Il nous en restait plus que sept… quatre garçons, trois filles… On a écrit à leurs parents si ils voulaient pas nous les reprendre ?… que notre expérience agricole nous réservait quelques mécomptes… Que des circonstances imprévues nous obligeaient temporairement à renvoyer quelques pupilles.

Ils ont même pas répondu ces parents fumiers ! Absolument sans conscience !… Trop heureux qu’on se démerde avec… Du coup on a demandé aux mômes si ils voulaient qu’on les dépose dans un endroit charitable ?… Au Chef-Lieu du canton par exemple ?… En entendant ces quelques mots ils se sont rebiffés contre nous et de façon si agressive, si absolument rageuse, que j’ai cru un moment que ça finirait au massacre !… Ils voulaient plus rien admettre… Tout de suite on a mis les pouces… On leur avait donné toujours beaucoup trop d’indépendance et d’initiative à ces gniards salés pour pouvoir maintenant les remettre en cadence !… Haricots ! Bigorne !… Ils s’en branlaient d’aller en loques et de briffer au petit hasard… mais à quoi ils renâclaient horrible c’est quand on venait les emmerder !… Ils cherchaient même plus à comprendre !… Ils s’en touchaient des contingences !… On avait beau leur expliquer que c’est pas comme ça dans la vie… qu’on a tous nos obligations… que les honnêtes gens vous possèdent… tout au bout du compte… que de piquer à droite, à gauche, ça finit quand même par se savoir !… que ça se termine un jour très mal… Ils nous envoyaient rejaillir avec nos salades miteuses… Ils nous trouvaient fort écœurants… bien affreux cafards !… Ils refusaient tout ce qu’on prétendait… Ils refusaient d’entendre… Ça faisait une « Race Nouvelle » pépère. Dudule le mignard de la troupe, il est sorti chercher des œufs… Raymond osait plus… II était devenu trop grand… C’était un « radeau de la Méduse » le petit gniard Dudule… On faisait des vœux… des prières… tout le temps qu’il était dehors… pour qu’il revienne indemne et garni… Il a ramené un pigeon, on l’a bouffé cru tout comme avec des carottes itou… II connaissait sa campagne mieux que les chiens de chasse le Dudule !… À deux mètres on le repérait plus… Des heures… qu’il restait planqué pour calotter sa pondeuse… Sans lacet ! sans boulette ! sans cordon !… Avec deux petits doigts… Cuic ! Cuic !… Il me montrait la passe… C’était exquis comme finesse… « Tiens, dix ronds que je te la mouche… et tu l’entends pas ! »… C’était vrai, on entendait rien.

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