Chapitre IX

Malko s’engagea sur Lumley Beach et mit pleins phares. Plusieurs voitures étaient stoppées le long de la plage, face à la mer. Des Libanais en train de copuler… Il dut aller presque jusqu’à l’hôtel Atlantic pour trouver Eddie Connolly. Le journaliste faisait les cent pas à côté de sa voiture, fumant une cigarette. Les phares de la 505 éclairèrent une silhouette à l’intérieur de la Toyota. Bernice, la petite journaliste déjà rencontrée au News-Room. Eddie Connolly joignait l’utile à l’agréable.

Good evening, dit le Créole, très courtoisement. J’avais peur que vous ne veniez pas…

— Vous avez quelque chose d’important ? interrogea Malko.

L’autre se rengorgea avec un petit rire satisfait.

Indeed, yes… J’ai eu de la chance. J’ai quelques amis à l’Immigration. Grâce à eux, j’ai appris que Karim Labaki a demandé une faveur pour deux de ses amis.

— Quelle faveur ?

— Des papiers pour sortir officiellement du pays. Sous une fausse identité.

Le cœur de Malko battit plus vite. Si les terroristes avaient besoin de faux papiers, c’est qu’ils se préparaient à l’action.

— À quels noms ?

— Je l’ignore encore. Mais je dois le savoir demain. Par mon ami.

Malko dissimula son excitation. Cette fois, il s’approchait du but. Ces documents devaient concerner les deux terroristes chiites que le Libanais cachait chez lui. Ils étaient donc sur le point d’être « activés ». S’il arrivait à connaître l’identité sous laquelle ils voyageaient, cela permettrait de les neutraliser hors de la Sierra Leone.

— C’est très bien, dit Malko. Vous ne le regretterez pas.

Eddie Connolly écrasa sa cigarette à terre avec un sourire plein d’humilité et continua d’une voix timide :

— Vous ne m’aviez pas dit que l’on avait tenté de vous assassiner.

— Comment l’avez-vous appris ?

— Par un de mes informateurs au CID.

— Vous savez qui a fait le coup ?

Le journaliste secoua la tête.

— Pas avec certitude. On dit que c’est Karemba. Pour le compte de Karim Labaki.

Un ange passa, emporté par la brise tiède. Eddie Connolly se gratta la gorge. Mal à l’aise.

— Faites attention, vous aussi, conseilla Malko. Le journaliste eut un geste fataliste.

— J’ai déjà été menacé, dans d’autres affaires. Mais dans notre pays on n’aime pas tuer les journalistes. Je suis très connu en Sierra Leone. Même Mr Labaki doit tenir compte de cela. Le Président Momoh m’aime bien… Ici, nous avons une tradition de liberté de la presse.

Une voiture s’arrêta près d’eux et éteignit ses phares. Cette fois, le pouls de Malko ne gagna pas un battement. Eddie Connolly jeta un coup d’œil en direction de sa voiture.

Indeed, je vais devoir vous quitter, annonça-t-il avec son urbanisme exquis. Je pense obtenir cette information demain en fin de journée. Nous pouvons nous revoir ici, vers la même heure.

— Parfait, dit Malko. Si vous l’obtenez, je vous promets une prime de deux mille dollars.

Les yeux d’Eddie Connolly cillèrent derrière ses grosses lunettes et il émit un rire un peu gêné.

— C’est une somme très importante. Je ferai de mon mieux.

Il tendit la main à Malko avant de remonter dans sa voiture.

— À demain.

Malko fit demi-tour et repartit vers Aberdeen. Il y avait maintenant des dizaines de voitures arrêtées le long de la route. Ça flirtait à tout va sur toute la plage.

Dans le hall du Mammy Yoko, les habituelles putes bayaient aux corneilles… À peine Malko était-il dans sa chambre qu’on frappa à la porte. Méfiant, il alla ouvrir, le Colt dissimulé sous une serviette. Pour se trouver nez à nez avec une somptueuse Noire, moulée dans une robe de taffetas rouge fluo.

— Bonsoir, patron, lança-t-elle avec un sourire découvrant d’énormes dents blanches de cannibale. C’est l’amour qui passe.

