Entrons dans la maison de Perrette la Jolie. Il est midi. C’est le moment où Jehan le Brave se met en route pour aller voir sa fiancée.
Nous voici dans l’atelier de la petite ouvrière parisienne, atelier qui sert de parloir et de salle à manger. Près de la fenêtre grande ouverte sur le jardin fleuri, par où le soleil entre à flots, Bertille est assise.
Perrette, les manches retroussées jusqu’aux coudes, manie le fer chaud avec quoi elle repasse la fine lingerie de ses clientes. Dame Martine, ouvrière et servante, va et vient, dessert la table que les deux jeunes filles viennent de quitter.
Et de cet intérieur si simple, égayé par la présence des deux jeunes filles, aussi adorables l’une que l’autre, de la grâce souriante et tranquille de leurs attitudes, il se dégage une impression de calme et de paix reposante.
– Perrette, dit Bertille de sa voix mélodieuse, vous êtes bien pressée de vous mettre à l’ouvrage! Ne pourriez-vous vous reposer un peu? Vous vous disiez souffrante, et c’est à peine si vous sortez de table.
De son petit air sérieux, sans aucune amertume, comme une chose qui lui paraît très naturelle, Perrette répondit:
– Il faut bien travailler, quand on est pauvre.
– Mais, répliqua vivement Bertille, si je ne suis pas riche, moi, Dieu merci, je ne suis pas pauvre non plus! Ce que je possède est suffisant et au-delà pour nous faire vivre largement tous! Je ne vois pas pourquoi vous vous tuez ainsi à la besogne.
– Mais, vous-même, qui prêchez, mademoiselle, pourquoi vos doigts de fée s’actionnent-ils si vivement après cette tant jolie broderie?
– Moi, dit Bertille en riant, c’est pour me distraire.
– Et moi aussi, assura Perrette. Et plus bas, pour elle-même, elle ajouta:
– Le travail console! Savez-vous, reprit-elle tout haut, que vous êtes une habile ouvrière en broderies? Je connais des dames de noblesse qui payeraient fort cher le travail que vous faites là.
– Oui, répondit Bertille en riant de plus belle, mais pour or ni argent elles n’auront l’écharpe que voici. Attendu qu’elle est déjà vendue, ma chère!
– À qui donc? Jésus Dieu! fit Perrette étonnée.
– À quelqu’un qui n’est pas loin d’ici! Ne trouvez-vous pas, Perrette, que cette écharpe ferait bien autour de votre cou?
– Moi? suffoqua Perrette, ce sont là affiquets de grande dame, dont ne saurait se parer une pauvre fille comme moi!
– Pourquoi donc? s’étonna Bertille. (Et avec un sourire malicieux.) Il vous faudra cependant consentir à vous en parer, puisque c’est pour vous que je la fais… Et me refuser serait me faire une injure grave que suis femme à ne pas tolérer.
Et se levant, elle courut embrasser de tout cœur la jolie Perrette, qui lui rendit son étreinte.
Nous avons esquissé ce tableau pour montrer que la quiétude des deux mignonnes jeunes filles était absolue, tant leur confiance était grande en ceux qui, elles le savaient, veillaient sur elles de près comme de loin.
De Jehan le Brave, elles ne parlaient pour ainsi dire pas. À quoi bon? Elles le sentaient toujours présent dans leur pensée et cela leur suffisait. Une heure environ s’écoula ainsi en propos d’une adorable ingénuité. Ce qui n’empêchait pas les mains de s’activer à la besogne, au contraire.
Tout à coup, on frappa à la porte de derrière.
– C’est la manière de frapper de M. Jehan, vint dire dame Martine, avec un gros rire malicieux. Faut-il aller ouvrir, demoiselle?
Et sans attendre la réponse, elle s’élança en riant de la bonne plaisanterie qu’elle croyait avoir faite.
La pièce dans laquelle se tenaient les deux jeunes filles donnait sur le devant. Elles ne pouvaient donc pas voir arriver le visiteur. Elles n’avaient d’ailleurs aucune inquiétude. Si elles avaient eu le moindre soupçon, Martine ne serait pas allée ouvrir. Elles continuaient paisiblement leur ouvrage.
