Le lendemain, c’était l’après-midi, je fais à Robert : « Dis donc, môme ! Il va falloir que je descende. Ils sont venus encore ce matin demander leur broche de chez Tracard, ça va faire au moins huit jours qu’on aurait dû la leur livrer !… — Bon ! qu’il me répond, moi, il faut que je sorte aussi… J’ai un rambot avec une pote au coin du Matin »…

On dégringole tous les deux… Ni Antoine, ni la patronne n’étaient rentrés du déjeuner…

Comme on arrivait au second, je l’entends elle qui monte… Alors complètement essoufflée, congestionnée, incandescente… Sûrement qu’ils avaient bâfré trop…

« Où ça que vous partez, Ferdinand ?

— Faire une petite commission… Jusqu’au boulevard… voir une cliente !

— Ah ! vous en allez pas comme ça !… qu’elle me fait contrariée… Remontez donc un peu en haut !… J’ai juste deux mots à vous dire. »

Ça va… Je l’accompagne… Robert file à son rendez-vous.

À peine qu’on était entrés, elle referme la lourde, elle boucle tout, en plus elle met les deux loquets… Elle me précède, elle passe dans la chambre… Elle me fait signe aussi de venir… Je me rapproche… Je me demande ce qui arrive… Elle se met à me faire des papouilles… Elle me souffle dans le nez… « Ah ! Ah ! » qu’elle me fait. Ça l’émoustille… Je la tripote un peu aussi…

« Ah ! le petit salopiaud, il paraît que tu regardes dans les trous, hein ?… Ah ! dis-moi donc que c’est pas vrai ?… »

D’une seule main comme ça en bas, elle me masse la braguette… « Je vais le dire à ta maman, moi. Oh ! là ! là ! le petit cochon !… Chéri petit cochon !… »

Elle s’en fait grincer les dents… Elle se tortille… Elle m’agrippe en plein… Elle me passe une belle langue, une bise de voyou… Moi j’y vois trente-six chandelles… Elle me force de m’asseoir à côté sur le plume… Elle se renverse… Elle retrousse d’un coup toutes ses jupes…

« Touche ! Touche donc là ! » qu’elle me fait…

Je lui mets la main dans les cuisses…

« Va qu’elle insiste… Va ! gros chouchou !… Va profond ! vas-y… Appelle-moi Louison ! Ta Louison ! mon petit dégueulasse ! Appelle-moi, dis !… »

« Oui, Louison ! »… que je fais…

Elle se redresse, elle m’embrasse encore. Elle enlève tout… Corsage… corset… liquette… Alors je la vois comme ça toute nue… la motte si volumineuse… ça s’étale partout… C’est trop… Ça me débecte quand même… Elle m’agrafe par les oreilles… elle me force à me courber, à me baisser jusqu’à sa craquouse… Elle me plie fort… elle me met le nez dedans… C’est rouge, ça bave, ça jute, j’en ai plein les yeux… Elle me fait lécher… Ça remue sous la langue… Ça suinte… Ça fait comme une gueule d’un chien…

« Vas-y, mon amour !… Vas-y tout au fond ! »

C’est elle qui me maltraite, qui me tarabuste… Je glisse moi dans la marmelade… J’ose pas trop renifler… J’ai peur de lui faire du mal… Elle se secoue comme un prunier…

« Mords un peu, mon chien joli !… Mords dedans ! Va ! » qu’elle me stimule… Elle s’en fout des crampes de ruer ! Elle pousse des petits cris-cris… Ça cocotte la merde et l’œuf dans le fond, là où je plonge… Je suis étranglé par mon col… le celluloïd… Elle me tire des décombres… Je remonte au jour… J’ai comme un enduit sur les châsses, je suis visqueux jusqu’aux sourcils… « Va ! déshabille-toi ! qu’elle me commande, enlève-moi tout ça ! Que je voye ton beau corps mignon ! Vite ! Vite ! Tu vas voir, mon petit coquin ! T’es donc puceau ? Dis, mon trésor ? Tu vas voir comme je vais bien t’aimer !… Oh ! le gros petit dégueulasse… il regardera plus par les trous !… »

Elle se trémoussait tout le croupion en attendant que je m’amène !… Elle remuait tout le plumard en zigzag… C’était une vampire… J’osais pas trop en ôter. Seulement le carcan qui me gênait le cou davantage… Et puis mon veston et le gilet… C’est elle qui les a pendus près du lit, sur le dos de la chaise… Je voulais pas tout enlever mes frusques… comme faisait Antoine… Je savais que j’avais de la merde au cul et les pieds bien noirs… Je me sentais moi-même… Pour éviter qu’elle insiste, je me suis relancé au plus vite, je faisais l’amoureux, je grimpe, j’étreins, je grogne… Je me mets en branle comme Antoine, mais alors beaucoup plus doucement… Je sentais mon panard qui vadrouillait tout autour… Je bafouillais dans la mousse… J’avais le gland perdu… J’osais pas y mettre les doigts… Il aurait fallu pourtant… Je lui perdais encore la craquette… Enfin j’ai glissé en plein dedans… Ça s’est fait tout seul… Elle m’écrasait dans ses nichons ! Elle s’emmanchait au maximum… Comme on étouffait déjà, c’était une fournaise… Elle voulait encore que j’en mette… Elle n’implorait pas pitié comme à l’autre enflure… Au contraire, elle me faisait pas grâce d’un seul coup de bélier…