Et le Sida avec. C’était une Guinéenne. Le régime fou de Sekou Touré en avait poussé quatre cent mille à venir s’installer en Sierra Leone. Malko déclina poliment. Il avait hâte d’être plus vieux de vingt-quatre heures.


* * *

— Deux mille dollars ! s’exclama, choqué, Jim Dexter. Mais vous savez combien je lui donne à Eddie ? Un jerrican d’essence par semaine. Et encore, il me baise les mains.

Le chef de Station de la CIA était outré par la munificence de Malko. Il ajouta, réprobateur :

— Je dois rendre compte de mon budget, moi.

— Écoutez, Jim, fit Malko, agacé de cette pingrerie, vous avez vu ce qui m’est arrivé ? Connolly risque sa peau en nous aidant. Et vous avez un « finding » du Président des États-Unis pour vous couvrir. C’est moi, le chef de mission, et j’estime que si pour quelques milliers de dollars nous évitons une catastrophe majeure, ce n’est pas un mauvais deal.

— Pour une somme pareille, il risque de vous inventer n’importe quoi…

— Je ne crois pas, dit Malko et je vérifierai. Nous sommes assis sur une bombe qui fait tic-tac… J’aimerais bien la désamorcer.

— Et Wild Bill ? Vous avez de ses nouvelles ?

— Non, je n’ai pas besoin de lui. Pour l’instant.

Jim Dexter eut un soupir résigné.

— Espérons que Connolly va vous amener du concret.

— Nous ferons le point demain matin, dit Malko.

Il n’avait plus qu’à tuer le temps jusqu’au soir. Eddie Connolly était désormais son seul espoir, Bambé, la standardiste, étant débranchée…


* * *

Chaque fois que des phares apparaissaient à l’entrée de Lumley Beach, le cœur de Malko battait un peu plus vite. Mais aucune voiture ne s’arrêtait à sa hauteur. Il consulta sa Seiko-quartz pour la centième fois minuit et demi. Les derniers Libanais venus assouvir leur lubricité à bon marché avaient disparu. Quelques silhouettes inquiétantes rôdaient dans l’ombre de la plage, mais ne s’étaient pas approchées.

Que faisait Eddie Connolly ?

L’absence de téléphone rendait la vie difficile à Freetown… Il attendit encore un quart d’heure puis décida de retourner au Mammy Yoko. Le hall et le bar étaient déserts. Aucun message du journaliste. Même les putes étaient parties se coucher. Il ressortit, inspecta le casino Bitumani et le Leone.

Sans plus de succès.

Il commençait à être sérieusement inquiet. La perspective des deux mille dollars aurait dû faire donner signe de vie à Eddie Connolly.


* * *

Malko gagna le parking du Mammy Yoko sous une pluie battante. Une brutale averse avait fondu sur Freetown, queue de saison des pluies.

Au moment où il montait dans sa 505, un Noir surgit de la paillotte où s’abritaient les chauffeurs de taxi.

— Mr Connolly vous attend à la station Texaco, à Congo Town, dit-il.

Malko, soulagé d’un coup, lui donna vingt leones et se glissa au volant.

À l’entrée de Congo Town, il dut ralentir ; comme chaque matin, une file de voitures s’étirait le long de la station Texaco, faisant la queue pour l’essence. Tandis qu’il la contournait, un personnage étrange surgit devant son capot et il dut freiner brutalement pour l’éviter. Un krio tout de noir vêtu, comme un croquemort, avec un col cassé, une cravate et un chapeau, malgré la chaleur étouffante. L’air égaré, le vieil homme avançait en faisant des signes de croix, le regard halluciné. Émergeant d’un attroupement au pied du mur où s’étalait en énormes lettres rouges le slogan Go ! Go ! Go ! Texaco.

Intrigué, Malko se gara en face des pompes vides et joua des coudes pour fendre la foule des badauds agglutinés autour de quelque chose qu’il ne pouvait encore apercevoir. Parvenu au premier rang, il s’immobilisa, tétanisé, regrettant sa curiosité.

