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Le général Kœnig, ce 27 mai 1942, est au milieu de ses soldats.

Ils bondissent hors de leurs trous individuels, attaquent les chars italiens de la division Ariete à la grenade, au revolver, et font prisonniers les équipages.

Ces 91 hommes capturés sont tous blessés, le corps couvert de brûlures. Les chars se sont aventurés dans les champs de mines, et, leurs chenilles détruites, immobilisées, ils ont été des cibles pour les canons des légionnaires de la 2e brigade.



Kœnig s’approche de l’un des prisonniers, le colonel Prestisimone.

L’Italien s’est conduit avec bravoure, changeant de char dès que celui qu’il conduisait était en flammes. Il est loquace malgré ses brûlures, sa souffrance, raconte qu’en 1918 il combattait aux côtés des chasseurs alpins français. Il a été blessé par les « Tedeschi », ces Allemands dont il est aujourd’hui l’allié, mais c’est entre Italiens et Français « une guerre fratricide ».


Kœnig consulte les plans d’attaque, les cartes que le colonel italien n’a pas eu le temps de détruire.

Rommel a prévu un horaire d’assaut, plein d’assurance. Il a écrit : « 9 h – 9 h 15, destruction de la division gaulliste par la 2e brigade Ariete. »

Quel mépris, mais aussi quelle méprise !

On va « harceler » Rommel, qui s’imagine sans doute que les Italiens l’ont emporté sur ces « satanés Français ».

Kœnig donne l’ordre aux brenn-carriers – ces voitures blindées – de partir en reconnaissance et d’attaquer l’ennemi.


Rommel est surpris par la résistance de ce point d’appui de Bir Hakeim qu’il comptait détruire en une quinzaine de minutes, et qui ne pouvait retarder son offensive.

Il a écrit, ce 27 mai 1942, à sa « très chère Lu » :

« Au moment où vous recevrez cette lettre, les communiqués de la Wehrmacht vous auront depuis longtemps mise au courant de ce qui s’est passé ici. Nous lançons aujourd’hui une attaque décisive. Ce sera dur, mais je suis persuadé que mes hommes vaincront. Ils savent tous ce qui est en jeu. Je n’ai pas besoin de vous dire comment j’y participerai. Je compte bien exiger autant de moi-même que de mes officiers et de mes soldats. Mes pensées volent souvent vers vous, surtout en ces heures capitales. »


Les champs de mines, les pièges ralentissent la progression de Rommel. D’une hauteur au sommet de laquelle Rommel a fait arrêter son command-car, il aperçoit l’Afrikakorps, qui se déploie dans le désert.


« Des nuages noirs roulent dans le ciel, donnant au paysage une étrange et sinistre beauté », écrit Rommel.

Mais il ne peut contempler longtemps ce panorama. Heure après heure, jour après jour, les combats deviennent acharnés.

Dans la nuit du 1er au 2 juin, la XCe division légère allemande et la division italienne Trieste achèvent d’encercler Bir Hakeim.

Les « gaullistes » refusent de se rendre.

« J’assumai moi-même, à plusieurs reprises, le commandement des troupes assaillantes, précise Rommel. Sur le théâtre d’opérations africain, j’ai rarement vu combat plus acharné. Les Français disposaient de positions remarquablement aménagées, ils utilisaient des trous individuels, des blockhaus, des emplacements de mitrailleuses et de canons antichars ; toutes étaient entourées d’une large ceinture de mines. »

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