Tout à coup, un cri perçant retentit. C’était la voix de Martine. Elles se regardèrent interdites. Et d’un même mouvement, elles s’élancèrent.
La porte s’ouvrit avant qu’elles n’y fussent arrivées. Un homme âgé, tout de noir vêtu, entra comme chez lui, le chapeau sur la tête. Derrière, quatre gardes, la pique à la main, portant le casque aux armes de Mme l’abbesse de Montmartre. À la fenêtre qui était au rez-de-chaussée, deux autres gardes se montrèrent, coupant la retraite. C’était le bailli et ses acolytes.
À cette vue, les deux frêles jeunes filles demeurèrent saisies. Et, pareilles à deux pauvres oiselets qui voient fondre le vautour, elles se blottirent l’une contre l’autre, Perrette enlaçant Bertille en un geste gracieux d’instinctive protection.
Sans saluer, gravement, d’un air très important, comme il convenait à un personnage de son importance, le bailli ânonna sur le ton de quelqu’un qui récite une leçon:
– Au nom de la très haute, très puissante et très sainte dame Marie de Beauvilliers, abbesse de Montmartre, jeunes filles, je vous arrête!
Et il les toucha du bout de sa baguette en signe de prise de possession, en ajoutant, toujours très digne:
– Gardes, emparez-vous des criminelles.
Et les quatre gardes, très gravement, entourèrent les deux criminelles.
Bertille, on a pu le voir, était une fille de résolution et d’énergie. Elle se dégagea doucement de l’étreinte de Perrette et se redressant, d’un air de souveraine dignité:
– Vous m’arrêtez au nom de Mme l’abbesse… Eh, qu’ai-je affaire avec l’abbesse?… Prenez garde, monsieur, vous violentez une fille de noblesse, qui est elle-même haute et puissante dame. L’égale en tous points de celle au nom de qui vous agissez. Je n’ai donc rien à voir avec la justice de Mme l’abbesse, dépendant uniquement de celle du roi; auquel je me plaindrai.
Sans se troubler le moins du monde, du même air rogue et entendu qui paraissait lui être particulier, le bailli répliqua:
– Ceci est un point que vous pourrez plaider, plus tard, quand viendra votre procès. Pour l’instant, il vous faut me suivre à la prison de notre sainte mère l’abbesse.
– Et si je refuse de vous suivre?
– En ce cas, dit froidement le bailli, ne vous en prenez qu’à vous-même de la violence à laquelle vous m’obligerez de recourir. De plus, remarquez que vous aggravez singulièrement votre cas par cet acte de rébellion.
Il paraissait très convaincu et très résolu, le digne bailli. Bertille comprit que toute résistance serait vaine.
– Soit, dit-elle, je cède à la force et vous suivrai, monsieur. Mais tenez pour assuré que je me plaindrai au roi.
Le bailli eut un mouvement d’épaules qui signifiait qu’il n’en avait cure. Il avait des ordres formels, il les exécutait; le reste ne le regardait pas.
Bertille et Perrette s’enveloppèrent dans leurs mantes, dont elles rabattirent les capuchons, et se tenant par le bras, elles suivirent les gardes qui les encadraient.
À la porte dérobée, Martine, à demi évanouie, était solidement maintenue par deux estafiers de Saint-Julien. D’un air digne et sévère, le bailli ordonna:
– Relâchez la servante. Et qu’elle n’y revienne plus!
À quoi ne devait plus revenir la servante? Le bailli ne le disait pas. Martine n’eut garde de s’informer. Sans demander son reste, elle fila, emportée par les ailes de la peur, et ne respira que lorsqu’elle se vit à l’abri, toutes portes dûment et solidement verrouillées.
