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Le jet de la compagnie régionale Embraer atterrit avec un retard de quatre-vingt-dix minutes à l'aéroport de Munich. Le vol Alitalia AZ 0432 s'était déroulé sans incident. Malberg avait somnolé, non sans avoir auparavant détaillé les passagers qui l'entouraient. Il n'avait rien remarqué d'inquiétant. Il n'y avait rien de surprenant à ce qu'il continue à souffrir d'une sorte de syndrome de persécution. Il lui faudrait encore un peu de temps avant de s'habituer à ne plus être recherché par la police.

Lorsqu'il monta dans un taxi devant le hall du terminal 1, il fut accueilli par de la pluie et des bourrasques qui soulevaient les feuilles d'automne. Bien qu'il n'eût pas remis les pieds depuis deux mois dans son appartement de Munich-Grünwald, Malberg décida de se rendre d'abord à sa librairie. Il ne s'était encore jamais absenté aussi longtemps depuis qu'il avait ouvert cette boutique. Fort heureusement, il pouvait se reposer entièrement sur mademoiselle Kleinlein.

En effet, Malberg n'avait aucune raison de se faire de souci. Le chiffre d'affaires avait même augmenté, alors que la tendance générale était plutôt à la baisse durant les mois d'été. Mademoiselle Kleinlein lui indiqua qu'il était grand temps d'effectuer de nouvelles acquisitions.

Le marché des incunables et autres livres précieux était comme asséché depuis que des spéculateurs avaient découvert que les « vieux papiers » - comme elle aimait à le dire en plaisantant - étaient un investissement rentable. Les offres ne manquaient pas, mais elles se limitaient le plus souvent aux ouvrages relativement courants, et qui plus est dans un état tel que les prix restaient assez peu élevés.

Malberg était penché sur les livres de compte lorsqu'il reçut un appel en provenance de Rome. C'était Barbieri.

- Lukas, c'est toi ?

- Cela m'aurait étonné que tu me laisses en paix ne serait-ce que deux jours, grogna Malberg. Alors, qu'est-ce qu'il y a ?

- Il y a que ça bouge, ici. À cause d'une histoire franchement idiote !

- De quoi parles-tu ? Peux-tu être un peu plus précis ?

Silence. Lukas entendit Giacopo prendre une profonde respiration avant de se lancer. Il paraissait en colère.

- Pourquoi ne m'as-tu pas dit que tu avais rencontré cet homme au visage défiguré quelques jours avant qu'on ne retrouve son cadavre flottant dans la fontaine de Trevi ?

- Eh bien... je pensais que cela n'avait plus aucune importance. L'homme était mort avant que j'aie pu le revoir. Pourquoi ?

- Il y a des photos qui circulent dans Rome. On t'y voit en grande conversation avec cet horrible personnage.

- Arrête tes salades ! C'est quoi ce délire ?

- Je vais te le dire. Il faut déjà être fou pour prendre contact avec un malfrat notoire, connu des services de police. Mais, non content de cela, tu ne trouves rien de mieux que de le rencontrer dans la basilique Saint-Pierre, ce qui est carrément débile. Le moindre recoin du monument le plus célèbre du monde est truffé de caméras de surveillance, c'est un secret de polichinelle. Et on aurait tort de sous-estimer les services de sécurité du Vatican. Toujours est-il que, lors d'un contrôle, on a découvert des photos de ce Gueule-brûlée, et ces clichés ont été transmis à la police romaine. Malheureusement, sur ces photos, on voit aussi un certain Lukas Malberg...

Malberg était tétanisé.

- Dis-moi que ce n'est pas vrai ! bredouilla-t-il après un instant de silence.

- C'est vrai !

- Et comment sais-tu tout cela ?

- J'ai gardé de très bons contacts avec la police. J'ai vu les clichés de mes propres yeux. Tu es assez photogénique.

- Je n'ai vraiment pas le cœur à plaisanter !

- Pour parler sérieusement, je ne serais pas étonné qu'on fasse tôt ou tard le rapprochement entre toi et le meurtre de Gueule-brûlée.

- Mais c'est de la folie !

