21 Chapitre gloomy Sunday

La faim me tenaillant pourtant l’estomac, je ne suis pas allé déjeuner, j’ai tourné dans le quartier, dans l’espoir de tomber sur la poutre de Bamako. Merde ce type était à ma portée et j’ai pas bougé, impuissant le Requiem. Ça me la met plutôt mauvaise, je cours après ces ordures, j’en ai une qui vient se jeter dans la gueule du loup, et je reste comme un con.

Je suis retourné marauder autour du domicile de la pauvre Martine. Tu connais ce principe à la con : l’assassin revient toujours traîner sur les lieux de son crime.

Tu veux que je te dise ?

Non ?

Eh bien je vais te le dire quand même, c’est affligeant de connerie, il n’y est pas… ni lui ni personne d’ailleurs. Seule la rubalise flotte au vent mauvais tel un spectre maudit. Tu as noté j’espère que je viens de t’offrir en bonus une digression poétique digne d’un grand auteur néoromantique ! Et tout ça pour le même prix, elle n’est pas belle la vie ? Pour la faire simple, il n’y a personne dans le quartier. À part bien sûr la vieille bique d’à côté planquée derrière ses rideaux.

Je rentre au bercail aussi triste qu’un morbaque égaré sur le pubis glabre d’une actrice porno. Moi qui au départ avait une faim de loup, je me contente d’un figatelli qui traînait dans un placard, que je grignote avec une San-Piétra tout en surfant sur la toile.

Eh bien quand ça ne veut pas, ça ne veut pas, une journée de merde reste une journée de merde, peu importe ce que tu en fais.

Je ne trouve rien, pas de nouveau message dans la boîte mail de Martine, rien… le Darknet est calme.

Je fouille parmi les faits divers du même acabit, tape des mots clés, fouine, tente de trouver quelque chose qui me relierait à cette histoire. Je repense au monstre des salles de jeux dont m’a parlé mon pote, mais rien… quand ça ne veut pas, ça veut pas !

Je passerais bien un coup de fil à Régis, histoire de savoir où il en est, mais vu comment ça s’est passé entre nous avant-hier, je ne vais pas chercher la merde, je vais attendre que ça cicatrise un peu.

Il y a des jours où l’on ferait mieux de rester couché. Bon j’avais dû me lever du pageot pour célébrer la messe dominicale. Dommage…

Marrant comme le dimanche peut-être un jour pourri, néfaste, j’ai même croisé des gens qui détestaient. Pourtant c’est le jour du Seigneur, donc pour les cathos, et encore plus pour un gus comme mézigue, prêtre exorciste, c’est un jour de fête, sauf que là, j’ai beau me forcer, tenter de positiver, rien n’y fait.

Je suis aussi gai qu’un eunuque au salon de l’érotisme, qu’un pinson dans la gueule d’un renard affamé, tu l’auras compris je me pète une déprime XXL.

Et je ne connais qu’un seul insecticide, un seul traitement pour ce genre de cafard, car la bestiole est tenace, elle s’insinue dans les limbes de ton cerveau, y fait son nid, et pond ses idées noires. Elles se mettent à fermenter dans ton intellect, te broient la joie de vivre, des vieux souvenirs remontent, te torturent, des images te reviennent. Tu ne peux pas laisser faire, sinon ce genre de truc te ronge, tu es foutu. J’ai connu des mecs, des costauds, des vrais mâles qui ont commencé par un peu de vague à l’âme et qui ont terminé par faire une turlutte au canon de leur flingue en se tripotant la queue de détente.

Pas question pour moi de glisser sur cette pente, je vais le soigner ce mal, à ma façon. Je vais le noyer, l’aseptiser, le désintégrer, l’éliminer, le foudroyer… avec un flacon de Jack Daniel’s.

Je chope la bouteille de liquide ambré, à moitié pleine, ou à moitié vide, c’est selon. Un instant j’hésite à foutre un CD de Saez, mais je veux noyer mon spleen, pas me flinguer, donc j’opte pour un concert d’Higelin, et je me mets à picoler pour finir ce dimanche de merde.

La première gorgée me réchauffe le palais, je repense à la môme, à son sourire, à ses courbes, à la douceur du grain de sa peau. Je me remémore ses gémissements, son parfum, son regard profond, son rire, elle quoi… je me demande si Requiem n’était pas un tant soit peu amoureux… Vie de merde !

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