Mlle Méhon, la boutique juste en face de nous, c’est à pas croire ce qu’elle était vache. Elle nous cherchait des raisons, elle arrêtait pas de comploter, elle était jalouse. Ses corsets pourtant, elle les vendait bien. Vieille, elle avait sa clientèle encore très fidèle et de mères en filles, depuis quarante ans. Des personnes qu’auraient pas montré leur gorge à n’importe qui.

C’est à propos de Tom, que les choses se sont envenimées, pour l’habitude qu’il avait prise de pisser contre les devantures. Il était pas le seul pourtant. Tous les clebs des environs ils en faisaient bien davantage. Le Passage c’était leur promenade.

Elle a traversé exprès, la Méhon, pour venir provoquer ma mère, lui faire un esclandre. Elle a gueulé que c’était infâme, l’ignoble façon qu’il cochonnait toute sa vitrine, notre petit galeux… Ça s’amplifiait ses paroles de deux côtés du magasin et jusqu’en haut dans le vitrail. Les passants prenaient fait et cause. Ce fut une discussion fatale. Grand-mère pourtant bien mesurée dans ses paroles lui a répondu vertement.

Papa en rentrant du bureau, apprenant les choses, a piqué une colère, une si folle alors qu’il était plus du tout regardable ! Il roulait des yeux si horribles vers l’étalage de la rombière qu’on avait peur qu’il l’étrangle. Tous on a fait de la résistance, on se pendait à son pardessus… Il devenait fort comme un tricar. Il nous traînait dans la boutique… Il rugissait jusqu’au troisième qu’il allait en faire des charpies de cette corsetière infernale… « J’aurais pas dû te raconter ça ! »… que chialait maman. Le mal était fait.

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