Chapitre 18
Le soleil était déjà à son déclin, lorsque les palanquins aux rideaux tirés, portés par des esclaves, amenèrent les trois femmes devant le batistan de Candie. Celui-ci était situé sur la hauteur. Il présentait de l'extérieur l'apparence d'un grand établissement carré de style byzantin s'ouvrant par de grandes grilles ouvragées. La foule était dense aux abords et les femmes captives, toujours sous la surveillance de leurs eunuques, durent piétiner à l'entrée, où un groupe s'agglutinait devant une sorte de tableau noir fait d'une dalle de marbre non poli. Un homme au teint bistré et au nez proéminent, vêtu d'une lévite brochée, mais ne portant pas de turban, écrivait avec soin en deux langues : italien et turc. Angélique connaissait assez d'italien pour pouvoir déchiffrer les inscriptions. Ce qui donnait à peu près ceci :
Grecs schismatiques 50 écus or.
Russes très forts 100 écus.
Maures et Turcs 75 écus.
Français en vrac, à l'échange 30 écus.
Cours des échanges
1 Français = 3 Maures à Marseille.
1 Anglais = 6 Maures à Tana.
1 Espagnol = 7 Maures à Monte-Christi (Agadir).
1 Hollandais = 10 Maures à Livourne ou à Gênes.
Une poussée de ses gardiens fit avancer Angélique et le petit groupe pénétra dans une vaste cour-jardin pavée d'un carrelage de précieuse faïence bleue très ancienne alternant avec des massifs de rosiers, de lauriers-roses et d'orangers. Une fontaine, joyau d'art vénitien, murmurait au centre. Les rumeurs de la ville mouraient à l'intérieur des épaisses murailles de ce caravansérail où les allées et venues, pour n'en être pas moins affairées, revêtaient la dignité plus solennelle du haut commerce. Car ici on n'était pas aux bazars. Alentour du jardin, des colonnes ciselées et couvertes d'anciennes peintures byzantines aux finesses d'enluminures soutenaient un long péristyle couvert, sur lequel s'ouvraient les portes de salles intérieures où avaient lieu les ventes.
Après avoir traversé le jardin dans toute sa longueur, le hammamtchi laissa ses ouailles devant le péristyle pour aller s'informer de la salle qui leur était destinée. Angélique étouffait sous les multiples voiles dont on l'avait revêtue. L'impression de mauvais rêve s'accentuait. Prise dans l'engrenage, elle se voyait ce soir au seuil de ces halles de chair humaine où des hommes de toutes races, à l'œil concupiscent, allaient se la disputer. Elle écarta le voile qui lui cachait le visage afin de respirer un peu. Le jeune eunuque lui signifia avec véhémence de se recouvrir. Elle ne l'écouta pas. Elle suivait, d'un regard morne et effrayé, la venue des acheteurs turcs, arabes ou européens qui traversaient les jardins et pénétraient sous les colonnes en se saluant courtoisement.
Soudain elle aperçut Rochat, le consul intérimaire, qui franchissait les grilles. Il avait une barbe de huit jours, à son habitude, et portait une liasse de papiers sous le bras. Angélique soudain s'élança et traversa le jardin en courant.
– Monsieur Rochat, fit-elle en l'abordant essoufflée, écoutez-moi vite. Votre ignoble camarade Escrainville a décidé de me vendre. Essayez de me venir en aide, je saurai vous en être reconnaissante. J'ai de la fortune en France, et souvenez-vous que je ne vous ai pas trompé pour les cent livres que je vous avais promises. Je sais que vous ne pouvez pas intervenir personnellement mais pourriez-vous intéresser à mon terrible sort des acheteurs chrétiens, par exemple des chevaliers de Malte, qui sont si puissants ici ? Je tremble d'être acquise par un Musulman et d'être emmenée dans un harem. Faites comprendre aux Chevaliers que je suis prête à payer n'importe quelle rançon s'ils réussissent à gagner les enchères et à m'arracher aux griffes de ces Infidèles. Ne pourront-ils avoir pitié d'une femme chrétienne ?