Un cadavre était étendu sur le ciment, entièrement nu. Il reconnut Eddie Connolly à son énorme verrue sur la pommette. Ses lunettes avaient disparu et l’état de son cadavre soulevait le cœur. Deux affreuses blessures sanguinolaient de part et d’autre de sa gorge : on lui avait tranché et arraché les deux carotides, le vidant comme un lapin…

Le regard de Malko descendit jusqu’à la poitrine du mort. Une hideuse blessure laissait voir le nacré des côtes, une grande partie du sein gauche avait été découpée, comme un morceau de jambon, laissant les muscles et la graisse jaunâtre à l’air. Ce n’était pas tout : le bas-ventre n’était qu’un trou sanglant. On avait détaché le sexe et les testicules, ouvrant une plaie sanguinolente où les mouches s’agglutinaient… En regardant plus attentivement, il remarqua encore un autre détail horrible : le petit doigt de la main droite avait été sectionné, ainsi que le pouce de la main gauche…

Eddie Connolly n’avait pas été mutilé et tué sur place. Il n’y avait même pas de sang sur le ciment. Une vague d’horreur submergea Malko. Après la douce Seti, Eddie Connolly. Dans les deux cas, le meurtre avait été préparé.

Que signifiait cette mascarade sanglante ? Il y avait sûrement une raison spécifique à cette boucherie. Il regarda les visages figés de terreur des Noirs autour de lui. Pas un mot… Des femmes murmuraient des incantations à voix basse. La foule avait laissé un cercle vide autour du cadavre, comme s’il en émanait des ondes néfastes. Personne ne songeait à recouvrir le corps.

Malko recula, réprimant une abominable envie de vomir. Quelques instants plus tard, une voiture bleue du CID s’arrêta derrière lui et deux policiers noirs en descendirent sans se presser.

Il s’éloigna et remonta dans sa 505. Eddie Connolly avait emporté son information dans l’autre monde. Encore sous le choc, il conduisait machinalement, se remémorant sa dernière entrevue avec le journaliste. Il revit soudain Bernice, la journaliste noire, assise à côté de lui. Peut-être pourrait-elle lui dire ce qui s’était passé. Si rien ne lui était arrivé. Pris d’une nouvelle angoisse, il accéléra, fonçant vers le building « chinois ».


* * *

— C’est de la sorcellerie, ils coupent le doigt pour être sûrs qu’il est mort, expliqua Bernice d’une voix bouleversée.

La petite journaliste ravalait ses larmes. Malko l’avait trouvée devant sa machine dans la News Room. Ignorant encore la mort affreuse d’Eddie Connolly. Bouleversée par la nouvelle, elle avait tenu à retourner à la station Texaco, mais il n’y avait plus aucune trace du meurtre. Un fourgon de la police avait déjà enlevé le corps du journaliste. Installée avec Malko à la terrasse du Gem, le restaurant libanais qui appartenait à Labaki, elle donnait à présent libre cours à son chagrin. Malko attendit qu’elle se calme avant de dire :

— Je veux trouver les assassins d’Eddie, il faut m’aider. Vous l’avez vu hier ?

Elle renifla.

— Oui, il est passé au bureau dans l’après-midi, vers cinq heures et demie. Il avait rendez-vous au Centre culturel iranien avec un de ses informateurs.

— Qui devait-il rencontrer ? Vous le savez ?

— Oui. Eddie me disait tout, fit fièrement Bernice. Il avait rendez-vous avec un ancien ministre de l’intérieur : Festus M’Bompa.

— Pourquoi au Centre Culturel iranien ?

— M’Bompa est musulman. Chiite. Il a des contacts avec les Iraniens.

— Et c’était à propos des deux Chiites ?

— Oui. Eddie était très excité, il m’a dit qu’il allait toucher beaucoup d’argent.

— Et ensuite ?

— Il devait aller acheter du café. Chez des Libanais dans East Street. Et puis venir me retrouver au bureau.

— Il n’est pas venu ?

— Non. J’ai pensé qu’il avait été retardé, qu’il était rentré directement chez lui.

Le journaliste avait donc été tué entre le moment où il avait vu son informateur et le rendez-vous prévu avec Bernice. Seulement, on ne l’avait pas massacré en pleine rue. Il avait fallu l’enlever et le tuer ensuite dans un endroit discret.

— Et sa voiture ? demanda Malko.

— Il l’avait prise.