- La vie n'est qu'une vaste folie. Pas la peine de te faire du souci pour le moment. L'administration n'a pas encore identifié l'homme figurant sur les photos.

- Maigre consolation.

Barbieri se voulut rassurant.

- Je voulais seulement te tenir informé. Sois prudent. Quand reviens-tu à Rome ? Tu comptes toujours revenir ?

- Oui, naturellement. J'ai réservé mon vol pour après-demain sur Alitalia. Arrivée à dix-neuf heures vingt-cinq. Qui sait, il y aura peut-être une bonne âme pour venir me chercher. Au fait, qu'est-ce que tu entends par : « Sois prudent » ?

- Évite les caméras de surveillance dans les aéroports ou dans les lieux publics. Et fais aussi attention à ne pas griller un feu rouge. Ne roule pas trop vite, à cause des flashs. Ce genre de photo a déjà mis en difficulté des gens qui se croyaient en sûreté. Et, à propos de bonne âme, elle est à côté de moi.

Malberg fut heureux et soulagé d'entendre la voix de Caterina. Il l'écoutait presque avec recueillement, sans entendre ce qu'elle disait. Il la voyait devant lui, avec ses yeux foncés, et il laissait virtuellement glisser sa main le long de son corps.

- Tout va s'éclaircir, lui dit-elle. Dis, tu écoutes ce que je te dis ? demanda-t-elle après un long silence.

- Oui, oui, bégaya Malberg, gêné. Je me laissais juste aller à quelques souvenirs.

Caterina comprit son allusion.

- Tu es obsédé ? lui demanda-t-elle sur un ton moqueur.

- Non, répondit Malberg du tac au tac, mais je n'ai pas envie de penser à autre chose.

Il prit une profonde inspiration, comme s'il luttait contre lui-même pour revenir à la réalité.

- Tu as entendu ce qu'a dit Barbieri ?

- Oui.

- J'ai aussi du nouveau, poursuivit Malberg.

- Ne me fais pas lanterner !

- Marlène avait une sœur, Liane, une hôtesse de l'air qui vit à Francfort. Elle sait peut-être des choses sur la mystérieuse vie de sa sœur ; enfin, je n'ai pas trop d'espoir. Du reste, Marlène n'a jamais fait allusion à sa sœur. J'ai l'impression qu'elles ne s'appréciaient pas particulièrement.

- Et comment as-tu appris son existence ?

- J'ai rencontré Max Sydow, un ancien camarade de classe, à l'aéroport de Fiumicino. Il est pilote et il connaît Liane Ammer.

- Pourquoi ne lui téléphones-tu pas tout simplement ? Elle sait peut-être quand même quelque chose. Il se peut qu'elle connaisse quelqu'un qui soit susceptible de nous aider.

- Oui, peut-être.

- Alors, vas-y. Nous nous voyons après-demain. D'ici là, ne fais pas de bêtises. Je t'embrasse.

Avant même qu'il ait eu le temps de répondre, Caterina avait raccroché.

- Tout va bien ? lui demanda mademoiselle Kleinlein en s'avançant vers lui. Elle l'avait vu du magasin, en train de fixer le vide pendant de longues minutes.

- Je réfléchissais, c'est tout. J'ai quand même le droit, non ? Mais si vous voulez m'aider, vous pourriez peut-être me trouver un numéro de téléphone ?

Malberg prit un bout de papier sur lequel il griffonna : Liane Ammer, Francfort-sur-le-Main.

- Vous pouvez appeler les renseignements, ou bien vous le trouverez sur Internet.

- À vos ordres, patron, répondit mademoiselle Kleinlein avec une pointe d'ironie dans la voix, car elle n'aimait pas recevoir d'ordres.

Pendant que Malberg s'occupait du courrier en retard, une question revenait sans cesse le torturer : comment pouvait-il écarter les soupçons qui pesaient contre lui ? Plus il y réfléchissait, plus il était persuadé qu'il ne serait pas simple d'y parvenir sans jouer cartes sur table et sans livrer la raison de ses investigations. Ces dernières semaines, il avait compris tous les risques qu'il courait. Barbieri avait certainement raison de lui conseiller de faire preuve de la plus grande discrétion.