Le représentant français avait commencé par paraître très ennuyé et prêt à se dérober, puis s'était rasséréné à mesure qu'elle parlait.
– Mais c'est une excellente idée, fit-il en se grattant la nuque, c'est tout à fait réalisable. Le commissaire des Esclaves de l'Ordre de Malte, Don José de Almada, de la Langue de Castille, est présent ce soir ainsi qu'un très haut personnage de l'Ordre, le Bailli Charles de La Marche, de la Langue d'Auvergne, un de nos compatriotes. Je vais m'employer à les intéresser à votre cas. Je ne vois d'ailleurs pas ce qui pourrait les en détourner.
– Ne sera-t-on pas étonné de voir des religieux se porter acquéreurs d'une femme ?
Rochat leva les yeux au ciel.
– Ma pauvre enfant, on voit bien que vous n'êtes pas d'ici. Il y a beau temps que l'Ordre achète et revend des femmes au même titre que les autres esclaves. Personne n'y trouve à redire. Nous sommes en Orient et n'oublions pas que ces bons Chevaliers font vœu de célibat et non de chasteté. De toute façon, ce n'est pas la bagatelle qui les intéresse mais la rançon. La Religion a besoin d'argent, pour soutenir la vigueur de sa flotte guerrière. Or, je vais pouvoir me porter garant de vos titres, de votre rang et de votre fortune. De plus, les Chevaliers sont toujours heureux de se faire bien voir du roi de France et j'ai entendu dire que vous étiez bien en Cour auprès de Sa Majesté Louis XIV. Tout cela les convaincra de vous porter assistance.
– Oh ! merci, monsieur Rochat... Vous êtes mon sauveur !
Elle oubliait qu'il était veule, miteux et mal rasé... Il allait faire quelque chose pour elle. Elle lui serra les mains avec effusion. Il dit, ému et gauche :
– Ne me remerciez pas... Je suis heureux si je peux vous être utile... Je me tourmentais à votre sujet, mais je n'y pouvais rien, n'est-ce pas ? Enfin, maintenant gardez confiance.
Le jeune eunuque qui les avait rejoints poussait des cris d'orfraie. Il finit par saisir Angélique par le bras afin de faire cesser cet aparté scandaleux. Rochat s'éloigna rapidement.
Furieuse de sentir des mains noires sur son bras, Angélique se retourna et gifla les joues flasques de l'eunuque. Celui-ci tira son sabre et demeura indécis, ne sachant comment se servir de son arme contre une marchandise précieuse qu'on lui avait instamment recommandée. C'était un jeune eunuque, venu d'un petit sérail de province où il n'avait eu sous sa garde que de douces femmes indolentes. On ne lui avait pas encore enseigné comment il fallait s'y prendre avec des étrangères récalcitrantes. Ses grosses lèvres firent la moue comme s'il allait pleurer.
Le hammamtchi leva les bras au ciel en apprenant l'incident. Il n'avait plus qu'une hâte, c'était de se débarrasser de ses responsabilités. Par bonheur pour lui le marquis d'Escrainville arrivait. Les deux eunuques lui firent un récit détaillé de leurs difficultés. Le pirate jeta un regard haineux à la femme voilée en laquelle il avait peine à reconnaître le jeune chevalier du voyage. Sous la retombée des mousselines et des soies, toute la féminité d'Angélique était mise en valeur. L'antiquité, qui drapa les femmes au lieu de les corseter savait ce que la retombée d'une étoffe peut révéler d'un corps épanoui et désirable.
Escrainville grinça des dents. Sa main étreignit le bras d'Angélique jusqu'à la faire pâlir de douleur.
– Est-ce que tu ne te souviens pas, putain ? Ce que je t'ai promis si tu ne marchais pas doux ? Ce soir même tu seras entre les mains des eunuques ou bien livrée aux chats... Aux chats...