« Enfonce-toi bien mon gros chouchou ! Enfonce-la, va ! Bien au fond ! Hein ! T’en as, dis, une grosse belle bite ?… Ah ! Ah ! comme tu me crèves, gros salaud… Crève-moi bien ! Crève-moi ! Tu vas la manger ma merde ? Dis-moi oui ! Oh ! Oh !… Ah ! tu me défonces bien… Ma petite vache !… Mon grand petit fumier !… C’est bon comme ça ! Dis ? » Et hop ! Je lui foutais un coup de labour… J’en pouvais plus !… Je renâclais… Elle me sifflait dans la musette… J’en avais plein le blaze, en même temps que ses liches… de l’ail… du roquefort… Ils avaient bouffé de la saucisse…

« Jouis bien, mon petit chou ! Ah ! Jouis… On va juter en même temps !… Dis ! tu sors pas mon trésor d’amour !… Tu me mets tout dedans !… Va ! T’occupe pas !… » Elle se pâmait, elle prenait du gîte… Elle se retournait presque sur moi… Je sentais monter mon copeau… Je me dis au flanc… « Bagarre Mimile… » J’avais beau être dans les pommes… le temps d’un éclair… Je m’arrache… Je fous tout dehors… Il lui en gicle… plein sur le bide… Je veux serrer… Je m’en remplis les deux mains. « Ah ! le petit bandit voyou !… qu’elle s’écrie… Oh ! le sale crapaud répugnant ! Viens vite ici que je te nettoie… » Elle repique au truc… Elle me saute sur le gland en goulue… Elle pompe tout… Elle se régale !… Elle aime ça la sauce… « Oh ! qu’il est bon ton petit foutre ! » qu’elle s’exclame en plus. Elle m’en recherche tout autour des burnes… Elle fouille dans les plis… elle fignole… Elle va se faire reluire encore… Elle se cramponne à genoux dans mes jambes, elle se crispe, elle se détend, elle est agile comme un chat avec ses grosses miches. Elle me force à retomber sur elle…

« Je vais t’enculer petit misérable ! »… qu’elle me fait mutine. Elle me fout deux doigts dans l’oignon. Elle me force, c’est la fête !… La salope en finira pas de la manière qu’elle est remontée !…

« Oh ! mais il faut que je m’injecte !… » Ça lui revient d’un coup. D’un saut, la voilà dehors !… Je l’entends qui pisse dans la cuisine… Elle trifouille en dessous dans l’évier… Elle me crie : « Attends-moi, Loulou ! »… Je demande pas mon reste… Je bondis sur mon costard… J’attrape le battant de la porte, je pousse et me voilà sur le palier !… Je dévale quatre à quatre… Je respire un sérieux coup… Je suis dans la rue… Il est temps que je réfléchisse. Je souffle… Je marche doucement vers les boulevards.

Arrivé devant l’Ambigu… là je m’assois enfin ! Je ramasse un journal par terre. Je vais me mettre à le lire… Je sais pas pourquoi… Je me tâte la poche… Je faisais ce geste-là sans savoir… Une inspiration… Je touche encore… Je trouve plus la bosse… Je tâte l’autre… C’est du même ! Je l’ai plus !… Mon écrin il est barré ! Je recherche de plus en plus fort… Je tripote toutes mes doublures… Ma culotte… Envers… Endroit… Pas d’erreur !… J’entre dans les chiots… Je me déshabille totalement… Je retourne tout encore… Rien du tout !… Pas la berlue !… Le sang me reflue dans les veines… Je m’assois sur les marches… Je suis fait !… Extra ! Paumé comme un rat !… Je retourne encore un coup mes vagues… Je recommence !… J’y crois plus déjà… Je me souviens de tout précisément. Je l’avais bien épinglé l’écrin… Au tréfonds de ma poche intérieure. Avant de descendre avec Robert je l’avais encore senti !… Elles étaient parties les épingles !… Elles s’étaient pas enlevées toutes seules !… Ça me revenait subito la drôle de façon, qu’elle me tenait tout le temps par la tête… Et de l’autre côté de la chaise ?… Elle travaillait avec une main… Je comprenais tout ça par bouffées… Ça me montait l’effroi, l’horreur… Ça me montait du cœur… Ça me tambourinait plus fort que trente-six chevaux d’omnibus… J’en avais la tétère qui secouait… Ça servait rien… Je recommençais à chercher… C’était pas possible qu’il soye tombé mon écrin ! qu’il ait comme ça glissé par terre de façon que je l’avais pinglé !… Mais non !… Et puis une « nourrice » ça s’ouvre pas facilement !… Trois y en avait !… Ça part pas tout seul ! Pour me rendre compte si je rêvais pas, j’ai recouru vers la République… Arrivé rue Elzévir y avait plus personne là-haut !… Ils étaient déjà tous barrés… J’ai attendu sur les marches… Jusqu’à sept heures, s’ils rentreraient ?… Aucun n’est remonté…

J’essayais comme ça de me rendre compte par les mots, des bribes… et les incidents. Ça me revenait tout peu à peu… Si Antoine, il était l’auteur ? et le petit Robert alors ?… Si ils avaient tout goupillé ?… En plus de la vache… En me redressant debout je sentais plus mes deux guibolles… J’allais comme saoul dans la rue… Les passants, ils me remarquaient… Je suis resté un bon moment planqué sous le petit tunnel à la Porte Saint-Denis. J’osais plus sortir du trou… Je voyais de loin les omnibus, ils ondulaient dans la chaleur… J’avais des éblouissements… Je suis rentré tout à fait tard au Passage… J’ai dit que j’avais mal au ventre… Comme ça, j’ai coupé aux questions… J’ai pas pu dormir de la nuit tellement j’avais la colique… Le lendemain je suis parti au petit jour, tellement j’avais hâte de savoir…

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