La sonnerie syncopée des téléphones anglais avait toujours énervé Malko. Et celui-là sonnait depuis un bon moment… A côté de lui, Angelina Fraser l’observait, les jambes croisées, enfoncée dans un canapé très bas. La pluie commençait à tomber, claquant sur les vitres. Bandar Sen Begawan dormait. Ils n’avaient pas croisé une voiture en revenant de Jerudong. Malko avait préféré utiliser le téléphone d’Angelina plutôt que celui du Sheraton… Plus discret.
Il allait raccrocher quand une voix agacée fit « allô ». Il aurait embrassé le récepteur !
— Mandy !
A Londres, avec le décalage horaire de huit heures en moins, il était trois heures de l’après-midi. Le glapissement qui suivit lui déchira l’oreille.
— Quel est le foutu connard qui me réveille à une heure pareille ?
En dépit de son ascension sociale et financière, Mandy Brown, ex call-girl, maîtresse d’un puissant mafioso, n’avait pas oublié ses origines populaires. Malko se hâta de la rassurer.
— C’est moi, Malko. Tu dors encore ? Il est trois heures.
— Putain ! fit-elle. Je me suis couchée à sept heures matin. Tu es arrivé à Londres et tu as envie de me sauter. Ça ne pouvait pas attendre un peu ?
La Reine des Poètes.
— Non, fit Malko. Je ne suis pas à Londres et je ne pensais pas te trouver. Qu’est-il arrivé à ton de soupirant… ?
Il l’avait abandonnée deux ans plus tôt dans les bras d’un vieux Yéménite milliardaire fou d’elle, Sanaa.
— Ben, justement, fit-elle, il a rendu son dernier soupir. A cause de moi, il paraît. Juste quand il allait me reconstruire le temple de la Reine de Saba rien que pour moi, tu te rends compte…
Il y avait quand même un peu de nostalgie dans sa voix. Toujours fraîche, Mandy, en dépit de ses avatars… Malko l’entendit bâiller et dire d’une voix soudain langoureuse.
— J’aimerais bien que tu me fasses un petit câlin, tu peux vraiment pas venir… ?
Elle vouait une adoration sans bornes à Malko qui lui avait sauvé la vie, fait gagner une fortune et procuré son premier orgasme. Celui-ci prit son souffle c’était le moment de l’estocade.
— Non, répliqua-t-il, mais toi, tu peux me rejoindre…
Il attendit sa réaction. Qui ne tarda pas…
— Dis donc, protesta Mandy d’une voix soudain aigre, tu ne serais pas en train de me monter un turbin ? Quand tu m’appelles comme ça, c’est toujours pour me foutre sur des histoires pas possibles. Où tu es ?
— A Brunei.
— Ah bon, fit-elle calmée, ronronnante, la voix brusquement chargée d’érotisme. Oh, ça me fait plaisir de te causer. Tu sais, le vieux Zag, il a quand même été gentil. Bien sûr, il n’a pas fini le palais, mais il m’a quand même filé quelques petites pierres. Il y a un diamant jonquille de vingt carats… Et puis une Silver Phantom. Il l’avait commandée à Londres, le pauvre, il n’a pas eu le temps de la voir. Mais on pourra baiser dedans… Alors on se voit quand ?
— Le temps que tu viennes.
— Ben, je peux être là ce soir.
— Je dirais plutôt demain soir.
— Eh ! protesta Mandy, plus ronronnante que jamais, je ne vais pas y aller en train en Hollande.
— Brunei n’est pas en Hollande, corrigea gentiment Malko. C’est au nord de Bornéo.
— Et alors ?
— Alors, Bornéo c’est à quinze mille kilomètres de Londres.
— Un hurlement de rage secoua le récepteur. Salopard ! Tu me mènes en bateau. Et crac, elle avait raccroché. Angelina éclata de rire… Malko, patient, refit le numéro. Cette fois, Mandy l’accueillit par une bordée d’injures. Dès qu’elle fut un peu calmée, il précisa suavement. – Mandy, j’ai besoin que tu me rendes un service. Un grand service…
— Qu’est-ce que tu as encore comme coup pourri ? lança-t-elle. Je n’ai pas envie de finir comme Sharnilar[24]. Et les Arabes, j’en ai ras le pompon.