Une grimace horriblement cruelle déformait ses traits. Elle pensa qu'il ressemblait au démon.
Il se ressaisit parce qu'un invité remontait l'allée, un banquier vénitien, bedonnant, couvert de plumes, de dentelles et de dorures.
– Monsieur le marquis d'Escrainville, s'exclama le nouveau venu avec un fort accent, je suis heureux de vous revoir. Comment vous portez-vous ?
– Mal, répondit le gentilhomme-pirate, en essuyant son front en sueur. J'ai la migraine. Ma tête éclate. J'aurai la migraine tant que je n'aurai pas réussi à vendre la fille que vous voyez là.
– Belle ?
– Jugez-en vous-même.
D'un geste de maquignon, il écarta le voile d'Angélique. L'autre sifflota.
– Phutt !... Vous avez la chance avec vous, monsieur d'Escrainville. Cette femme va vous rapporter de l'or.
– J'y compte bien. Je ne la laisserai pas aller à moins de 12 000 piastres.
Le visage aux bajoues tremblotantes du banquier prit une expression déçue. Il devait penser que la belle captive était nettement au-dessus de ses moyens.
– 12 000 piastres... Certes, elle les vaut, mais vous êtes vorace !
– Il y a des amateurs qui n'hésiteront pas à monter jusque-là. J'attends le prince tcherkesse Riom Mirza, un ami du Grand Sultan chargé par celui-ci de lui dénicher la perle rare et aussi Chamyl-bey, le grand eunuque du pacha Soliman Aga, qui ne regarde pas au prix pour les plaisirs de son maître...
Le Vénitien poussa un profond soupir.
– Il nous est difficile de lutter avec les prodigieuses fortunes de ces Orientaux. Pourtant, j'assisterai à la vente. Ou je me trompe, ou nous allons avoir un spectacle de choix. Bonne chance, cher ami !
*****
La salle des ventes ressemblait à un immense salon. Des tapis précieux couvraient le sol et des divans bas étaient disposés le long des murs, se faisant face. Le fond de la pièce était occupé par une estrade à laquelle on accédait par quelques marches. Au plafond de précieux lustres de Venise reflétaient de leur mille pendeloques les lumières que des valets maltais achevaient d'allumer.
La salle était déjà à demi-pleine. La foule ne cessait d'augmenter. Des serviteurs turcs à longues moustaches et coiffés d'un cornet pointu en lamé d'or ou d'argent s'affairaient à distribuer de petites tasses de café et des assiettes de friandises sur des tables basses de cuivre ou d'argent. D'autres déposaient près de ceux qui le désiraient l'inévitable pipe à eau, dont le glougloutement discret se mêlait au bourdonnement des conversations. Les vêtements orientaux dominaient. Cependant, une dizaine de corsaires blancs côtoyaient de leurs culottes godronnées, les caftans brodés. Certains, comme le marquis d'Escrainville, avaient pris la peine de passer un justaucorps ou un habit pas trop défraîchi, de coiffer un chapeau aux plumes encore fournies, mais tous gardaient la parure belliqueuse de leurs nombreux pistolets ou de leurs sabres d'abordage. Des pipes hollandaises, à petit fourneau et long tuyau faisaient concurrence, sous les moustaches, à leur frère oriental le narguilé.
Le renégat danois Eric Jansen entra, escorté de trois gardes du corps tunisiens et alla s'asseoir, hautain et barbu, près du vieux marchand soudanais. Ce nègre, en robe barbare africaine, était un haut personnage, représentant les trafiquants du Nil chargés d'approvisionner les harems d'Arabie et d'Éthiopie et ceux de tous les sultans et roitelets de l'intérieur de l'Afrique. Ses cheveux blancs et crépus, sous une calotte brodée de perles, contrastaient avec sa peau noire, un peu jaunie aux pommettes et à l'arête du nez. Les trois femmes voilées et guidées par les eunuques traversèrent la salle dans sa longueur. On les fit franchir les marches de l'estrade, puis on les poussa dans le fond, un rideau pouvait les dissimuler à demi et là il y avait des coussins pour s'asseoir. L'Arménien qui tout à l'heure écrivait les cours de la Bourse des esclaves à l'entrée du batistan, s'approcha d'elles, en compagnie du marquis d'Escrainville. C'était Erivan, le commissaire-priseur, ordonnateur des cérémonies. Il portait une ample robe brune, une barbe assyrienne aux boucles bien peignées, une chevelure également bouclée et parfumée, et l'on sentait qu'il devait opposer à la fièvre des ventes, aux pleurs des esclaves et aux revendications des propriétaires, le même sourire onctueux et rempli d'aménité.