— Elle est bien quelque part, dit Malko. J’aimerais faire un tour dans la zone où il avait rendez-vous. Nous trouverons peut-être un indice.

Ils descendirent Siaka Stevens Street pour garer la 505 au coin de East Street et partirent à pied. Le quartier était extrêmement animé, et on y imaginait mal un enlèvement ; au bout de la rue en pente, on apercevait la mer.

C’est dans une impasse donnant sur Howe Street qu’ils découvrirent la Toyota d’Eddie Connolly. L’essieu arrière reposait sur deux cubes de bois on avait déjà volé les roues ! Le véhicule était fermé à clef.

Bernice éclata en sanglots et s’effondra sur le capot en gémissant comme s’il s’agissait du corps de son amant assassiné. Malko essayait de reconstituer ce qui s’était passé. Eddie Connolly avait garé sa voiture pour partir à pied à son rendez-vous.

Il était peu probable qu’il ait été enlevé au Centre culturel iranien, surveillé en permanence par le CID. Donc, l’enlèvement s’était produit plus tard. Il redressa Bernice.

— Je voudrais voir la boutique où Eddie achetait son café.

Ils descendirent jusqu’à East Street et la journaliste le guida jusqu’à une échoppe. Une sorte de petite épicerie minable.

Malko sentit son sang se liquéfier : c’était devant cette boutique que s’était arrêtée la Mercedes 500 de Karim Labaki, le jour où il l’avait rencontré par hasard devant le Centre Culturel iranien !

Il n’eut pas le temps de retenir Bernice, inconsciente de sa découverte. Elle poussait déjà la porte et il dut la suivre, sous peine d’éveiller les soupçons.

L’intérieur était encombré de sacs de café, de semoule, de farine, de manioc. Des cartons s’empilaient jusqu’au plafond. Il régnait une agréable odeur de café fraîchement torréfié, effaçant les autres senteurs. Le Libanais barbu qui officiait à la caisse leva la tête et leur adressa un plat sourire commercial. Bernice allait poser une question quand Malko la coupa à temps.

— Je voudrais une livre de café frais, fit-il.

Son regard fit taire Bernice. Le Libanais se leva et disparut dans l’arrière-boutique. Malko examina le bric-à-brac quelques instants, puis, nonchalamment, comme un client curieux, écarta le rideau séparant la boutique du local où on torréfiait le café. Il eut le temps d’apercevoir deux Noirs occupés à remplir des sacs de café, un jeune homme en jean, vraisemblablement libanais qui lisait perché sur un tabouret, et le patron en train de torréfier sa commande. Ce dernier leva la tête et lui adressa un sourire poli :

— J’arrive. Les clients ne sont pas autorisés ici, Sir.

Malko battit en retraite. Bernice semblait tassée sur elle-même, assise sur un sac de semoule, reniflant et se tamponnant les yeux.

Dehors la vie continuait, sous la chaleur écrasante, mais Malko ne pouvait effacer de son esprit le spectacle hideux du corps d’Eddie Connolly charcuté selon Dieu sait quelles règles de sorcellerie.

Ils ressortirent avec un paquet de café odorant. Bernice dit soudain :

— C’est curieux, il y a toujours des affiches de Khomeiny dans cette boutique. Aujourd’hui, il n’y a plus rien…

C’était le petit détail qui verrouillait la sinistre hypothèse de Malko. Il se retourna, contemplant la boutique à l’aspect banal.

— Il allait souvent acheter du café ?

— Tous les lundi.

Ils regagnèrent la 505.

— Ce Festus M’Bompa, où habite-t-il ? demanda Malko.

— Sur la route de Lakka, à la sortie de la ville, en face de Juba Barrack. Mais il ne dira rien.

— Cela dépend, dit Malko.

Le meurtre brutal du journaliste l’avait empli d’une fureur froide. Ses adversaires – Libanais et Chiites – se moquaient de lui ouvertement, certains de l’impunité. Ils retraversèrent Freetown, Bernice prostrée, essuyant de temps à autre une grosse larme.

Malko l’arrêta devant le building « chinois ».

— Ceux qui ont tué Eddie ne l’emporteront pas au paradis, promit-il.