— Ici, il n’y a pas d’Arabes, fit-il. Juste des Malais et des Chinois…
— C’est un zoo quoi, fit Mandy la Salope, avec un racisme blasé. Ecoute, quand tu viens à Londres, tu m’appelles et je t’envoie ma Rolls. Tchao !
Et crac, elle avait de nouveau raccroché. Patient, Malko rappela. Angelina se tordait.
— Qu’est-ce que tu veux encore ? hurla Mandy la Salope. Tu as fini de me pourrir la vie !
— Mandy, coupa Malko, tu n’as pas envie de connaître l’homme le plus riche du monde ?
La colère de Mandy tomba de plusieurs crans.
— Qui c’est ?
— Le Sultan de Brunei. Il a trente milliards de dollars d’économies… Et quatre millions de dollars en revenu à l’heure.
— Et alors, il ne va pas m’en faire cadeau…
— II suffit que tu les écornes, remarqua Malko
Mandy Brown soupira.
— Ecoute, j’ai un mec ici, beau comme un dieu, qui a décidé de ne plus être pédé à cause de moi. Il a un château de deux cents pièces et il veut m’épouser…
— Tu lui as parlé de ton passé ? demanda gentiment Malko.
Mandy Brown mit bien trente secondes à comprendre le message.
— Ordure ! glapit-elle. Tu me casserais mon coup. Je veux finir duchesse, moi ! Tire-toi.
Ça tournait mal. Malko n’avait plus qu’une carte à jouer.
— Mandy, fit-il. Nous avons un vieux compte. Souviens-toi, un jour, à Honolulu, je t’ai sauvé la vie… Je suis en danger de mort.
Il y eut un long silence, puis Mandy Brown demanda d’une toute petite voix.
— C’est vrai ?
— Oui. Et tu es la seule à pouvoir m’en sortir. Re-silence. Puis Mandy Brown lança :
— Tu es un enculé ! C’est sûrement pas vrai… Mais tu sais bien que je ne peux pas te dire non. Alors, c’est où ton truc ?
— Je vais te faire porter un billet d’avion, jura Malko.
— Dis donc, fit-elle méfiante, tu me jures que ce n’est pas des Arabes…
— Juré.
— Bon. Viens me chercher à l’aéroport.
— Impossible. Je t’enverrai une amie. Elle est charmante.
Nouvelle explosion.
— Ça ne va pas, non ! Je veux que tu viennes.
— Impossible, répéta Malko. Réveille-toi, maintenant, tu vas sûrement prendre l’avion dans la journée. J’ai hâte que tu sois là. Tu verras, c’est très amusant, Brunei…
— Il y a une plage ?
— Immense !
— Je suis une conne, fit-elle, découragée. Je te jure que c’est la dernière fois que tu me fais le coup…
Elle raccrocha violemment.
— C’est moi qui vais accueillir cette tigresse ? demanda Angelina.
— Elle sera adorable, promit-il. En ce moment, elle s’étiole… Tant qu’elle ne ruine pas un homme ou qu’elle ne brise pas un cœur, elle s’ennuie. Et c’est une coriace.
— Tu crois qu’elle va plaire ici ?
Malko sourit.
— Si elle ne plaît pas, je change de métier…
Mandy la Salope était son dernier atout. Il n’avait pas encore osé annoncer à Angelina que son suspect numéro un était Hadj Ali, son amant. Il allait bien falloir s’y résoudre, pourtant. Comment réagirait la jeune femme ?
Le prince Mahmoud écarta d’un coup de klaxon impératif une voiture qui ne se garait pas assez vite. Jalan Tutong était encombrée et il dut se faufiler entre les véhicules, faisant rugir le moteur de sa Ferrari rouge.
Soudain, un autre automobiliste avec une grosse Mercedes commença à faire la course avec lui l’empêchant de doubler ! Parfois ça amusait le prince, mais là, il se rendait à l’aéroport et ne voulait surtout pas être en retard.
Tapant comme un fou sur son volant, il accéléra, les traits crispés. Avec ses moustaches fournies en guidon de bicyclette de chaque côté de la bouche, il ressemblait à un mongol, ressemblance accentuée par la mâchoire saillante…
Les deux véhicules débouchèrent enfin sur le petit freeway menant à l’aéroport, mais, comble de lèse-majesté, la Mercedes ne se rangea pas… Mahmoud, ivre de fureur, finit par se faufiler par les bas-côtés Au risque d’écraser l’aile de sa Ferrari, il fit une queue de poisson à la Mercedes et la bloqua. En le reconnaissant, le conducteur pâlit, descendit de sa voiture. Mahmoud lui arrivait tout juste à l’épaule
Pourtant ce dernier se rua vers lui et le gifla toute volée.
