Toujours au pluriel, même si au singulier le mot a valeur d’approbation.
À la télévision, il existe deux sortes d’animateurs : ceux, les plus nombreux, dont les émissions sont ponctuées, hachées de salves d’applaudissements commandées par des chauffeurs de salle ; et ceux dont les émissions — magazines culturels, de reportage, d’enquête, débats politiques — ne retentissent pas des bravos du public, ne serait-ce que parce qu’il n’y est pas convié.
Les premiers vivent comme des acteurs ou des chanteurs. Ils ont besoin des applaudissements, ils s’en délectent, ils en font bombance. Pour les vieux, c’est leur schnouf, pour les jeunes, leur shit. Entendre le public battre des mains leur fait battre le cœur. Pour un silence trop long, ils risquent l’infarctus. C’est pourquoi ces animateurs-là ne peuvent envisager leur reconversion dans une activité discrète ou prendre d’eux-mêmes leur retraite. Pour les autres c’est dur aussi, mais quand même plus facile.
Il me semble que les animateurs des années fondatrices étaient moins accros à la télévision. Parce qu’à l’époque, sur les plateaux, on n’applaudissait pas, ou très peu. Ces applaudissements sont des avantages acquis. Aucun Français ne renonce jamais à ses avantages acquis. Plutôt mourir.
Ne pas croire cependant que la vie des animateurs aux écoutilles ovationnées ne soit pas sans douleur. Par exemple, quand ils montent dans l’autobus ou qu’ils entrent dans un supermarché, ils souffrent de ne pas être applaudis. Ils font toujours le même cauchemar : la claque bat des mains, mais ne produit aucun son. Ce silence bizarre ajouté au silence de la nuit les réveille. Ils disent qu’ils ont bien dormi s’ils n’ont pas fermé l’oreille de la nuit.