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Vous parlez d’un hôpital. On se serait cru dans un aéroport, avec des espaces ouverts et du verre partout. Il y avait même une sculpture devant l’entrée, un serpent enroulé autour d’une espèce de colonne. Le Voyageur s’avança parmi les infirmes et les boiteux en évitant de croiser leurs regards. Des femmes en peignoirs erraient sans but, un gobelet de café à la main ou, pour certaines, agrippées à leur paquet de cigarettes et à leur briquet. Des médecins aux visages juvéniles se déplaçaient par groupes de deux ou trois.

Même dans un endroit propre et flambant neuf, l’odeur de la maladie s’infiltrait partout. Le Voyageur haïssait les hôpitaux presque autant que le corps médical. Ce n’était que des églises pour les morts et les agonisants, administrées par des médecins pilleurs de cadavres, y compris de ceux qui respiraient encore.

L’un de ces brigands justement approchait, dans sa version féminine. Jolie, jeune, en blouse blanche avec des stylos dans sa poche.

« Vous cherchez les Urgences ? » demanda-t-elle.

Le Voyageur tourna sur lui-même pour examiner l’accueil. « Non.

— Oh. » Elle recula. « Pardon. C’est juste que votre œil a l’air…

— Mon œil va très bien. Où vous mettez ceux qui ont eu une attaque ?

— Ça dépend. Quand est arrivé le patient ?

— J’en sais rien.

— Il peut être soit en Réa, ou bien aux Admissions, ou dans un service, ou…

— D’accord, je le trouverai tout seul. »

En s’éloignant, il entendit : « C’est ça, allez vous faire foutre. »

Il se retourna mais elle partait déjà à grands pas.

« Connasse », lança-t-il.

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