— Tu n’as pas honte de te conduire ainsi !
L’autre bredouilla une vague excuse, tandis que Mahmoud remontait dans sa Ferrari. Il voulait bien faire la course à condition de gagner… L’aéroport n’était plus qu’à un kilomètre. Khoo, le « side-kick[25] » chinois, lui avait mis l’eau à la bouche en lui promettant une créature extraordinaire à l’arrivée du vol de Bangkok…
Il se gara en face de l’aérogare et descendit sous les regards respectueux des porteurs. Khoo, embusqué derrière un pilier, surgit, obséquieux à souhait, et se plia en deux.
— Pengiran, l’avion vient de se poser. Mrs Fraser est venue la chercher, mais j’arrangerai très vite un rendez-vous avec Votre Altesse.
Mandy la Salope avança dans la coursive ripolinée, très droite, les seins en avant, la croupe callipyge moulée par une robe de jersey gris. Les bas noirs à couture soulignaient le galbe de ses jambes. Elle avait complètement oublié qu’il faisait chaud à Bornéo… Le « 747 » d’Air France s’était posé pile à l’heure à Bangkok avant de repartir sur Hong-Kong et elle avait eu largement le temps pour sa correspondance. La balayeuse brunéienne, la tête recouverte d’un foulard, regarda cette créature d’un autre monde avec stupéfaction.
Derrière la vitre, Mahmoud en avalait sa moustache. La moitié des seins de Mandy Brown suffisait déjà à le rendre fou… Il la suivit comme un épagneul en rut. Il la voulait, il la lui fallait… Et cette démarche ! Il l’imaginait déjà sous lui. Quand elle ôta ses lunettes noires à l’Immigration et qu’il reçut le choc de ses yeux bleus, il manqua défaillir.
Khoo murmura à son oreille :
— Elle est belle, n’est-ce pas ?
Le prince Mahmoud répondit d’un grognement. Son regard n’arrivait pas à se détacher des jarretelles sculptées par le jersey. Et en plus, elle portait des bas, le fantasme absolu dans ce pays tropical ! Mandy se pencha pour ramasser son passeport, faisant saillir sa croupe et le frère du Sultan manqua passer à travers la glace… Elle se retourna et la vue de sa bouche épaisse détonant dans son visage faussement innocent donna à Mahmoud des envies immédiates de fellation…
Traînant son vison mauve, Mandy la Salope récupéra sa valise et se dirigea de sa démarche ondulante vers la douane.
Un des douaniers crut s’évanouir en voyant soudain surgir à son côté le propre frère du Sultan. Pétrifié de respect, il recula, laissant le prince Mahmoud jouer au douanier… Juste comme Mandy arrivait. Machinalement, elle tendit son passeport au prince. Ce dernier jeta d’une voix étranglée
— Open your suitcase, please.
Au bord de l’éjaculation… Avec un soupir excédé qui gonfla encore sa poitrine, Mandy s’exécuta. Le prince Mahmoud reçut en plein visage une gerbe de guêpières, soutien-gorge, bas, porte-jarretelles et autres fanfreluches.
Mandy en profita pour raccrocher une de ses jarretelles qui venait de se décrocher, relevant généreusement le bas de sa robe et dévoilant une cuisse fuselée.
De l’autre côté, Angelina Fraser se tordait de rire. Mahmoud referma vivement la valise comme si c’était la boîte de Pandore et Mandy s’éloigna avec du un balancement harmonieux des hanches. Elle s’arrêta, indécise. Angelina était déjà là et l’étreignait.
— Malko n’a pas pu venir, souffla-t-elle, mais y avez déjà fait une conquête.
— Qui ?
— Le type là-bas, avec la moustache tombante Mandy eut une moue dégoûtée.
— Celui-là, il n’y a pas longtemps qu’il est tombé de son cocotier.
— C’est le frère de l’homme le plus riche monde, précisa suavement Angelina. Le prince Mari-moud.