Sans dire un mot, mademoiselle Kleinlein glissa sur le bureau de son employeur le bout de papier que Malberg lui avait donné trois minutes plus tôt.

- Comment avez-vous réussi à trouver le numéro si vite ? demanda-t-il, plus pour être aimable que pour autre chose.

- En faisant comme n'importe quel abonné, moyennant une somme modique : j'ai appelé les renseignements, répondit-elle d'un ton sec.

Malberg tenait le bout de papier à deux mains, les yeux rivés sur le numéro qui y figurait. Il ne connaissait pas Liane Ammer et il ignorait également tout de la relation que les deux sœurs entretenaient.

Il devait en tout cas éviter que Liane se ferme immédiatement et refuse de lui fournir la moindre information. Mais comment s'y prendre ? Savait-elle seulement que sa sœur était morte ?

Il tripotait le bout de papier en tergiversant. Il finit par prendre le téléphone. Après plusieurs bips, il entendit un crachotement et une voix féminine sur un répondeur : Vous êtes bien chez Liane Ammer. Étant entre Madrid, Rome, Athènes ou Le Caire, je ne suis pas joignable pour le moment. N'hésitez pas à me laisser un message si vous avez quelque chose à me dire. Sinon, vous pouvez raccrocher. Merci de parler après le bip.

Malberg entendit le signal, mais ne broncha pas. Il ne s'était pas attendu à tomber sur un répondeur. Quelle attitude adopter ? Devait-il raccrocher ? S'il donnait la raison de son appel, il lui laissait la possibilité de réfléchir. À supposer qu'elle ne soit pas au courant de la mort de Marlène, il valait mieux qu'il se contente d'une simple allusion.

- Je suis un camarade de classe de votre sœur Marlène. Vous êtes sans doute depuis longtemps au courant de ce qui lui est arrivé. Je vous serais reconnaissant si nous pouvions en parler brièvement au téléphone. Je me permettrai de vous rappeler ultérieurement.

Puis il raccrocha, soulagé.

La nuit était déjà tombée lorsque Malberg quitta la librairie pour rentrer à Grünwald, un faubourg situé au sud, avec ses villas et ses appartements régulièrement cambriolés. Malberg y avait acheté un appartement dix ans plus tôt, à une époque où les biens immobiliers y étaient encore abordables. Il n'avait pas envie de rentrer chez lui et ne comprenait pas pourquoi. Cette réticence ne fit que s'accentuer lorsqu'en pénétrant dans l'appartement, il sentit l'odeur de renfermé. Cela faisait dix semaines qu'il avait quitté son appartement, depuis le milieu de l'été. On était maintenant en automne, et le temps était maussade.

Malberg ouvrit toutes les fenêtres. Puis il enleva sa veste, qu'il suspendit au portemanteau, et se laissa tomber sur le gigantesque canapé en cuir rouge. Il croisa les mains derrière la tête et réfléchit.

Avait-il bien fait d'appeler la sœur de Marlène ? N'aurait-il pas été préférable de lui rendre visite à l'improviste ? Elle n'aurait pas pu se dérober. C'est alors que son téléphone portable sonna.

- Bonjour, lança joyeusement Malberg, qui s'attendait à un appel de Caterina.

- Vous êtes bien monsieur Malberg ? lui répondit une voix grave et froide.

- Oui, dit Malberg, très surpris. Qui est à l'appareil ?

- Mon nom n'a pas d'importance.

- Écoutez, si vous ne jugez pas utile de vous présenter... commença Malberg, très remonté.

Mais son interlocuteur ne lui laissa pas le temps de finir sa phrase.

- Marlène est morte, l'interrompit l'inconnu. Pourquoi fourrez-vous votre nez dans sa vie privée ? N'allez surtout pas mêler Liane à tout cela !

- Mais Marlène a été assassinée ! Qui que vous soyez, monsieur l'inconnu, si Marlène ou sa sœur représentent quelque chose pour vous, alors il devrait vous tenir à cœur que ce crime soit élucidé !

