La partie est lancée. Sa Majesté s’est positionnée pour une levrette éléphantesque. Mme Solange est maintenant agenouillée dans le fauteuil qu’elle comblait (non pas d’aise, mais de son monstrueux cul). Accoudée au dossier, elle dérouille avec liesse les coups de boutoir d’Alexandre-Benoît qui l’a entreprise, comme le pic pneumatique entreprend la montagne en passe d’accoucher d’un tunnel. Il procède par larges et profondes fourrées, poussant des reins avec des « han ! » de bûcheron. Sans cesser de commenter ses prouesses, avec sa logique coutumière, il dit :
— Faut qu’m vas m’renseigner, Poulette. Dans tout’ c’ t’ bidoche, j’sus pas certain d’la mise en place à m’sieur Popaul. Y s’peuve qu’ j’égare dans des bourrelets. J’voudrerais pas déflaquer à côté d’la gagne, Trognon. Tu m’sens bien, au moinss ? C’est vrai, t’es sûre, j’sus dans le jack-pote ? J’peuve pousser les feux, c’est corrèque ? Biscotte si j’m’ trouvererais à côté du bonheur, tout c’qu’ tu y gagneras c’est d’l'irritance dans les pourtours, chérie. Non ? J’ r’monte bien les Champs-Zélysées ? Jockey. N’en c’ cas, j’envoye la brigade sauvage. Cramponne-toi au bastringage, va y avoir du gros temps, p’tit mousse.
« C’t’ crampe, faut aller la livrer à domicile, et avec un pareil paquet d’cul ça pose des problos. M’enfin j’en ai tiré d’autres, espère ! Qu’étaient pas toutes brodées à la main ! N’entr’ aut’ une giante dont elle a failli m’étouffer pendant qu’j’y f sais minouche ! Reus’ment que j’avais mon pistolet en fouille, y m’a permis d’donner l’alerte pour qu’on vinsse m’délivrerer.
« Oh ! dis donc, p’tite fée, mais tu gazouilles ! Tu découles en pâmade, on dix raies ? J’te sens v’nir un d’ces organes pas charançonnés, chérie. J’d’vine qu’tu vas gueuler au panais dans moins d’peu, mon zoisiau ! Toi, c’est l’essence qui t’mène. Mahousse comme t’es, tu dois panarder dans l’style Mare au Diable, j’ présage. Faut écoper après la séance ! R’joind’ la rive à la nage ! Vas-y du baba, ma jolie. Laisse-moi t’câliner les babines n’en même temps, qu’ça t’accrusse le charme.
« Quoi ? Allons bon, qu’est-ce qui vient ? Ah ! le facteur ! Y tombe mal, ce con. Bonjour, facteur ! Un r’commandé ? Posez-le su’ la table. Quoive ? Une signature ? Donnez vot’ carnet. Hein ? Faut qu’ ça soive maâme ? V’voiliez bien qu’elle est occupée. J’peuve pas l’interrompe, elle va pâmer d’une seconde à l'aut’. Ça lu carbonis’rait les sens. Grosse comme elle est, y aurait d’quoi y déclencher une crise cardiaque ; faut pas jouer av’c la santé, mon grand. Tu vas pas m’assassiner c’t’ vaillante gerce pour un’ signature ! C’est passib’ de corréquetionnelle. Laisse-moi l’temps qu’j’iu procède à la mise à feu.
« Assoive-toi, j’en ai pour dix s’condes montre en main. La fantasia cosaque, mon pote ! T’auras rien vu d’tel. Prends-en d’la grain’, si tu voudras d’viendre une étoile de sommier. Mate, fiston : une paluche su’ chaque meule. Et n’aye pas peur d’enfoncer les ong’ dans la bidoche, qu’é souffrasse un brin, ça pimente. V’là la décarrade annoncée à l’estérieur ! Tu la vois démener du fion, ma p’tite Miss Univers ? Je la grimpe en mayonnaise à cinq cents coups minute. A n’sait pu où qu’elle en soit ! Tu l’entends gueuler, dis, La Poste ? Ça c’est d’l’embroque de prestige, mec ! Le tourbillon géant ! A n’est pas prêt’ d’pouvoir se s’asseoir.
« Oh ! mais a crispe d’la bagouze, Miss Folie ! M’fait l’étau du diab’ en pâmoisant ! Douc’ment, fillette, j’ai déjà donné et mon panais est tout dolorié de mon emplâtrage précédent. Tu vois, facteur, comme ça chope very well son fade une grosse vachasse tell’ qu’ maâme ? Oh ! la la ! E m’fait Versailles ! C’est la féerique su’ l’ Grand Canal d’ l’urèt’, les Grandes Eaux ! Oh ! puis tiens, j’tire pas ma crampe personnelle, j’la garde pour mon quatre-heures. Tu peux lu faire signer, maint’nant, facteur.
« C’est à quel sujet, ce faf recommandé ? Le Trésor biblique ! Et c’est pour ça qu’tu viens nous perturbationner, Pé-et-Té ? Quand on n’a qu’ des fafs commak à délivrer, on les fout dans un’ bouche d’dégoût, n’au lieu d’faire chier les gens qui baisent. Cancrelat ! »
J’ai attendu la fin de la tirade avant de m’esbigner. C’était trop mobilisateur pour que je m’en aille en cours de diatribe. En cette époque d’indifférence et de mépris généralisés, il faut savoir respecter les grands textes.
Maintenant, après le coup de chiftir réparateur, les deux monstres vont claper les victuailles apportées par Casanova. Leurs ébats réclament réparation. Ça épuise, l’amour. L’essorage des glandes dévaste un organisme, même parfaitement équipé.
Retourne à ton enquête, Sana, et fais diligence comme disait Lesurcq au bourreau en montant sur l’échafaud.