Le regard bleu de Mandy la Salope se fixa sur sa proie, ses lèvres se retroussèrent en un sourire carnassier, son corps se déhancha tout naturellement, les seins en avant et le prince Mahmoud eut l’impression que l’inscription « baise-moi » venait d’apparaître en lettres de feu sur son front.
— Remarque, j’ai vu pire ! laissa-t-elle tomber. C’est quoi cette race-là, ici ?
— Des Malais, expliqua Angelina en l’entraînant vers la voiture. Je suis sûre qu’il ne va pas tarder à donner signe de vie…
— Où est ce cochon de Malko ?
— Vous le verrez un peu plus tard.
— Ah le salaud ! Et où est la plage ?
— A une trentaine de kilomètres.
Mandy Brown s’en étrangla de rage.
— L’immonde salopard ! Et en plus, il ne vient même pas me faire un câlin. Moi qui me suis tapé vingt mille kilomètres.
— Ça fait partie du jeu, précisa la jeune diplomate. Durant le trajet, elle expliqua à Mandy ce qu’on attendait d’elle. En voyant le dôme en or massif de la mosquée Omar Ah Saifuddin, l’Américaine se dérida un peu. Un pays avec une mosquée comme ça ne pouvait pas être complètement mauvais.
Le téléphone sonnait quand elles pénétrèrent dans la villa des Fraser. Angelina répondit. C’était l’ignoble Khoo. Très, très excité. A peine eut-elle raccroché qu’elle annonça à Mandy.
— Vous êtes déjà invitée ce soir…
Malko tuait le temps en contemplant la Brunei River de la terrasse du parking de Jalan Cator. Angelina était en retard et il commençait à pleuvoir… Enfin, il vit surgir la Volvo ! Mandy Brown était assise à côté d’Angelina. A peine la voiture se fut-elle arrêtée qu’elle se précipita vers Malko. Ses escarpins de quinze centimètres ne l’empêchaient pas de courir. Il reçut le choc de son corps tiède et elle lui enfonça une langue chaude au fond des amygdales. Tout en se frottant à lui comme une chatte en chaleur…
Quand elle put parler, elle demanda, essoufflée
— Dis-moi, où c’est, cette ville du mec le plus riche du monde.
— Ici, dit Malko.
— Mais, c’est des pauvres tout ça ! fit Mandy, dégoûtée, désignant les masures sur pilotis du Kampong Ayer…
— Tu vois, la richesse est inégalement répartie, remarqua Malko.
Sournoisement, Mandy frottait son bassin au sien. Elle lui glissa à l’oreille
— On m’a tout expliqué, elle est sympa, ta copine. Mais tu ne peux pas me faire une petite avance…
— Impossible de se voir en dehors d’ici, dit Malko. Personne ne doit savoir que nous nous connaissons.
— Eh bien ici alors, fit simplement Mandy, ça me rappellera ma jeunesse.
Elle se glissa dans la voiture de Malko, sans attendre sa réponse ; Angelina les observait, mi-figue, mi-raisin…
— On revient ! cria Mandy.
Malko alla se garer en dessous, au quatrième étage, dans le coin le plus éloigné de la rampe. Mandy était déjà au travail avec son efficacité habituelle… D’elle-même, elle retroussa sa robe sur ses reins, découvrant les bas, le porte-jarretelles, et l’absence de slip. Elle se redressa, les yeux brillants, le masturbant avec lenteur.
— J’ai vachement envie, fit-elle d’une voix de petite fille vicieuse. Rien que d’y penser, c’est le Niagara. Y a qu’avec toi que ça me fait cet effet.
Elle se tortilla, lui offrant sa croupe, mais Malko était gêné par le levier de vitesse. Finalement, Mandy Brown poussa une exclamation exaspérée, ouvrit la portière et bondit de la voiture, nue des pieds à la taille.
— Viens ! lança-t-elle.
Dissimulée par un pilier de ciment, Mandy l’attendait, la croupe offerte, cambrée, sûre de son pouvoir érotique. Malko s’enfonça dans son ventre, derrière, et elle se cambra encore plus. Mandy gronda, tandis qu’il la tenait aux hanches pour un accouplement animal. Quand il explosa, elle jouit avec un tremblement de tout son corps. Malko donna encore quelques coups de reins, achevant de vider sa semence et la retourna.
Mandy Brown lui adressa un sourire ambigu.
