terroriste qui s’enflamma aussitôt, petit brasier à côté du grand. Sans un mot, Malko et Stanley Parker gagnèrent la voiture de la CIA. Sachant que le combat ne serait jamais fini.

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