Il s'ensuivit un interminable silence.

- Allô ? dit Malberg en pressant son oreille contre l'écouteur. Mais il n'entendit qu'un chuintement lointain. Il allait raccrocher lorsqu'il entendit à nouveau la voix grave.

- Malberg, ceci est une mise en garde solennelle ! Il n'y en aura pas une deuxième. Vous commencez à devenir gênant. Songez à Giancarlo Soffici, le secrétaire du cardinal Philippo Gonzaga !

Il y eut encore dans l'écouteur un crachotement, un grésillement, puis plus rien.

Malberg se leva. Il était abasourdi. Qui était cet homme ? Comment connaissait-il son nom et son numéro de portable ? Comment cet homme pouvait-il savoir qu'il avait téléphoné à Liane Ammer ? Que signifiait cette allusion au secrétaire de Gonzaga ?

Il faisait froid. Malberg frissonna. Il ferma machinalement les fenêtres et regarda par les vitres embuées la rue déserte à cette heure de la journée.

Il appuya la tête contre la vitre humide pour rafraîchir son front derrière lequel bouillonnaient toutes sortes d'idées. Il ferma les yeux. Cela faisait du bien de ne rien voir. L'obscurité favorise la réflexion. Mais il n'arrivait pas à se concentrer.

Une voiture s'immobilisa devant chez lui. Malberg ouvrit les yeux et fit un pas en arrière pour sortir du halo de lumière que projetaient les réverbères. Un homme sortit du véhicule et pénétra dans l'immeuble d'en face. Quelques minutes plus tard, au deuxième étage, des lumières s'allumèrent dans l'appartement situé à la même hauteur que le sien.

Inquiet, Malberg se précipita vers l'interrupteur et éteignit la lumière. Il s'approcha alors de la fenêtre. Dans l'appartement d'en face, la lumière était également éteinte. Son cœur battait à tout rompre, comme s'il venait de courir un mille mètres. Il observa la façade de la maison de l'autre côté de la rue. Il n'osait même pas baisser les stores.

Pourquoi n'avait-il pas réussi à prolonger la conversation avec l'inconnu ? Pourquoi s'était-il comporté comme un gamin intimidé ?

L'homme qui était entré dans l'immeuble d'en face quelques minutes auparavant en ressortit, se dirigea vers sa voiture et démarra. Quand on se retrouve dans des situations qui frisent l'absurde, la moindre inquiétude prend des proportions incroyables. Malberg se sentait oppressé. La sonnerie de son mobile l'arracha brutalement à ses réflexions.

Il n'avait pas l'intention de répondre.

Mais, comme le téléphone continuait de sonner, il finit par décrocher :

- Oui ? dit-il sur un ton hésitant, en s'abstenant de donner son nom.

- Mais, bon sang, où es-tu ? s'écria Caterina.

Sa voix lui fit l'effet d'une délivrance.

- Dieu merci ! dit-il tout bas.

- Comment cela, Dieu merci ? demanda Caterina. Je n'ai rien dit du tout. Tout va bien chez toi ?

Malberg bredouilla.

- Oui. Ou plutôt, non. Je viens de recevoir un curieux appel.

- De qui ?

- J'aimerais bien le savoir. L'homme avait une voix grave et glaciale. Il ne m'a pas donné son nom, bien que je le lui aie demandé.

- Et que voulait-il ?

- Que j'arrête de fourrer mon nez dans la vie de Marlène. Et surtout que je ne mêle pas sa sœur à cette affaire. Et puis, il a dit quelque chose de bizarre : que je devais penser au secrétaire du cardinal Gonzaga. J'ai oublié le nom qu'il m'a donné.

- Monsignor Giancarlo Soffici ?

- Oui, je crois que c'est ce nom-là.

Il y eut un long silence que Malberg interrompit.

- Caterina, pourquoi ne dis-tu rien ? Que se passe-t-il ?

- J'ai peur pour toi, finit-elle par répondre.

- Peur ? Malberg s'efforçait de garder son calme. Pourquoi peur ?

- Tu ne lis donc pas les journaux ?

- Non, désolé, je n'en ai pas encore trouvé le temps.