— Tu te rends compte de ce que tu me fais faire : baiser dans un parking !
Elle se tortilla pour faire redescendre sa robe lança un gros soupir.
— Viens, on va remonter. Ta copine pourrait se faire des idées… Maintenant, je suis prête pour boulot.
Le succès de Mandy était fulgurant. Ses cheveux blonds relevés en chignon, moulée dans sa robe dentelle noire qui semblait cousue sur elle, soulignant chacune de ses courbes, elle avait presque l’air distingué, mais surtout aurait fait bander tout un cimetière avec un simple soupir… Debout près du buffet à côté d’Angelina, elle expédiait à tous les mâles qui passaient des œillades brûlantes. Le Premier aide de camp en avait oublié de lui baiser la main. Dès que Mandy faisait un pas, les conversations cessaient. Unique sujet : la dentelle allait-elle craquer d’un coup sous la pression de ses seins ? Nonobstant la chaleur, elle arborait des bas noirs à couture…
Le fantasme absolu de l’homme le plus riche du monde…
La plupart des Malais mettaient leurs mains dans leurs poches pour éviter de les serrer autour du cou de leurs compagnes habituelles.
Elle se pencha à l’oreille d’Angelina.
— Où est le singe de ce matin ?
— Il doit te guetter dans l’ombre, fit la jeune femme. Mais, à mon avis, il ne va pas tarder à se manifester…
Al Mutadee Hadj Ali s’approcha d’elles avec un sourire huileux, offrit une coupe de champagne à Angelina et se tourna vers Mandy Brown.
— Puis-je avoir le plaisir de vous faire visiter les lieux ?
— Vas-y, fit sournoisement Angelina, c’est superbe…
Mandy lui adressa un petit sourire en coin et se laissa entraîner, balançant ses hanches avec langueur. La jeune diplomate l’avait présentée comme la femme d’un ami de Bangkok. Elle la regarda partir, un peu inquiète, en dépit de ce que lui avait dit Malko
— Tu te souviens de Alien, ce monstre intersidéral extrêmement doué pour la survie ? Mandy, avec une apparence nettement moins inquiétante, est aussi redoutable…
Mandy la Salope. Lorsqu’il l’avait rencontrée à Honolulu, elle était la maîtresse d’un mafioso. Elle avait échangé une belle histoire d’amour contre trois millions de dollars et l’assurance que son « fiancé » ne la poursuivrait plus, grâce à deux balles de 11,43 judicieusement logées dans sa cervelle.
Plus tard, Malko l’avait retrouvée à Abu-Dhabi, pour le malheur d’un jeune Cheikh trop amoureux. Il se souvenait encore du formidable orgasme qu’avait éprouvé sur les coussins d’une Rolls-Royce, tandis que le bourreau décapitait son ex-amant. II l’avait croisée au Caraïbes dans le sillage de la Veuve de l’Ayatollah et ensuite avait résolu grâce à elle un petit problème au Yemen du Nord ; ce qui avait également coûté la vie à un officier yéménite fou d’elle… Mandy assurait très bien, persuadée que si Dieu avait permis qu’elle s’en tire, c’est qu’Il l’aimait bien. Pour tromper son anxiété, Angelina Fraser se mêla à un groupe de diplomates où se trouvait le nouvel ambassadeur d’Allemagne, jeune et bel homme ; elle surveillait discrètement les lieux. Ni l’ignoble Khoo, ni « Sex-Machine » ne s’étaient montrés. Ses amis l’entraînèrent autour de la piscine et le bavardage se prolongea presque une demi-heure. Quand ils revinrent dans le Country Club, il était presque vide. Pas de Mandy Brown, pas de Hadj Ali. Un des gardes de la sécurité, un Malais, s’approcha d’Angelina Fraser.
— Datin, annonça-t-il. Le Pengiran Al Mutadee Hadj Ali vous a cherchée. Il me charge de vous dire qu’il a dû repartir avec Sa Majesté et que votre amie sera raccompagnée en ville par Son Altesse le prince Mahmoud.
Il salua respectueusement et s’éloigna, laissant Angelina saisie. Les événements allaient encore plus vite qu’elle ne le pensait. Comme l’avait espéré Malko, le contact était établi. Mandy Brown était peut-être maintenant dans la place. A portée de voix du témoin principal de toute l’affaire : Peggy Mei