Il salua Angélique en français avec beaucoup de déférence, s'enquit en turc auprès de la Slave et de l'Arménienne si elles ne désiraient pas qu'on leur apporte du café et des sorbets, des confitures et des confiseries, afin de prendre patience.
Puis une vive discussion l'opposa au marquis d'Escrainville.
– Pourquoi lui relever les cheveux ? protestait celui-ci. Vous verrez, c'est une véritable cape d'or.
– Laissez-moi faire, dit Erivan, les yeux mi-clos. Il faut ménager les surprises.
Deux petites servantes furent appelées d'un claquement de mains. Sur les indications d'Erivan, elles tressèrent les cheveux d'Angélique et les relevèrent sur la nuque en un lourd chignon maintenu par des épingles à tête de perles. Puis elles l'enveloppèrent à nouveau de ses voiles.
Angélique se laissa faire, indifférente. Toute son attention se portait à guetter la venue d'un de ces chevaliers de Malte dont Rochat lui avait promis l'aide. Par la fente du rideau, elle essayait en vain de distinguer parmi les caftans et les redingotes, le sobre manteau noir à croix blanche des gentilshommes de l'Ordre. Des sueurs froides perlaient à ses tempes à la pensée que Rochat ne trouverait pas les arguments nécessaires pour convaincre ces prudents commerçants de lui accorder créance.
La vente commença. On présenta un Maure, spécialiste de navigation, et un silence appréciateur ne tarda pas à s'établir, devant cette statue de bronze dont le corps avait été soigneusement huilé afin de faire ressortir ses muscles noueux et ses formes herculéennes. Puis de nouveaux remous troublèrent l'attention, qui fut un instant détournée par l'entrée de deux chevaliers de Malte. Drapés dans leur ample manteau noir à croix d'argent, ils traversèrent la salle en s'inclinant devant les notabilités de Constantinople, s'avancèrent jusqu'à l'estrade et dirent quelques mots à Erivan. Celui-ci leur désigna le coin des captives. Angélique se redressa, pleine d'espoir.
Les deux chevaliers s'inclinèrent devant elle, la main sur la poignée de leur épée. L'un était espagnol, l'autre français, tous deux apparentés aux plus grandes familles d'Europe, car il fallait justifier d'au moins huit quartiers de noblesse pour obtenir le titre de chevalier dans le plus grand Ordre de la chrétienté. La sévérité de leur costume n'écartait pas un certain luxe. Sous leurs manteaux, ils portaient une courte chasuble noire, également marquée d'une croix blanche et recouvrant leurs justaucorps. Mais leurs manchettes et leurs cravates étaient de dentelle de Venise, leurs bas de soie soulignés d'une baguette d'argent et leurs chaussures également à boucles d'argent.
– Est-ce vous la noble dame française dont M. Rochat vient de nous entretenir ? demanda le plus âgé qui portait une perruque blanche dans le meilleur goût de Versailles.
Il se présenta :
– Je suis le bailli de La Marche, de la Langue d'Auvergne, et voici Don José de Almada, de la Langue de Castille, commissaire des Esclaves pour l'Ordre de Malte. C'est à ce titre qu'il peut s'intéresser à vous. Il paraît que vous avez été capturée par le marquis d'Escrainville, ce vautour puant, alors que vous vous rendiez à Candie, mandatée d'une mission par le roi de France.