Aux environs de la porte Montmartre, un homme s’avança, le nez au vent, bayant aux corneilles. C’était Carcagne, qui s’ennuyait tout seul et qui s’en allait tenir compagnie à ses deux compagnons: Gringaille et Escargasse. Visite un peu intéressée, car plus épris que jamais, il caressait l’espoir d’apercevoir le joli minois de Perrette, ne fut-ce qu’une seconde, en passant.
En bon badaud, il s’arrêta pour dévisager l’escorte et les deux prisonnières, en se disant:
– La justice de Mme de Montmartre!
Carcagne, comme ses deux compagnons, connaissait sur le bout du doigt tous les uniformes de toutes les justices seigneuriales de Paris, pour l’excellente raison que, peu ou prou, ils avaient eu maille à partir avec toutes.
Autrefois, en reconnaissant des agents d’une autorité quelconque, Carcagne se serait empressé de tirer au large, prudemment. Mais, maintenant qu’il était honnête, tripes du pape! il pouvait les regarder passer sans crainte. C’est ce qu’il faisait avec la satisfaction un peu étonnée de ne pas se trouver lui-même prisonnier au milieu des gardes.
En passant, une des deux prisonnières releva une seconde son capuchon et le regarda fixement.
Le bon Carcagne bondit, effaré.
– Tripes du pape! rugit-il dans son esprit, mais c’est Perrette!… Et la demoiselle!… Eh bien mais, et Gringaille et Escargasse, que font-ils donc?… Que va dire Jehan?…
Ceci se passa comme un éclair dans son esprit. Il était fort, Carcagne, et il le savait. Il crispa les poings et jeta un coup d’œil inquiétant sur les gardes qui marchaient très dignes.
– Ils ne sont que six! se dit-il. On peut en venir à bout!
Mais, à ce moment, ses yeux se portèrent plus loin que l’escorte. À quelques pas derrière elle, venaient Saint-Julien, le visage enfoui dans le manteau, et derrière lui ses dix estafiers aux gueules de dogues. Et malgré qu’ils affectassent des allures indifférentes, il était manifeste qu’ils «gardaient les gardes».
Carcagne ne brillait pas précisément par un excès d’intelligence. Mais il est des circonstances critiques qui se chargent de donner de la décision et de la perspicacité au plus borné des humains. Carcagne, d’un coup d’œil, vit l’escorte de Saint-Julien, et, du même coup, il comprit quel était son rôle et il dit:
– Six, ça pouvait passer, mais dix-sept, outre! comme dit Escargasse, ce n’est plus de jeu! J’en découdrai bien quelques-uns, c’est certain, mais les autres auront ma peau! Libre, je peux être utile… on ne sait pas. D’autant que je me demande ce que sont devenus Gringaille et Escargasse… Est-ce qu’on me les aurait tués, par hasard?… S’il en est ainsi, tripes du pape! je ne sais pas ce que je ferai, mais…
Ayant ainsi réfléchi, Carcagne renfonça la rapière qu’il avait à moitié tirée du fourreau et s’écarta, s’effaça, se fit aussi petit que possible pour passer inaperçu. Et il eut la chance de ne pas être vu. Alors, il se mit à suivre les deux escortes.
Parvenue rue de la Heaumerie, le bailli, ses prisonnières et ses six gardes pénétrèrent dans le cul-de-sac. Saint-Julien et ses hommes restèrent à l’entrée, comme pour en interdire l’approche à quiconque.
S’il connaissait tous les uniformes des agents, Carcagne connaissait aussi bien toutes les prisons. Dès que les deux troupes s’étaient engagées dans la rue de la Heaumerie, il avait été fixé et il avait murmuré:
– Le Savot aux Dames! (Le Fort aux Dames.)
Et il s’était tenu à l’écart.
Quelques minutes plus tard, le bailli et ses hommes reparaissaient et prenaient doucement le chemin de Montmartre. Saint-Julien, alors, sortit de dessous son manteau une bourse d’apparence respectable et la lança à ses malandrins, lesquels, le partage effectué en un clin d’œil, se dispersèrent aussitôt. La besogne pour laquelle ils avaient été embauchés était terminée, paraît-il.