- Les journaux italiens titrent sur la mort tragique du secrétaire du cardinal Gonzaga.

- Qu'y a-t-il de si tragique à cela ?

- Il a été victime d'un accident sur une route de montagne qui conduit au château de Layenfels, une forteresse qui domine le Rhin. Tu la connais ?

- Jamais entendu parler ! Il y en a tellement !

- L'histoire est mystérieuse au plus haut point. Le secrétaire a brûlé dans sa voiture, qui était en fait le véhicule de fonction du cardinal secrétaire d'État Philippo Gonzaga. Ladite voiture avait disparu quelques jours auparavant. Les plaques minéralogiques de la Mercedes étaient fausses.

- C'est étrange, vraiment étrange ! remarqua Malberg.

Il feignait d'avoir l'air détendu, afin de ne pas alarmer Caterina. En vérité, les menaces de l'inconnu repassaient en boucle dans sa tête. Songez à Soffici ! Il comprit tout à coup les insinuations de cet homme. Songez à Soffici !

Il s'agissait d'une menace de mort. Et c'était aussi la preuve que le prétendu accident du monsignor n'en était pas un, mais plutôt un assassinat déguisé en accident...

- Dans un des articles à propos de la mort mystérieuse de Soffici, poursuivit Caterina, j'ai trouvé une photo de cette forteresse sur les bords du Rhin. Maintenant, tiens-toi bien : il y a sur la photo un indice qui renvoie directement à la mort de Marlène Ammer.

- C'est de la folie.

- Tu ne crois pas si bien dire. Cette forteresse est le siège d'une confrérie obscure qui dispose de beaucoup d'argent et qui héberge de grands esprits.

- Et où est le lien avec Marlène ?

Pas de réponse.

- Allô ? Allô ?

La communication était coupée. Malberg sentit son pouls s'emballer. Il tenta sans y parvenir de rappeler Caterina. C'était vraiment étrange. Son téléphone émit un bip. Caterina venait de lui envoyer un texto.

Je prends le premier vol pour Munich. Viens me chercher à l'aéroport stp. Je t'aime. C.

Malberg se laissa tomber dans le gros fauteuil où il s'asseyait toujours pour examiner les livres de valeur. Il n'avait pas vraiment le loisir de le faire en ce moment. Il rejeta la tête en arrière et fixa le plafond.

Ce que Caterina venait de lui dire n'était pas vraiment fait pour lui remonter le moral. Il sentait plus que jamais auparavant à quel point il avait besoin d'elle et à quel point elle faisait désormais partie de sa vie.

Il aurait bien aimé dormir, mais il était trop agité.

Tout à coup, il se leva d'un bond. Il prit dans le tiroir d'un secrétaire les clés de sa Jaguar et une lampe de poche. Puis il enfila une veste de cuir et descendit dans le garage de son immeuble.

La voiture élégante et capricieuse se trouvait là où il l'avait laissée, au milieu de toutes les Audi, Mercedes et autres coupés Porsche. Elle avait un peu pris la poussière, ce qui n'avait rien d'étonnant après une immobilisation de dix semaines.

Malberg s'approcha de son véhicule, tel un limier. Les néons répandaient une lumière blafarde dans le garage. Lukas alluma néanmoins sa lampe de poche et braqua le faisceau lumineux vers l'intérieur du véhicule. Il ne remarqua rien de particulier, rien qui lui parût suspect.

Une fois à la hauteur de la porte, côté conducteur, il se mit à genoux sur le sol en béton et éclaira le dessous de la Jaguar. Jamais encore il n'avait vu sa voiture sous cet angle-là. Il examina chaque détail.

Il s'y connaissait assez peu en mécanique. Il aurait été incapable de remarquer une éventuelle transformation du châssis. Il introduisit prudemment la clé dans la serrure de la portière.

Mais, tout à coup, il se figea, comme paralysé. Sa main droite refusait de tourner la clé. Malberg retira tout aussi prudemment la clé de la serrure. Il sentit la sueur couler le long de sa nuque. L'ombre de Marlène se rappelait à son souvenir.

Une fois de plus.

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