Angélique bénit en pensée le pauvre Rochat d'avoir présenté les choses de cette façon. Il lui montrait la route à suivre.
Elle s'empressa de parler du Roi en personne habituée à la Cour, nomma ses relations les plus importantes, depuis M. Colbert jusqu'à Mme de Montespan, elle parla du duc de Vivonne, qui avait mis sa galère amirale et l'escorte de l'escadre royale à sa disposition. Puis elle raconta comment la croisière avait été désorganisée par l'attaque du Rescator...
– Ah ! le Rescator !... firent les Chevaliers en levant des regards de martyrs vers le ciel.
Comment par la suite elle avait essayé de poursuivre sa mission avec des moyens de fortune sur un petit voilier, lequel n'avait pas tardé à être la proie d'un autre pirate, le marquis d'Escrainville.
– Voici les effets déplorables du désordre qui règne en Méditerranée depuis que les Infidèles en ont chassé la discipline chrétienne, dit le bailli de La Marche. Ils l'avaient écoutée tous deux en hochant la tête, vite convaincus de sa sincérité. Les personnages qu'elle nommait, les détails qu'elle donnait sur son rang à la Cour de France, ne pouvaient leur laisser aucun doute.
– C'est une histoire déplorable, concéda l'Espagnol, lugubre. Nous devons au roi de France et à vous-même, Madame, d'essayer de vous tirer de ce mauvais pas. Hélas, nous ne sommes plus les maîtres à Candie ! Mais, en tant que propriétaires du batistan, les Turcs nous doivent quelque considération. Nous allons poser nos enchères. Je suis commissaire des Esclaves de l'Ordre, j'ai donc certaines disponibilités pour des affaires de mon choix présentant de bonnes garanties.
– Escrainville est exigeant, fit remarquer le bailli de La Marche, il voudrait au moins 12 000 piastres.
– Je peux vous promettre le double pour ma rançon, dit vivement Angélique. Je vendrai mes terres s'il le faut, je vendrai mes charges, mais vous rentrerez dans vos débours, je m'y engage. La Religion n'aura pas à regretter de m'avoir sauvée d'un sort horrible. Songez que si je suis emmenée dans un sérail de Turquie, désormais personne, même le roi de France, ne pourra rien pour moi.
– C'est hélas vrai ! Mais gardez confiance. Nous allons intervenir de notre mieux.
Cependant Don José paraissait soucieux.
– Il faut s'attendre à de grosses enchères. Riom Mirza, l'ami du Grand Seigneur, est annoncé. Le Sultan l'avait chargé de rechercher pour lui une esclave blanche d'une beauté exceptionnelle. Il paraît qu'il a déjà visité les marchés de Païenne et même d'Alger sans obtenir satisfaction. Il s'apprêtait à revenir bredouille lorsqu'il a entendu parler de la Française capturée par le marquis d'Escrainville. Nul doute qu'il ne s'accroche s'il découvre que Mme du Plessis représente l'idéal poursuivi en vain pour satisfaire son auguste ami.
– On parle aussi, comme concurrents possibles, de Chamyl-bey et du riche orfèvre arabe Naker-Ali.
Les deux chevaliers s'éloignèrent de quelques pas afin de discuter à mi-voix, avec volubilité, puis revinrent.
– Nous irons jusqu'à 18 000 piastres, dit Don José. C'est une marge énorme et certainement nos concurrents les plus tenaces se décourageront. Comptez sur nous, Madame.
Un peu soulagée elle les remercia d'une voix éteinte et regarda s'éloigner, le cœur serré, les deux silhouettes drapées dans leurs manteaux noirs à croix blanche. Auraient-ils été aussi généreux s'ils avaient su que la grande dame qu'ils désiraient sauver, avait encouru la disgrâce du Roi ?
Mais il fallait parer au danger le plus pressant. Esclavagiste pour esclavagiste, elle aimait mieux se retrouver du côté de la Croix que de celui du Croissant.