Saint-Julien attendit que le dernier de ses hommes se fût éloigné. Il pénétra alors dans le cul-de-sac et alla frapper à la porte de la prison, le judas s’ouvrit à l’intérieur, une face patibulaire se montra à travers le grillage. Saint-Julien exhiba un papier. La porte s’ouvrit à l’instant même et il entra.
Carcagne l’avait suivi. Il resta un long moment à méditer devant la prison. Et voici ce qu’il trouva:
«Tâchons de savoir ce que sont devenus Escargasse et Gringaille. Ensuite, nous aviserons messire Jehan.»
Et il s’éloigna.
Bertille et Perrette furent enfermées ensemble, dans une cellule relativement confortable. En effet, il y avait là deux étroites couchettes une petite table et deux escabeaux. Le guichetier qui les enferma eut soin de leur faire remarquer le luxe insolite de leur cachot. Dans certaines cellules, les prisonniers n’avaient qu’une botte de paille pour s’étendre. Dans d’autres, ils n’avaient rien du tout. Elles devaient donc s’estimer heureuses d’être soumises à un régime de faveur.
Les deux jeunes filles se montrèrent indifférentes à ces détails. La seule faveur qu’elles appréciaient comme il convenait était de voir qu’on ne les séparait pas. À deux, la prison leur paraîtrait moins pénible.
Bertille, d’ailleurs, ne se montrait pas autrement inquiète. Elle expliqua à Perrette que la seule personne qu’elle avait à redouter était Concini. Or, il était avéré que Concini n’était pour rien dans leur arrestation. Elles ne tarderaient certes pas à sortir de là. Jehan ou M. de Pardaillan les en tirerait. Au besoin, elle écrirait au roi qui saurait bien, lui, faire lâcher prise à l’abbesse.
Le soir vint. On leur servit un repas modeste, il est vrai, mais qui laissait tout de même loin derrière lui le traditionnel pain sec et la cruche d’eau. Bertille, par raison, se força à manger. Perrette, déjà souffrante le matin, ne put rien absorber, si ce n’est un doigt de vin. Encore ne le prit-elle que pour répondre à l’affectueuse insistance de sa compagne.
Elles se couchèrent. Bertille n’était pas aussi rassurée qu’elle avait bien voulu le laisser croire à Perrette. Ce qu’elle n’avait pas dit, parce que ce n’était pas son secret, c’est que, instruite par l’expérience, mise en garde par Pardaillan, avec qui elle s’était longuement et mystérieusement entretenue, elle pensait que l’abbesse n’était qu’un instrument aux mains de personnages plus puissants qu’elle. Elle se disait qu’elle n’était prisonnière des religieuses qu’en apparence.
Elle ne doutait pas que cette nouvelle violence qui lui était faite n’eût trait au trésor et aux papiers qu’on savait en sa possession. Tôt ou tard, les larrons acharnés à la poursuite de ce trésor s’apercevraient qu’ils avaient été dupés. Alors, comme ils la tenaient, ils ne la lâcheraient plus jusqu’à ce qu’elle eût dit ce qu’elle savait ou livré les papiers qu’elle possédait.
C’était une longue, peut-être une éternelle détention qu’il lui faudrait subir. Sans compter les tourments et les tortures qu’on ne manquerait pas de lui infliger pour l’amener à livrer un secret qui n’était pas le sien.
Comme on voit, l’avenir lui apparaissait sombre et chargé de menaces. Et il fallait qu’elle fût douée d’une forte dose de courage et d’énergie pour avoir réussi à montrer à sa compagne un visage relativement calme et serein.
Il convient de dire que l’essentiel pour elle était de ne pas être aux mains de Concini, qu’elle redoutait au-dessus de tout, parce qu’il représentait le déshonneur. En outre, elle savait bien que Pardaillan remuerait ciel et terre pour l’arracher à une persécution dont il était indirectement la cause. Sans compter Jehan, qui ne resterait pas inactif. Encore fallait-il qu’elle pût les aviser au moins du lieu où elle était détenue.
Malgré ces appréhensions et ces craintes, trop justifiées, elle s’endormit aussitôt qu’elle fût couchée.