Bernice hocha tristement la tête :

— Ils sont trop forts. Ils vous tueront vous aussi. Vous devriez quitter la Sierra Leone.

Malko ne répondit pas. Il fit demi-tour, méditant ces nouvelles données. C’est dans cette boutique de East Street qu’Eddie Connolly avait sans doute été kidnappé et assassiné. Là également que s’était arrêtée la Mercedes 500 de Karim Labaki, le jour où il l’avait rencontré devant le Centre Culturel iranien.

Il accéléra, animé d’une sombre détermination. Il était temps de passer à l’offensive.


* * *

— La prochaine fois, ce sera vous qu’on retrouvera coupé en morceaux, lança le chef de Station de la CIA.

— Les Iraniens et Labaki préparent quelque chose et ne reculent devant rien pour éliminer ou décourager tous ceux qui s’en approchent trop, répliqua Malko. Si nous abandonnons, on leur laisse la voie libre.

Jim Dexter lui adressa un regard inquiet.

— Malko, nous ne sommes pas à Chicago. Le Président a recommandé une action préventive, pas un massacre. Je suis obligé de rendre compte au DDO. En attendant, vous vous mettez en roue libre…

— C’est exactement ce que souhaitent les Iraniens, dit Malko.

— Bon, concéda l’Américain. Allons voir Songu. On peut peut-être le décider à agir. Il aimait bien Eddie.

— Il ne fera rien, objecta Malko, mais si vous y tenez…


* * *

L’Oldsmobile de l’Américain avait du mal à se frayer un chemin dans la masse des piétons occupant la chaussée. L’immeuble de la police grouillait d’animation. Sheka Songu les reçut immédiatement. Il avait le visage grave et sembbit bouleversé.

— Vous venez pour le meurtre d’Eddie Connolly, dit-il d’emblée.

— Oui, dit Malko. J’avais rendez-vous avec lui hier soir. Je pense qu’on l’a tué pour l’empêcher de me dire ce qu’il avait découvert. Et pour m’intimider.

Une lueur apeurée passa fugitivement dans les yeux du policier noir. Il s’assit derrière son bureau et alluma une cigarette, avant de dire lentement :

— Je crois que vous vous trompez… J’ai vu le corps de mon malheureux ami. Et les mutilations dont il a fait l’objet. Au cours des derniers mois, nous avons eu deux cas similaires à Freetown. Ils ont été assassinés par des gens venus de la Guinée-Bissau.

— Pourquoi ? demanda Malko, sceptique.

— Ce sont des sorciers, expliqua Songu. Ils ont besoin de certaines parties du corps humain pour préparer des potions magiques qu’ils revendent ensuite très cher dans les villages.

— Mais pourquoi Eddie Connolly ?

— Il était journaliste, il faisait probablement une enquête sur ces pratiques. Il a dû rencontrer ces gens qui ont pris peur. Je ferai tout pour les retrouver.

— Alors, vous ne croyez pas aux Libanais, à un meurtre télécommandé par Karim Labaki ? demanda Malko.

Sachant déjà que le policier mentait. Si Connolly avait effectué une enquête dans les milieux de la sorcellerie, Bernice l’aurait su.

Sheka Songu eut un pâle sourire.

— La personne dont vous venez de citer le nom ne se livre pas à la sorcellerie.

Il semblait mal à l’aise. Le regard fuyant posé parfois sur ses photos du Pape, qui constellaient les murs du bureau.

Malko sentit qu’il ne démordrait pas de sa thèse. Jim Dexter et lui quittèrent son bureau. À peine dans l’escalier, l’Américain explosa.

— C’est un foutu menteur ! Il sait très bien pourquoi Connolly a été tué. Seulement, il crève de frousse. Karim Labaki est passé par là. Ils ont liquidé Connolly de cette façon pour faire croire à un crime rituel. Sinon, le meurtre d’un journaliste risquait de faire des vagues…

Malko était lui aussi ivre de rage. Il s’installa dans l’Oldsmobile du chef de Station de la CIA qui demanda :

— Qu’allez-vous faire ?

— Changer de méthodes, fit sombrement Malko qui commençait à penser que Wild Bill Hodges avait raison.

Pour dialoguer avec les Libanais, il fallait un lance-flammes.

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