Il n’en fut pas de même de Perrette, qui n’avait pas les mêmes sujets d’inquiétude et qui, pourtant, demeura longtemps à se tourner et retourner dans son lit, sans que le sommeil parvînt à la gagner. Pourtant, elle finit par tomber dans une sorte de torpeur peuplée de cauchemars affreux.
Un rêve surtout l’impressionna fortement. Le voici:
Elle se voyait morte, raide sur sa couche, les yeux fermés, et elle voyait distinctement le mur au pied de son lit. Tout à coup, ce mur s’écarta. Une lumière douce éclaira la cellule; deux moines, capuchons rabattus, s’approchèrent. L’un d’eux souleva un de ses bras, et elle eût l’impression que ce bras retombait lourdement, inerte, et cela lui parut naturel: puisqu’elle était morte.
– Elles dorment! dit l’un des moines à demi-voix.
Elle fixa le mur. Il était revenu à sa place. Les moines saisirent demoiselle Bertille enroulée dans ses couvertures. Un religieux revint à la tête de son lit. Il paraissait chercher elle ne savait quoi contre le mur. Elle entendit un brut sec et elle vit que le mur, en face, s’ouvrait de nouveau. Les moines saisirent Bertille et l’emportèrent. Derrière eux, le mur se referma et elle se trouva dans l’obscurité.
Elle faisait des efforts désespérés pour crier à l’aide, se remuer, se réveiller. Et elle sentait que ses membres, lourds comme du plomb, se refusaient à tout service. Elle demeura dans cet état un temps qui lui parut long.
Tout à coup, elle entendit grincer les verrous, et la porte, la vraie porte, l’unique porte de son cachot s’ouvrit. De nouveau, il se trouva faiblement éclairé: deux moines – les mêmes peut-être – s’approchèrent de son lit et l’enlevèrent, comme ils avaient enlevé Bertille. Et ces deux moines étaient accompagnés d’un geôlier qui, une lampe à la main, les éclairait.
On l’emporta par la porte, que le geôlier ferma. Presque en face de cette porte, il y avait un escalier. Les moines se mirent à le monter. À l’étage au-dessus, ils tournèrent à droite. Le geôlier ouvrit la première porte, qui se trouvait sur la gauche. Elle sentit qu’on la déposait à terre, sur une botte de paille. Et les trois fantômes, moines et geôlier s’évanouirent, et elle se trouva plongée dans d’épaisses ténèbres.
Quelques moments s’écoulèrent. La porte s’ouvrit encore une fois. Le geôlier, seul cette fois, entra. Il portait un paquet qu’elle reconnut: c’étaient ses hardes. Il les laissa tomber à ses pieds et se retira sans bruit, L’obscurité redevint compacte et, sans doute le rêve, le cauchemar plutôt, s’était heureusement dissipé, car elle perdit toute conscience.
Lorsqu’elle se réveilla, le jour pénétrait dans son cachot par une étroite ouverture, munie de solides barreaux. Elle se sentait la tête singulièrement lourde. Elle promena autour d’elle des regards agrandis par l’étonnement. Elle se vit couchée sur une botte de paille, ses vêtements en désordre, à ses pieds.
Elle considéra sa cellule et ne la reconnut pas. Elle se trouvait dans un vrai cachot noir et sale, où régnait une odeur infecte qui paraissait se dégager de la muraille. Ce cachot avait à peine trois pas de large sur six de long. Heureusement, il était assez bien éclairé et aéré par la petite lucarne, sans quoi on n’eût pu y tenir à cause de l’odeur nauséabonde. Pas le moindre meuble, même pas un escabeau. Dans un coin, une cruche; sur la cruche, une boule de pain noir.
Perrette se mit à fondre en larmes. Et elle se disait:
– Ce n’était pas un rêve, hélas!… Pauvre demoiselle Bertille!… Pauvre Jehan!…
Elle aurait aussi bien pu dire: Pauvre Perrette!
Il paraît qu’elle n’y pensa pas.